Fournitures de bureau : la maîtrise du canal Internet
Dans l'univers très calfeutré des ténors de la fourniture de bureau B to B, Internet n'est pas considéré comme un vecteur de croissance exponentielle. Il est plutôt assimilé à un canal supplémentaire de gestion des relations avec les clients, voire à un outil de prospection. Pour d'autres, plus récemment apparus sur ce marché, il est le rouage unique d'un dispositif 100 % on line qui entend bien bousculer l'ordre établi.
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Dès 1996, Internet fait son apparition au sein des entreprises françaises
spécialisées dans la fourniture de bureau. A l'époque, déjà, il n'est pas
question d'y entrevoir les signes précurseurs d'une quelconque révolution, mais
plutôt l'opportunité d'exploiter un nouveau canal, de l'associer aux autres.
Chez les spécialistes dont la méthode de vente s'articule autour du catalogue,
l'appropriation du Web s'est faite sans traumatisme et sans éclats, pas à pas,
en pesant, toujours, le pour et le contre. Si, pour la plupart d'entre eux, la
récolte des investissements ne fait que commencer, la viabilité des projets web
est chose certaine. Mieux encore, le canal Internet est, pour certains, en
cours de déploiement à l'échelle européenne. Signe pour le moins probant de
l'intérêt du média, même s'il s'agit moins de capter de nouveaux clients, que
de fidéliser l'existant. Pour l'heure.
Guilbert Guilweb : de l'e-procurement au e-commerce
Guilweb, le site de vente à distance
du groupe Guilbert, n'est pas un novice. Descendant de Guiltexte, son aïeul sur
Minitel né dans les années 90, Guilweb date de 1998. Il s'adresse exclusivement
aux clients contractuels du groupe Guilbert qui y accèdent par un mot de passe.
Cette stratégie correspond en fait à une logique de vente qui s'apparente plus
à de l'e-procurement qu'à de l'e-commerce. « Le site a été édifié suivant une
réflexion de réponse aux besoins précis de nos clients, grands comptes de 500 à
50 000 employés », indique Patrick Lasfargues, directeur marketing de Guilbert.
Car la méthode de vente de Guilbert consiste à négocier, auprès de chaque
entreprise, un contrat fixant les prix d'achat. Ainsi, sur Guilweb, les clients
disposent d'un catalogue électronique personnalisé leur permettant de suivre
l'historique de leurs commandes, d'extrapoler des courbes d'évolution des
achats par produit, département ou utilisateur, de gérer les stocks, bref de
maîtriser point par point, la chaîne d'approvisionnement et les dépenses
associées. Guilbert n'envisage pas de remise en cause de son modèle commercial,
qui s'appuie sur un staff de cinq cents représentants terrain. « Il n'est pas
question de réduire nos équipes commerciales, mais de repenser leur méthode de
travail », indique Patrick Lasfargues. Une révision qui devrait permettre aux
commerciaux de renforcer leurs actions de prospection en ligne afin de réduire
la fréquence des visites auprès des clients. L'enjeu : accroître le référentiel
de chiffre d'affaires par la conquête de nouveaux clients. L'objectif : générer
25 % de chiffre d'affaires en ligne à l'horizon 2004. Pour y parvenir, Guilbert
mise avant tout sur le développement de l'offre commerciale en ligne, qui lui
permettra d'évangéliser l'usage d'Internet auprès des clients les plus
réfractaires. « La conception actuelle de notre site ne nous permet pas de
faire du recrutement en ligne car c'est avant tout un outil de fidélisation »,
indique le directeur marketing. En 1998 pourtant, la société comptait
s'attaquer au segment des PME par une offre en ligne dédiée. Projet auquel elle
a renoncé suite au rachat de JPG. Pour l'heure, la priorité est au déploiement
de la plate-forme Guilweb à l'échelle européenne afin de toujours satisfaire
les attentes des clients qui souhaitent disposer d'une offre unique dans chaque
pays d'implantation.
