«DEVELOPPER LE SELF-SERVICE SUR LE WEB»
Après une réorganisation complète de son système de transport et de livraison, Chronopost oriente sa stratégie de conquête vers les e-marchands. Sa dernière actualité, détaillée par son directeur marketing et communication, est le lancement de l'offre «Chrono Relais» chez les buralistes. De quoi séduire le grand public, une cible jusqu'alors négligée par l'opérateur.
Je m'abonneMarketing Direct Comment se positionne Chronopost au sein du groupe La Poste?
Eric Sainte-Claire Deville Chronopost est la filiale express de La Poste qui a été créée en 1985, dans le cadre d'une première libéralisation du réseau express. La Poste française a voulu devenir un acteur de ce marché dans son pays. Une opération très réussie car La Poste, via sa filiale Chronopost, est leader, un cas unique dans le monde. En effet, dans tous les autres pays, les leaders sont plutôt des grands opérateurs internationaux. Ailleurs, la Poste allemande est leader parce qu'elle a racheté DHL, de mémo que la Poste hollandaise, qui a racheté TNT. En France, pour le grand public, Chronopost, c'est un produit de transport express que l'on achète en bureau de Poste. Pour les professionnels, c'est une entreprise privée, séparée de La Poste. Une société avant d'être un produit.
Vous êtes leader sur le marché du transport express de colis en B to B. Quels sont vos axes de développement et vos ambitions sur le marché du B to C (aujourd'hui seulement 1 million de colis par an, soit moins de 15% de vos livraisons)?
E.S.-C.D. Chronopost compte 45 000 entreprises clientes sous contrat qui représentent 80% de notre activité et 1 million de clients occasionnels. Ces derniers, dont 650 000 ménages (3% de notre activité) et des TPE, passent par les bureaux de Poste. Donc, l'essentiel de l'activité de l'entreprise découle de la vente directe de notre force de vente auprès des entreprises. En 2006, Chronopost s'est beaucoup transformée. Le marché du colis a évolué. Il s'est atomisé et devenait difficile à toucher avec une force de vente traditionnelle.
De plus, aujourd'hui, il y a d'une part une régression du courrier de l'express et, d'autre part, une forte croissance du B to B et du C to C. Le marché global du petit colis est en forte progression. Mais la livraison en B to C est un métier différent. Un particulier reçoit un colis tous les six mois à une adresse inconnue du chauffeur qui est alors obligé de sortir de son périmètre. C'est plus compliqué à gérer. Sur le B to C, nous voulons être incontournables sur l'e-commerce. Actuellement, le leader du secteur est, sans conteste, Coliposte. Mais nous réalisons déjà 240 000 colis par nuit, dont 15% en B to C. Notre objectif est d'atteindre 300 000 colis par nuit (à l'horizon 2010) et faire monter la part du B to C à 20%. Le site marchand qui propose Chronopost à ses clients les rassure, notamment pour les produits à forte valeur ajoutée. C'est un accélérateur de vente.
@ Marc Bertrand
PARCOURS
Eric Sainte-Claire Deville
1985: Institut européen des affaires.
1986-1987: responsable des études Sup'Entreprise.
1988-1989: Chargé d'affaires Chronopost.
1990-1991: Responsable du service clients Chronopost.
1992-2000: Responsable marketing Chronopost.
2001-2005: Responsable marketing stratégique Chronopost International System, puis Colis France.
Depuis 2006: Directeur marketing et communication Chronopost.
Le «point noir» reste cependant vos tarifs réputés trop élevés...
E.S.-C.D. Nos tarifs sont un point noir en C to C pour les clients occasionnels, mais pas en B to C.
En effet, organiser des collectes dans les 14 000 bureaux de Poste a un coût. C'est plus contraignant que de charger 4 000 colis par jour pour un seul client.
Notre cible prioritaire reste donc le B to C, peu concernée par les tarifs élevés dans la mesure où elle les négocie.
La cible C to C, les ménages, représente, elle, 3% du chiffre d'affaires de Chronopost. Certes, nous avons une belle marge de progression mais cela restera une activité plus faible. Nous renvoyons cette cible sur Chronopost.fr, notre site marchand sur lequel nous pratiquons une politique tarifaire différente.
Quels sont les points principaux du plan «Energie 2007»? Il vous a permis, en partie, de baisser vos tarifs...
E.S.-C.D. Le réseau de transport, d'agences et des tournées de livraison a été complètement modernisé. Cette nouvelle organisation permet un suivi en temps réel des colis (terminaux, postes de saisie mobiles) grâce au message automatique des suivis (e-mail, signature du destinataire...). Nous avons désormais un seul réseau de transport et de livraison. Nos chauffeurs font une tournée unique.
Dans ce cadre, nous avons révisé notre politique de prix pour le grand public (prix de vente au guichet).
Et ce plan Energie 2007 nous a permis d'augmenter notre trafic de 50% et de passer ainsi de 200 000 à 300 000 colis par nuit en 2006.
Le lancement de votre offre «Chrono Relais» vise-t-il à sensibiliser le grand public?
E.S.-C.D. C'est une offre qui permet de consolider notre position auprès des e-marchands et de démocratiser l'offre express. Il s'agit un nouveau réseau de 3 000 buralistes, volontaires. Ils seront ouverts le dimanche matin et en semaine avec des horaires allant de 7 h 30 à 19 h 30. Parmi les conditions imposées, il faut que 80% de la population soit à 15 minutes d'un point relais. C'est la meilleure offre alternative à la livraison classique à domicile. Nous souhaitions un réseau très homogène.
Plus homogène que celui des VPCistes traditionnels.
Rémunérés, les buralistes pourront obtenir potentiellement jusqu'à 3 000 euros par an de revenus complémentaires. Cdiscount est le premier e-marchand qui propose le point «Chrono Relais» à ses clients. L'offre est également disponible sur Chronopost.fr. Par ailleurs, dans les points Chrono Relais, nous allons organiser, d'ici quelques mois, un service d'échange de produits SAV, baptisé «Chrono Swap Relais». Nous visons là les opérateurs télécom, les FAI... L'autre nouveauté est «Chrono relais direct»: la possibilité pour les cyberacheteurs en C to C de livrer leurs produits directement en bureaux de tabac. Cette offre permet de préparer soi-même son colis sur Chronopost.fr et de se mettre d'accord sur un lieu.
Dès que le produit arrive chez le buraliste, un e-mail en informe le destinataire. Il dispose alors de huit jours pour aller chercher son paquet. Cette offre peut, par exemple, aider à la vente d'objets fragiles, du fait de l'absence de transport. A l'horizon 2008, Chronopost prévoit de livrer 20 000 colis par jour, soit près de 8% de son trafic.
«Chrono Relais nous permet de consolider notre position auprès des e-marchands.»
Quels web services proposez-vous aux cybermarchands?
E.S.-C.D. Concernant l'offre «Chrono Relais», nous leur proposons deux modules. Le premier permet de récupérer les adresses des points relais à partir d'un code postal. Le deuxième, le système tout intégré, recense quotidiennement les points ouverts (en tenant compte des congés des buralistes). Plus les e-marchands sont gros, plus ils vont vouloir de l'intégré. Nous avons également des web services proposant le suivi des colis et nous travaillons sur un service de vérification et de correction pour pouvoir le plus en amont possible vérifier la validité de l'adresse. Nous avons encore beaucoup d'adresses incomplètes.
Vous avez lancé un site marchand en septembre dernier. Allez-vous en faire un canal de vente à part entière? Quels sont vos objectifs commerciaux pour 2007?
E.S.-C.D. Chronopost.fr était jusqu'à présent un site de suivi des colis et d'information générale. Nous l'avons reconfiguré et souhaitons en faire un canal de vente à part entière. Aujourd'hui, nous avons trois canaux de vente: les guichets, le Web et les forces de vente en face-à-face. L'objectif étant que l'activité Internet passe devant la vente aux guichets. A l'horizon 2010, sur 300 000 colis, 10 000 seront vendus aux guichets, 40 000 sur le Web et le reste par la force de vente.
Grâce à Internet, nous voulons aider nos clients à devenir plus indépendants. Sur ce canal, nous offrons donc plus de services qu'aux guichets et une politique tarifaire plus compétitive.
Vous allez inaugurer, en 2008, la plus importante plateforme de Chronopost, traitant jusqu'à 25 000 colis par heure. Est-ce l'aboutissement d'une nouvelle organisation?
E.S.-C.D. Cette plateforme sera le plus grand «hub» express de France. Nous allons investir 50 millions d'euros sur deux ans, dont 20% pour l'automatisation.
Elle sera inaugurée en 2008. En période de pointe, 30 000 colis y seront triés par heure. Dans l'organisation Chronopost, des chauffeurs enlèvent les colis et les orientent dans les agences qui les renvoient vers leur destination finale.
Ensuite, il y a deux modes de transport: direct, qui renvoie d'une agence à une autre, ou massifié, via une plateforme de tri qui reçoit des colis en provenance de toutes les agences. Des camions livrent ensuite vers toute la France. Dans le nouveau réseau, nous allons ouvrir cinq hubs cette année.
@ Marc Bertrand
CHIFFRES-CLES
- Filiale à 100% de GeoPost (groupe La Poste).
- CA 2005: 615 millions d'euros.
- 650 000 clients parmi les ménages, soit 3% du portefeuille.
- Un réseau de 45 agences.
- 54 millions d'objets transportés par an.
- 3 000 buralistes volontaires pour l'offre «Chrono Relais».
- Dernier investissement: 50 millions d'euros (dont 20% pour l'automatisation) investis en 2006/2007 pour la mise en place du plus gros «hub» de France.
Vous citez l'agence de Reims en exemple. En quoi est-elle si novatrice?
E.S.-C.D. C'est une agence laboratoire qui a été la première à tester la tournée unique. Un système généralisé à l'ensemble du réseau depuis le 3 janvier. Nous avons cassé notre système de livraison. Nous disposions auparavant d'un réseau de transport pour les colis du matin (avion) et pour les colis de la journée (routier). Cela engendrait un coût plus élevé mais une excellente qualité de service, notamment le matin. Compte tenu de la compétition économique, nous avons considéré que le coût de ces avantages n'était plus en adéquation avec l'évolution du marché.
Par ailleurs, une contrainte supplémentaire nous oblige à limiter la vitesse de la plupart de nos véhicules à 90 km/h, contre 110 km/h. Ce qui rajoute, en moyenne, deux heures sur le temps de transport.
Il nous fallait donc optimiser notre système.
Désormais, nous organisons une seule tournée dans la journée. Tout en présentant l'offre la plus performante du marché.
Quels types de services innovants allez-vous développer en 2007 pour vos clients?
E.S.-C.D. 2007 sera synonyme de stabilisation, après une année d'innovation. Elle permettra notamment le déploiement de l'offre Chrono Relais.