E-marketing.fr Le site des professionnels du marketing

Recherche
Magazine Marketing

Esprit critique et politiquement correct

Publié par le

Ces derniers temps nous ont offert une tempête dans un verre d'eau autour des "nouveaux réactionnaires". Un livre* a suffi pour déclencher les sirènes d'une "bien pensance" se réclamant de la modernité. L'esprit critique et la pensée négative, indispensables au débat démocratique mais ennemis du politiquement correct, n'auraient-ils plus droit de cité ? Yolanta Bak, conseil en gestion de marques, Anne-Marie Sargueil, présidente de l'Institut Français du Design, et Xavier Deleu, auteur du "Consensus pornographique" nous éclairent. * "Le Rappel à l'ordre. Enquête sur les nouveaux réactionnaires", de Daniel Lindenberg. Editions du Seuil Conseil en gestion de marques, Yolanta Bak est un esprit singulier qui ne prône pas le consensus et les idées reçues. Elle attaque vertement le politiquement correct. Les entreprises ne sauraient s'en plaindre pour mieux "réagir".

Je m'abonne
  • Imprimer

Que vous inspire ce débat sur les nouveaux réactionnaires ?


Je trouve qu'il est urgent de remettre la réalité au goût du jour, si j'ose dire. Ce débat raconte surtout cette crise profonde que traverse la société française qui devient antidémocratique. Le politiquement correct est devenu la norme. Ce n'est pas la démocratie qui demande d'être adulte et de regarder les choses en face. Ce politiquement correct est pernicieux voire pervers. Sous des apparences de bienfaisance généralisée, de bonheur permanent, il s'agit plutôt d'une liberté mal digérée liée à une vulgarisation tardive et erronée d'interprétations superficielles des idées des années 70, sans pensée complexe et sans remise en cause. Le politiquement correct est devenu un système d'oppression qui permet d'éviter de se confronter à la réalité.

Par exemple ?


Regardez le problème des retraites et des 35 heures. Il n'a pas été réfléchi à la réalité démographique et à l'augmentation considérable de l'espérance de vie. Que va-t-on proposer comme mode de vie aux gens ? Des années d'oisiveté sous antidépresseurs ?

Quelle est votre vision de la France contemporaine ?


Nous vivons une époque de forte transition où l'on masque les vraies questions. La liberté sexuelle est confondue avec la pornographie. A force d'accumuler de profondes contradictions, nous risquons d'arriver à une forme de conflits extrêmes. Il serait temps que nous nous préoccupions des signaux qui nous sont envoyés. Nous célébrons le culte du bonheur et du bien-être alors que nous sommes le pays qui consomme le plus d'antidépresseurs et de somnifères. Les individus vivent dans le refoulement, la frustration, sans projet de société qui les enthousiasme. Les grandes entreprises ne font plus rêver. La politique et la religion ne sont plus porteuses d'espoir.

La mondialisation est-elle responsable de la "médiocrisation" culturelle ?


Je pense surtout au ratage de l'Europe. Il faudrait définir le rôle de la culture européenne dans l'économie mondiale. Comme nous sommes condamnés à faire de la valeur ajoutée, devenons de grands exportateurs de culture plutôt que d'essayer de reconduire à l'identique des formes du passé.

Nous traversons donc une période réactionnaire ?


Je ne crois pas que nous assistions à un mouvement d'idées qui s'oppose au progrès social. Nous nous attachons à des micro détails, à des micro débats où la censure est depuis longtemps intériorisée en chacun. Même si ça va mal, il faut dire que tout va bien quand même. Nous baignons dans un faux bien-être, car les contradictions font peur. Il faut se contenter d'exprimer une frustration névrotique de bon aloi, que l'on peut médiatiser sans risquer la remise en question. Comme une quête de l'oubli.

 
Je m'abonne

Stirésius

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles