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Etudes on line: les instituts se mettent au mobile

De nouvelles méthodologies, une vision plus stratégique... Les études on line s'adaptent sans cesse aux exigences des annonceurs. Elles se développent aussi sur mobile. Une solution qui permet de recueillir en situation l'avis des consommateurs.

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Etre en mesure de saisir la perception du consommateur, comprendre ses besoins, anticiper ses désirs, est, plus que jamais, à l'ordre du jour. Mais ses comportements évoluent très vite et, pour rester en phase, les méthodologies appliquées afin de capter le ressenti «à chaud» se développent rapidement. Notamment avec la banalisation des smartphones. Plus de 71 % des personnes interrogées par Forrester dans une étude récenteEtude sur la diversité des profils et parcours des consommateurs de m-commerce en Europe, réalisée par Forrester Consulting, auprès de plus de 2 000 utilisateurs de smartphones en Allemagne, en France, au Royaume-Uni et en Suède. utilisent ces supports mobiles pour effectuer des recherches sur un produit et 53 % s'en servent directement pour effectuer leurs achats. 42 % des consommateurs interrogés dans le cadre de cette étude utilisent un appareil mobile en boutique et comparent les prix avant d'acheter, et 13 % n'hésitent pas à quitter le magasin s'ils repèrent une offre plus attractive ailleurs. Que faut-il en conclure? Pour les instituts, la réponse est évidente: la collecte des réponses in situ, en bénéficiant de l'instantanéité des terminaux mobiles, est une nécessité. La majorité des acteurs de l'étude on line s'est déjà mise en ordre de marche, sans perdre de vue le phénomène communautaire.

@ © Violetkaipa - Fotolia

Les marques à la recherche d'un accompagnement stratégique

Aujourd'hui, « l'entreprise doit intégrer de nombreux éléments dans l'appréhension de son marché et dans sa stratégie », déclare Patrick Van Den Bloeme, codirigeant de Harris Interactive France et UK. Crise économique, complexification des marchés, exacerbation de la concurrence, perpétuelle révolution technologique, évolution des consommateurs, à la fois clients, shoppers et users...

Le contexte économique, plus complexe, a un impact évident sur l'utilisation que les marques peuvent faire des études on line. « Dans ce contexte, pour répondre au mieux aux besoins des entreprises, le métier des études, qualitatives notamment, a évolué », précise-t-il. L'institut doit désormais être source de valeur ajoutée, conseiller en amont mais aussi en aval de l'étude, en accompagnant son client dans une relation de partenariat durable. Globalement, les budgets que les marques consacrent aux études sont plutôt en baisse, « ce qui oblige les instituts et les panélistes à renouveler sans cesse leur offre, indique Valérie Jourdan, fondatrice de Promise Consulting, sans oublier qu'il est toujours plus difficile de faire participer les sondés ». Les responsables de The Promise Consulting expliquent ainsi que l'on constate, outre-Atlantique, une réelle chute de la courbe de réponse moyenne et que ce phénomène de saturation, lié à la sursollicitation des cibles, est une difficulté supplémentaire à laquelle le marché français va être confronté. « Pour pallier cette difficulté, mobiliser les répondants sans influencer la nature même de leur participation, il est indispensable d'innover sans cesse », affirme Valérie Jourdan, dont l'offre s'appuie notamment sur un comité scientifique, qui veille sans cesse pour trouver de nouveaux moyens de faire participer les sondés.

Nathalie Perrio-Combeaux, co-CEO de Harris Interactive France & UK, évoque l'impact du smartphone et des réseaux sociaux sur les études

Nathalie Perrio-Combeaux, co-CEO de Harris Interactive France & UK, évoque l'impact du smartphone et des réseaux sociaux sur les études

Nathalie Perrio-Combeaux, co-CEO de Harris Interactive France & UK, évoque l'impact du smartphone et des réseaux sociaux sur les études

