Vêtimarché se retrousse les manches
Pas facile de réussir sur le marché du textile. Surtout pour un généraliste de l'alimentaire, plutôt typé supermarché, qui de surcroît ne passe pas pour toujours faire dans la dentelle. Pourtant, avec Vêtimarché, les Mousquetaires semblent avoir trouvé la formule magique.
Il n'y a pas grand-chose pour faire peur à Intermarché. Historiquement
alimentaire, le groupement des Mousquetaires n'a jamais hésité à tenter
l'aventure au-delà de ses bases, que ce soit pour se transformer en spécialiste
du bricolage (Bricomarché), en défenseur de la ruralité (Relais des
Mousquetaires), en discounter plus hard que nature (Netto), en industriel
productif (avec un empire digne d'un grand groupe agroalimentaire) ou en géant
européen de la distribution (acquisition de Spar en Allemagne, quelle que soit
par ailleurs la pertinence de l'opération). Mais il est des challenges plus
difficiles que d'autres. Ainsi, le textile. Développer des rayons textiles dans
un supermarché est une chose. Créer une enseigne en bonne et due forme en est
une autre. Et pendant longtemps, à trop vouloir reproduire les schémas propres
à l'alimentaire, les Mousquetaires s'y sont cassé les dents. Pourtant, à partir
du milieu des années 90, ils ont su opérer une révolution culturelle et sont
devenus de véritables professionnels du textile. Avec à la clé un concept 2000
très séduisant. Sur le marché du textile, Vêtimarché est aujourd'hui la
troisième enseigne de GSS en France.
Dans la plus pure tradition des Mousquetaires
Vêtimarché est une vraie enseigne des
Mousquetaires, en ce sens qu'elle applique à la lettre les règles communes aux
différentes enseignes du groupe. Vêtimarché est une enseigne d'indépendants
avec, à sa tête, un conseil d'administration, composé d'une petite dizaine
d'adhérents, conseil au sein duquel émerge un président. Inutile de chercher un
Vêtimarché loin d'un "Marché des Mousque-taires", c'est-à-dire d'un
regroupement de plusieurs enseignes du groupe. Rappelons qu'au "tout sous le
même toit" des hypermarchés, les Mousquetaires ont répondu par un "tout sur le
même site" en regroupant des enseignes spécialisées. Un concept plutôt
intelligent au vu de ce qui se passe dans les autres pays et au vu du problème
de positionnement que connaît actuellement l'hypermarché. Autre règle stricte :
une enseigne, un homme. A savoir qu'un adhérent, s'il peut avoir plusieurs
magasins Vêtimarché, ne peut en aucun cas être le propriétaire d'un magasin
portant une autre enseigne du groupement. A noter que cette stricte séparation
des enseignes connaît une entorse au niveau directorial puisque désormais, le
président de Vêtimarché aura également en charge la partie tex-tile des
Intermarché. Enfin, Vêtimarché applique le système du tiers-temps,
en vertu duquel
chaque adhérent doit consacrer deux jours par semaine au groupement et à
l'enseigne de façon bénévole. Une organisation qui permet à Vêtimarché et à ses
presque 150 magasins de fonctionner avec des structures centralisées très
légères.
L'offre et le concept
Les grandes surfaces
spécialisées "pèsent" 22 à 23 % du textile en France. Trois enseignes dominent
le secteur : Kiabi (un plus de 3 % du marché national), La Halle aux Vêtements
et Vêtimarché (1 % du marché national pour cette dernière). Avec une surface de
vente "normalisée" à 990 m2, les magasins Vêtimarché sont quasiment deux fois
plus petits que ceux de ses principaux concurrents. Rien d'étonnant, car
l'enseigne est plutôt implantée dans les villes de moins de 50 000 habitants
quant un Kiabi vise celles de plus de 100 000. En matière d'univers (hommes,
femmes, enfants) com-me en matière de credo (le rapport qualité prix),
Vêtimarché ne déroge pas aux règles du genre. En revanche, l'enseigne se
caractérise par son assortiment un peu différent. Les marques propres restent
naturellement au coeur de l'offre. Chaque univers en propose plusieurs. Ainsi,
pour la femme, Vêtimarché s'appuie sur Incandescence (jeunes filles), sur Café
Théâtre (20 - 40 ans), sur Claire DeLandes (plus de 40 ans) et sur la marque de
lingerie Grain de Thé. Côté hommes cette fois, Vêtimarché a lancé en 2002 la
marque "casual wear" Openfield, tant pour les hommes de 30 à 45 ans que pour
les garçons de 10 à 16 ans. Mais, alors qu'elles représentent la quasi-totalité
de l'offre chez les concurrents, les marques propres ne pèsent "que" 70 % chez
Vêtimarché. Leurs homologues nationales restent très présentes, principalement
dans deux rayons : la lingerie et le sportswear/jeans. Dans le textile, l'écrin
est encore plus important qu'ailleurs. Cette offre vit désormais dans un
nouveau concept rayon performant. Celui-ci se rapproche davantage de ce que
l'on trouve dans les chaînes spécialisées, avec un parquet en bois et une
ambiance plus chaleureuse. L'offre, près de 10 000 références, se veut plus
lisible, les allées sont plus larges, les salons d'essayage plus confortables,
un espace attente et un coin enfants permettent de prendre le temps de
choisir... sans tomber dans un luxe ostentatoire qui serait en décalage avec
les attentes de la clientèle que drainent les Marchés des Mousquetaires. Lancé
en 2000, ce concept a été développé au pas de charge. Fin 2002, 112 points de
vente l'avaient adopté, soit 78 % du parc.
