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Devenir la marque de cosmétique la plus relationnelle

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Maison familiale et pionnière de la vente à distance, Yves Rocher est entré dans la cosmétique il y a plus de cinquante ans. Avec 7,5 millions de clientes, soit une femme sur trois, la marque joue à fond la carte de la proximité. Un nouveau programme relationnel en cours d'implantation devrait encore davantage les récompenser. Présentation avec la directrice CRM de la marque.

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Marketing Direct Institution provinciale devenue groupe international, Yves Rocher réalise 2 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Une success story à la française ?

Catherine Haegel : Avant toute chose, c'est la success story d'un homme qui, il y a cinquante ans, a eu la géniale idée de proposer en vente directe des produits cosmétiques à des femmes qui avaient accès à très peu d'offres. Yves Rocher a donc inventé le CRM sans le savoir. Il a commencé en passant des annonces de ses produits dans la presse et, de fil en aiguille, a monté des opérations de marketing direct par l'envoi de mailings à ses clientes leur souhaitant, par exemple, un bon anniversaire. Plus tard, il a ouvert des magasins pour rendre la marque plus visible. Nous comptons aujourd'hui 550 magasins en France et 1 600 dans le monde. Ces deux canaux de distribution ont chacun développé leurs propres techniques de marketing direct et les ont exportées avec beaucoup de succès. La marque Yves Rocher revendique un positionnement unique de distribution exclusive et directe. Nous sommes à la fois récoltant, fabricant et distributeur, ce qui, sur le plan du CRM, offre un avantage évident en termes de connaissance client. En cela, oui, c'est une success story.

La marque est très proche de ses consommatrices. Quelles valeurs véhiculez-vous dans votre stratégie marketing ?

En France, 7,5 millions de femmes ont acheté nos produits en 2007. Ainsi, une femme sur trois est cliente Yves Rocher et potentiellement bien plus, puisque beaucoup ont acheté en 2006 sans renouveler leur achat en 2007. Nous avons un socle relationnel qui s'articule autour de trois piliers : notre marque et la cosmétique végétale (nos engagements vis-à-vis de la planète et du développement durable), l'expérience produits (la satisfaction des clientes à les utiliser) et, enfin, le «Good value for money» (vendre au juste prix). Par ailleurs, il y a une vraie générosité de la marque qui s'exprime par de nombreuses promotions et des cadeaux récompensant les cumuls d'achats.

Votre expertise en matière de CRM n'est plus à démontrer. Quels sont vos principaux leviers d'acquisition ?

La marque Yves Rocher est distribuée à la fois en magasin (60 % du CA) et en VAD (40 %). Pour recruter une cliente en boutique, nous privilégions les bons emplacements, la densité du réseau et des vitrines attractives. Donc, nous menons rarement des opérations spécifiques pour attirer de nouvelles clientes dans notre réseau, mais nous privilégions plutôt le bouche à oreille et le trafic spontané. En revanche, en VAD il faut activer des techniques spécifiques. Cela passe par la presse et des offres promotionnelles régulières, de la location de listes auprès de partenaires VADistes, des opérations “toutes boîtes” de mailings non adressés deux fois par an à plusieurs millions d'exemplaires. Et puis, pour la partie on line, nous cherchons à recruter des cyberacheteuses via des partenariats, de l'affiliation, des achats de bannières, de la location d'adresses emails, etc.

Et la fidélisation ?

Nous relançons notre programme de fidélisation en magasin qui avait un peu vieilli. Il est plus innovant et répond davantage aux attentes des femmes. Elles pourront cumuler des points “pétales” à la fois sur les produits de beauté et sur les soins en institut. Les deux programmes qui existaient jusqu'à maintenant sont désormais réunis sur une même carte de fidélité originale avec, au dos, une ardoise magique à encre réinscriptible qui actualise les offres promotionnelles personnalisées à chaque passage en caisse. L'offre est activée par la cliente ce qui lui permet d'être informée d'un événement qui va se dérouler dans le magasin qu'elle fréquente. On pilotera cette personnalisation en croisant les données sur la cliente, ses historiques d'achat, son magasin le plus proche et les nouveautés produits susceptibles de l'intéresser pour créer à chaque fois un effet de surprise. Par ailleurs, en ce qui concerne les récompenses, la cliente aura le choix de repartir avec un produit en magasin sans limite de prix ou avec une réduction de 20 % sur un soin institut. Ce programme de fidélité intitulé “weloveyou” est déployé dans l'ensemble des magasins français. L'objectif est de convertir les 5,5 millions de détentrices de l'ancienne carte d'ici à la fin de l'année et les inciter à passer en magasin pour transférer les points déjà acquis sur la nouvelle.

Comment gérez-vous votre BDD (qualification, enrichissement, achat ou location de fichiers) ?

Une équipe est dédiée à la saisie des adresses de nos clientes et une autre de data miners vérifie que les fichiers sont propres, les données intègres et cherche à mieux saisir le comportement de nos clientes. En effet, face à un tel volume et une telle diversité de produits, il faut se méfier de ce que l'on appelle “la myopie”. Pour cela, nous réalisons des études spécifiques avec des statisticiens. On leur demande d'être prédictifs, notamment en analysant des scores d'appétence à des produits, à des familles de produits et à leurs associations, mais aussi les typologies de femmes (ce qui, par exemple, nous permet de faire évoluer le style de nos cadeaux). Ainsi, nous pouvons construire des offres sur la base d'associations intéressantes, comme des gammes de produits dépilatoires avec des autobronzants, donc plus packagées et moins libre service. Au-delà de délivrer la bonne offre au bon moment, nous souhaitons aller vers de l'ultrapersonnalisation, à la fois sur le print et sur le Web. Nous ambitionnons de devenir la marque de cosmétique la plus relationnelle.

Comment activez-vous votre base d'e-mailing ?

En 2007, nous avons envoyé 100 millions d'e-mails en France, en complément de notre catalogue produits baptisé «Le livre vert» et distribué une fois par an. Cela va s'accroître, car nos clientes sont mieux équipées en Internet qu'il y a deux ans et nous menons un travail de substitution du print par le Web, au moins sur les points de contact. Pour cela, nous devons récolter des adresses et communiquer davantage avec elles via les médias interactifs. Nous croyons réellement en ce nouveau moyen de contact, ainsi tous nos e-mails seront intégralement personnalisés en 2008 et nous souhaitons passer de l'envoi hebdomadaire, calé sur la mise à jour de notre site, à une multiplication des envois.

Disposez-vous d'un centre de relation client internalisé ?

Oui, il est en Bretagne dans le Morbihan. C'est une belle aventure que j'ai initiée de toutes pièces en 2000 et dont je suis très fière. Nous avons choisi le terrain et fait appel à un architecte qui a «pensé» les locaux pour les adapter à notre activité. Ils sont très ouverts et lumineux, ils se composent d'une salle de repos, d'une salle de formation, de postes ergonomiques dotés d'une bonne acoustique et d'un éclairage agréable. Nous avons créé un univers dans lequel nos conseillères s'épanouissent pour qu'elles puissent être les plus agréables possibles au téléphone avec nos clientes. C'est un vrai centre de relation client multimédia qui traite des appels entrants (pour moitié des prises de commande et des réclamations), sortants (commercial et relationnel), de l'email et du courrier. On gère trois millions de contacts par an avec un principeclé pour nos conseillères qui est de ne jamais remettre en cause la parole de la cliente. Une personne contrariée mais bien traitée est plus fidèle que celle qui n'a jamais eu de problème avec la marque... donc pas de moyen de la mettre à l'épreuve. Nous le savons.

Quelle est votre stratégie multicanal ?

En 2007, 500 000 clientes Yves Rocher ont acheté à la fois en VAD et en magasin, ce qui est peu comparé à nos quelque 7,5 millions de clientes. Le premier frein était lié à notre fonctionnement, organisé par canal de distribution et non par marché. Jusqu'alors, nous disposions de bases de données par canal, non mutualisées mais notre stratégie va changer. En effet, une étude du service data démontre que chez Yves Rocher, les clientes qui fréquentent plus d'un canal d'achat sont plus fidèles que les acheteuses «exclusives». Ainsi, nous misons sur le multicanal en 2008, y compris dans l'achat. Nous menons des travaux pour savoir, parmi nos clientes, quelles seraient celles qui auraient la meilleure appétence pour devenir multicanal. Ainsi, nos acheteuses magasins qui pourraient passer sur le Web ont moins de 35 ans, sont récentes dans la marque, habitent une petite commune et fréquentent un magasin en centre commercial. Nous les avons repérées dans le fichier et nous allons, par exemple, multiplier nos efforts vers cette cible plutôt que de nous adresser à des millions de clientes en même temps. La cliente VPCiste exclusive, susceptible de basculer sur le Net, a moins de 40 ans, habite une commune de plus de 40000 habitants et est acheteuse régulière en VPC. Autant de profils déterminés grâce à l'analyse des données qui va nous permettre d'informer au mieux les clientes les plus éligibles et de nous concentrer sur une communication plus efficace.

Votre plateforme de marque est très interactive. Vos clientes ont-elles franchi le cap facilement ?

Aujourd'hui, le Net représente le quart du CA réalisé en VAD. Notre premier site marchand a été lancé en 2000 et nous recensons aujourd'hui un million de visiteurs uniques par mois. Nous voulons passer à la vitesse supérieure, sans pour autant être excluants et culpabilisants envers nos clientes non équipées ou peu familiarisées avec Internet. Le panier d'achat moyen est équivalent à celui de la VPC, autour de 35 euros, environ deux fois par an (à comparer aux 206 euros annuels consacrés par les Françaises à la cosmétique). Les profils varient... certaines découvrent la Toile et réalisent leur premier achat sur le Web quand d'autres sont déjà clientes VPCistes. Dans ce cas, nous les attirons en leur permettant de télécharger leur bon de commande VPC en ligne, de suivre la livraison de leur colis. C'est une première étape de la migration du off vers le on.

Vous avez beaucoup exploité le rich média sur votre site. D'ailleurs Yvesrocher.fr a été élu meilleur site e-commerce Fevad en 2007...

En effet, sur le site, nos clientes peuvent faire des visites virtuelles de boutiques, découvrir les soins en institut, trouver le magasin le plus proche, accéder à des conseils beauté, des diagnostics, des programmes avec des vidéos pour apprendre à faire soi-même certains soins et découvrir des méthodes de maquillage. C'est une belle vitrine pour la marque.

@ (C) Marc Bertrand

Nous misons sur le multicanal en 2008.

POINTS-CLÉS

1959: naissance des laboratoires Yves Rocher.
1965: premier catalogue «Le livre vert de la beauté».
1969: premier magasin à Paris.
- 1 600 magasins dans 20 pays du monde.
- 2 milliards d'euros de CA dont :
- 60 % en magasin
- 40 % en VAD

 
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Marie-Juliette LEVIN

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