« Les études via les mobiles et les réseaux sociaux sont d'actualité, car sont en phase avec le comportement des consommateurs », explique la dirigeante de Harris Interactive. Avec un taux d'équipement très élevé et sans cesse croissant, et face au fait que les internautes connectés aux réseaux sociaux se comptent par millions (les jeunes en font un usage intensif, notamment), « ce canal de collecte ne peut être négligé », précise-t-elle. Pour autant, comme l'explique la spécialiste, « les études sur mobile ne sont, en soi, pas récentes, puisqu'il existait des protocoles par SMS. Ce qui change aujourd'hui, c'est la part importante de consommateurs utilisant leur mobile pour se connecter à Internet: entre 30 et 50 % des consommateurs selon différentes estimations ». Face à l'évolution des usages, les techniques d'étude ont dû s'adapter, notamment face aux contraintes liées au terminal lui-même (systèmes d'exploitation, taille d'écran, ergonomie...). Le mobile redynamise le potentiel de remontées spontanées des consommateurs. « Nous ne sommes pas seulement dans un mode push, où nous envoyons des enquêtes compatibles avec les terminaux mobiles, mais également en mode pull, où le consommateur peut partager son expérience, à l'aide d'applications ou en tapant une adresse imprimée sur un flyer, une publicité, un packaging, un ticket de caisse... voire pour les plus technophiles en scannant un QR code... Bref, il ouvre le champ à des études potentiellement plus réactives, plus pertinentes », conclut Nathalie Perrio-Combeaux.

Etudes on line: leur champ d'application ne cesse de s'élargir

Autre constat majeur: les études on line ont considérablement élargi leur périmètre, devenant même le mode de recueil dominant. Au départ, les acteurs du on line faisaient valoir des gains économiques et de temps, alors qu'il faut davantage considérer le on line comme un mode de recueil autorisant l'innovation, des gains ergonomiques. Avec le temps, les annonceurs ont élargi leur spectre d'études, en dépassant le cadre des études tactiques pour intégrer tous types de projets plus stratégiques. Collecte de retours d'expériences sur un grand nombre d'individus, enquêtes de satisfaction sur un produit ou un service, tests de produits à domicile puis recueil des usages et réactions au jour le jour, tests de notoriété et bilans de marque, étude de marché et tests de segmentation, focus groups en ligne, les champs d'application des études on line sont très variés et s'enrichissent régulièrement de nouveaux développements.

De plus, l'usage du mobile comme instrument de recueil offre clairement de nouvelles perspectives. « Nous sommes convaincus de l'intérêt du mobile, grâce aux premiers projets clients que nous avons menés, indique Patrick Van Den Bloeme. Une étude présentée lors du dernier Printemps des études démontre la fiabilité de cet instrument ainsi que l'accueil extrêmement favorable des répondants. » Pour autant, il ne faut pas négliger le fait que des contraintes (environnement technologique, législation sur la géolocalisation notamment, prise en charge des dépenses potentielles des répondants...) et des limites demeurent. «On ne peut pas tout faire avec ce mode de recueil, mais globalement, c'est un apport significatif dans notre métier et il ne peut que se développer», continue le responsable de Harris Interactive.

Poser des questions à un consommateur afin que ce dernier y réponde sur son ordinateur face à un formulaire, confortablement installé, n'a rien à voir avec le fait de le solliciter sur un téléphone mobile. Pour Guillaume Weill, directeur général de CRM Metrix, « si les remontées d'informations via les téléphones mobiles sont plus instantanées, il faut malgré tout se limiter à sept ou huit questions». Le spécialiste rappelle par ailleurs que les contraintes liées à l'ergonomie des téléphones mobiles sont bien réelles: « L'espace d'affichage est limité et il ne faut jamais perdre de vue le confort du répondant! »

Patrick Van Den Bloeme (Harris Interactive France & UK)

Patrick Van Den Bloeme (Harris Interactive France & UK)

C'est donc une réalité à admettre, car elle est mise en exergue par tous les acteurs de l'étude on line: «Nous ne pouvons pas concevoir un questionnaire sur un téléphone mobile de la même façon qu'on le fait sur Internet», affirme Orkan Dolay, managing director de Respondi. Pour ce spécialiste qui travaille sur les études sur mobile depuis 2008, il existe de nombreuses façons de collecter des réponses via un terminal mobile. « Nous pouvons faire du push via SMS et lancer des questionnaires quanti, mais il nous faut alors limiter la taille et la longueur des questions. Nous pouvons également travailler en pull. » Dans ce cas, il est proposé au consommateur de scanner un code-barres pour afficher un questionnaire spécifique.

Pierre Gaillardon, directeur d'études en charge des panels on line pour QualiQuanti.

Pierre Gaillardon, directeur d'études en charge des panels on line pour QualiQuanti.

« Nous sommes très attentifs au phénomène de la mobilité »

3 questions à... Pierre Gaillardon, directeur d'études en charge des panels on line pour QualiQuanti.


Marketing Magazine: Comment percevez-vous le marché des études on line au premier semestre 2012?
Pierre Gaillardon: Ce que nous observons avant tout, c'est la complémentarité des différents canaux de collecte pour les études, qu'il s'agisse d'études quantitatives ou qualitatives. Les instituts et les marques mesurent parfaitement la nécessité d'associer tous les médias pour collecter des réponses aussi représentatives que possible. Le niveau de maturité technique est désormais très élevé, mais il en est de même du côté des consommateurs, qui ont perdu leur naïveté et sont très au fait des techniques marketing. C'est une variable à prendre en considération lorsque l'on élabore des questionnaires.


Comment jugez-vous le développement des études via les téléphones mobiles?
Une chose est sûre, le mobile est un moyen complémentaire de recueil qu'il faut intégrer dans les stratégies de collecte, car il permet de toucher les personnes dans des endroits ou des postures dans lesquelles d'ordinaire on ne peut pas les atteindre. Nous sommes très attentifs au phénomène de la mobilité. C'est un vecteur incontournable, car l'appareil est en permanence dans la poche du consommateur. Comment trouver un meilleur outil pour obtenir des réponses à des questions? L'utilisation qui peut être faite du téléphone est particulièrement riche, depuis le traitement de la voix via le téléphone mobile jusqu'aux questionnaires sur smartphone.


Quels sont, à vos yeux, les leviers les plus pertinents pour exploiter les terminaux mobiles?
C'est toute la difficulté! Il n'existe aucun intermédiaire entre l'expérience et l'expression de l'expérience. Il faut donc adapter l'exploitation que nous pouvons en faire, soit en misant sur des adaptations de nos logiciels de traitement, soit en passant le développement d'applications spécifiques ou encore par le biais de questionnaires activés et administrés via les QR codes. Avec le mobile, nous devrons également concevoir des questionnaires plus graphiques, car nous devons nous adapter à l'usage qu'en font les consommateurs.

Deux atouts: la géolocalisation et l'instantanéité

Mais ce que retient avant tout Orkan Dolay, c'est « la possibilité d'effectuer un travail sur mesure. En fonction du suivi du consommateur que l'on veut obtenir, il est possible d'envisager une sollicitation à intervalles réguliers, pour être certain de ne pas manquer un moment-clé de sa vie ». Mais, comme pour les études «classiques», les études via un terminal mobile exigent « que l'on sache déterminer les leviers permettant d'enflammer le consommateur. Il faut l'inciter à répondre et à participer sans pour autant monétiser sa participation. C'est là tout la difficulté de l'exercice».

Difficile à ce jour de mesurer le plein potentiel du téléphone mobile et son impact sur les études on line, pour la bonne raison qu'il existe encore de nombreux chantiers en développement à ce jour. Le marché des smartphones se développe rapidement (on estime le taux d'équipement à environ 35 % de la population), mais les technologies en elles-mêmes évoluent et compliquent la donne. « Nous sommes prêts à développer des applications spécifiques pour smartphones, confie Orkan Dolay, car cela nous permettra de rester en contact en permanence avec les répondants, mais il faut que les instituts définissent leurs besoins réels pour que nous leur proposions des solutions adaptées. » Nicolas Hébert, responsable département quanti pour Sorgem, rappelle que si les clients sont très attirés par les perspectives offertes par le canal mobile, il ne faut pas tomber dans le fantasme. La richesse du support mobile est indéniable, mais il faut veiller à ne pas être trop intrusif, et les processus de collecte doivent encore être affinés. « La possibilité de travailler en push par SMS, l'exploitation des QR codes, la réponse à des formulaires simplifiés, la création d'applications spécifiques, l'intégration des technologies Flash sont autant de problématiques qui peuvent avoir un impact non négligeable sur la qualité des études », précise le responsable du département quanti.