JPG : accompagner le client par tous les canaux
« Internet ne remplacera jamais notre premier outil de
vente , déclare Anne Goeres, responsable e-commerce de JPG, positionnée sur le
segment PME / PMI, et dont la méthode de vente repose essentiellement sur le
catalogue. JPG ne dépêche pas de commerciaux sur le terrain. Dans ce schéma,
seul le catalogue peut faire le poids pour véhiculer correctement notre image
au coeur des entreprises. » Néanmoins, la stratégie e-commerce est amorcée dès
1996, avec une première mouture de site comptant en tout et pour tout quatre
pages. « Nous pressentions qu'il y avait là un canal à exploiter, mais nous
l'avons déployé sans précipitation, suivant les attentes de nos clients »,
poursuit-elle. Aujourd'hui, devenu une brique indissociable de la politique
commerciale de JPG, le rôle d'Internet est d'enrichir et soutenir catalogue et
call center, et de faciliter la vie des clients qui l'adoptent. « La souplesse
et la réactivité du site nous permettent de développer de nouvelles opérations
que le catalogue ne peut supporter, mais c'est surtout en prospection qu'il
fait preuve d'une grande efficacité, estime Anne Goeres. Nous pouvons tester, à
moindre coût, toutes sortes d'actions de marketing direct. » JPG reste discret
sur les volumes de vente réalisés en ligne, mais affirme doubler chaque année
depuis 1999 son chiffre d'affaires sur Internet. Bien que les perspectives de
développement de l'e-commerce soient optimistes, JPG n'envisage pas de repenser
son modèle commercial. Encore moins de réaliser des économies d'échelle sur la
production du catalogue papier. Diffusé à trente millions d'exemplaires par an,
le premier support de vente du groupe engendre des dépenses considérables qui,
allégées, ajouteraient en compétitivité au niveau des tarifs. Pourtant, Anne
Goeres en est convaincue, « le prix n'est pas le plus important pour nos
clients. Ils demandent avant tout la qualité du service, le conseil et le
contact humain, et Internet ne peut, à lui seul remplir cet objectif. »
Welcome Office : séduire par le prix
Pure player surgi
depuis peu sur le secteur de la fourniture de bureau B to B, Welcome Office
brigue le marché des PME/PMI. A son actif : un modèle de distribution 100 %
Internet, douze employés, 15 000 m2 d'entreposage, et une solide flotte de
camions pour livrer les clients en 24 heures sur toute la France. Loin
d'impressionner les dinosaures du secteur, Welcome Office n'en reste pas moins
un challenger à surveiller. De près. La force de son modèle encore embryonnaire
mais proche de la rentabilité, repose sur un axe stratégique redoutable : les
prix. Inférieurs de 30 %, en moyenne, aux prix pratiqués par les acteurs les
mieux disants, ils risquent d'intéresser sérieusement les entreprises. Pour les
séduire, Welcome Office assure commercialiser la totalité de son catalogue à
des tarifs de 20 % inférieurs aux plus bas prix pratiqués par JPG et ce, pour
les mêmes marques. Didier Riahi, fondateur et président de la start-up ne fait
pas mystère de ses intentions : concurrencer JPG sur ses propres terres. « Le
catalogue papier est un vecteur archaïque destiné à disparaître d'ici quatre
ans sous le dictat d'Internet », prophétise le P-dg, convaincu que la
démocratisation de l'usage du média par les entreprises est une question de
temps et d'opportunité de l'offre en ligne. Et d'ajouter : « Les moyens
traditionnels disparaissent dès lors que le client trouve un réel intérêt dans
les nouveaux modèles de vente ». Si Welcome Office se présente aussi offensif
sur l'argument du prix, c'est, en partie, en raison des économies de structure
qu'il répercute sur son offre. « Si Guilbert devait en faire autant pour ses
clients, il verrait son chiffre d'affaires s'effondrer de 30 %. » Grâce à la
puissance de son partenaire, le groupe Majuscule, centrale d'achats en
fournitures de bureau (2 milliards de francs en 2000), WelcomeOffice bénéficie
de moyens équivalents à ceux des grands groupes de VPC (logistique de pointe,
surface d'entreposage...), tout en bénéficiant de coûts fonctionnels propres à
une TPE. Pour l'heure, Welcome Office déclare recruter en moyenne dix nouveaux
clients par jour pour un panier moyen de 199 euros, ce qui lui permet d'estimer
ses revenus pour l'année 2002 à hauteur de 4,5 millions d'euros.
le marché
3,6 milliards d'euros dont un quart en vente à distance. Principaux acteurs : JM Bruneau, Guilbert, JPG, Office Dépôt/Viking Direct. Total VAD B to B en France en 2001 : 3,6 milliards d'euros TTC, + 7,6 %/2000 (source Fevad).