La collecte de réponses via le mobile offre un avantage appréciable, l'instantanéité. «L'atout majeur avec le mobile, c'est la collecte à chaud, indique Stéphane Marder, président de future Thinking France. On trouve enfin une solution à la déperdition d'informations liée au délai entre le vécu du consommateur et la relation de son expérience. »

Particulièrement adapté pour les études réalisées en point de vente, le terminal mobile est susceptible d'apporter de nouveaux enseignements, notamment au sujet des éléments qui décident le consommateur à finaliser son achat. « C'est bien la possibilité d'interroger le consommateur au plus près de son acte d'achat qui est riche d'enseignements », explique Guillaume Weill, directeur général de CRM Metrix.

Orkan Dolay (Respondi)

Orkan Dolay (Respondi)

Avec la géolocalisation (sous réserve d'un respect scrupuleux des pratiques déontologiques de la profession) et l'utilisation des ressources multimédia des smartphones, la qualité des réponses obtenues pour les études est optimale. «Le répondant peut photographier, par exemple, l'élément qui l'a incité à acheter, c'est une nouvelle façon de concevoir les études », confirme Nicolas Hébert.

Adeline Baret, (Spa Future Thinking)

Adeline Baret, (Spa Future Thinking)

Be-There et See-Me: l'étude mobile selon Spa Future Thinking

La principale différence entre Be-There et See-Me, les deux nouvelles offres de Spa Future Thinking en matière d'études via les téléphones mobiles, tient au fait que, pour le premier, le répondant est actif. En effet, avec See-Me, c'est la fonction appareil photo numérique ou caméra vidéo du smartphone qui est exploitée. « Avec See-Me, nous filmons ou photographions les activités du répondant pendant une séance de shopping, par exemple, explique Adeline Baret, directrice de la recherche pour Spa Future Thinking. Nous complétons la captation visuelle par un long entretien. » Pour cette experte, le décalage entre le comportement réel du participant et sa perception est très instructif. L'offre Be-There est davantage destinée à la préparation d'un focus group, par exemple. « Be-There intervient souvent en complément d'une étude quali. Les participants sont leur propre enquêteur et ils sont recrutés comme pour des études quali classiques », explique Adeline Baret. Une fois l'application installée, ils reçoivent des codes leur permettant d'accéder à l'étude sur une plateforme spécifique. Avec See-Me, la difficulté réside avant tout dans le temps nécessaire au visionnage des images ou des vidéos. « Nous regardons en accéléré et à plusieurs, et nous arrêtons lorsque nous détectons visuellement des points décisifs dans l'acte d'achat, par exemple. L'association de l'image et du déclaratif offre vraiment un éclairage très pertinent », confie la directrice de la recherche.

Etudes et réseaux sociaux: des développements en cours!

Compte tenu de leur importance sur le Web, les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Google+, LinkedIn, Viadeo et, plus récemment, Pinterest) ont totalement bouleversé les usages. Ils ont contraint les marques à revoir leur posture par rapport à leurs clients et, de manière plus générale, ils ont poussé les entreprises à repenser leur stratégie digitale de fond en comble, en intégrant une nouvelle dimension essentielle: la viralité. « Pour les instituts d'études comme pour les annonceurs, les réseaux sociaux - mais aussi les mobiles, dans la mesure où l'usage des réseaux sociaux sur les mobiles est en forte croissance - sont des moyens supplémentaires pour entrer en contact avec les consommateurs et s'avèrent essentiels pour capter l'attention très volatile des jeunes générations natives du numérique, qui ont totalement délaissé l'usage de l'e-mail », indique Patrick Van Den Bloeme. La solution FanObserver, proposée par Harris Interactive, est une piste à explorer pour mesurer ce qui touche vraiment les utilisateurs de ces espaces communautaires. D'autres acteurs de l'étude en ligne misent énormément sur le phénomène communautaire, à l'image de CRM Metrix, dont le directeur général, Guillaume Weill, juge « encore sous-exploité le potentiel du phénomène communautaire. Pourtant, on peut, via les réseaux sociaux, toucher les consommateurs là où ils se trouvent et ils apprécient de prendre la parole ». Mais sur Facebook, par exemple, on s'adresse à une population très spécifique, qui ne correspond pas nécessairement à toutes les cibles...

José Roda

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