Installer la marque nationalement
La notoriété n'est pas franchement le point fort de
Vêtimarché. Combler cette lacune est un travail de longue haleine que
l'enseigne a entrepris il y a deux ans grâce à une campagne nationale de
communication. Coeur de cible de Vêtimarché, la marque Café Théâtre est
particulièrement concernée. Si les scores de notoriété restent faibles,
l'enseigne a deux raisons d'espérer. D'une part, en deux ans, Vêtimarché a
gagné 5 points de notoriété spontanée. D'autre part, au plan local,
c'est-à-dire là où l'enseigne est présente, les taux de notoriété sont
excellents. Au plus près du terrain, Vêtimarché met en place un dispositif
destiné à générer du trafic (distribution de prospectus) et à fidéliser les
clients. Lancé en mai 2001
et basé sur une carte, le programme de fidélité fédère 128 points de vente. On
compte pour l'heure 250 000 porteurs. « Ce programme a permis aux points de
vente d'augmenter non seulement la fréquence de visite des clients, mais aussi,
d'accroître de 31 % le panier moyen des transactions et d'afficher une
progression de 106 % du panier moyen des transactions avec privilèges », notent
les responsables de l'enseigne. Les taux de retour sur les mailings initiés à
partir du fichier des porteurs sont par ailleurs très bons : de 14 % en 2001,
ils sont passés à 45 % en 2002 pour les mailings adressés aux clients lors de
leur anniversaire. Ainsi, Vêtimarché s'est lancé dans une stratégie de
fidélisation élaborée, qui reste toutefois en phase de réglage. L'analyse et la
comparaison des transactions permettront, suite au programme publi-promotionnel
2003, de peaufiner la typologie clients, et donc, d'élaborer des offres
adaptées à chaque profil.
Les perspectives
Les
chiffres le démontrent sans équivoque : avec 18 ouvertures en 2002 et 27
prévues en 2003, Vêtimarché a passé la vitesse supérieure. Au vu des ambitions
de l'enseigne, il semble que l'on en soit pourtant qu'au hors-d'oeuvre. A
court/moyen terme, c'est la barre des 200 unités qui est visée. « Le seuil pour
être un intervenant significatif et exister vraiment sur le marché »,
estime-t-on chez Vêtimarché. Ce chiffre devrait être atteint en 2004, toujours
selon les responsables de l'enseigne. Mais c'est en fait le double
qu'ambitionne Vêtimarché, soit 400 unités. Non de façon virtuelle, comme un
vague objectif à long terme, mais de façon concrète, avec des sites déjà
définis et des projets lancés tous azimuts. « Toute notre politique de
développement sera axée sur cet objectif », précise-t-on chez Vêtimarché.
L'avenir passe aussi par une évolution des modules point de vente. Implantée
dans les villes de moins de 50 000 habitants, l'enseigne laisse pour l'instant
le champ libre à ses concurrents sur les villes plus importantes. Vêtimarché
réfléchit donc à des modules mieux adaptés à ces zones de chalandises, avec un
concept de boutique plus vaste, de l'ordre de 1 800 m2. L'avenir passe enfin
par l'international. Vêtimarché vient d'annoncer le lancement de l'enseigne au
Portugal. Un pays où il y existe déjà 14 Marchés des Mousquetaires. Le premier
point de vente sera inauguré au mois d'octobre et 9 ouvertures sont programmées
en 2004. Le potentiel est évalué à 70 points de vente, à atteindre dans les six
à sept ans qui viennent.
HISTORIQUE
Vêtimarché naît en
1986, plus de quinze ans après Intermarché et quatre ans après Bricomarché. Les
débuts sont difficiles, par manque de structuration, de spécialisation, et pour
tout dire, de professionnalisme. Au milieu des années 90, la mentalité change,
et avec elle, la stratégie. Les responsables de l'enseigne comprennent que le
textile est un métier à part entière et que rien ne sera possible sans une
profonde restructuration en amont. 1999/2000 : le travail en profondeur de
Vêtimarché trouve sa traduction dans un concept magasin performant. L'enseigne
connaît enfin un développement à la hauteur des ambitions du groupe.
DIRECTION
Président : Philippe Delfaux (adhérent
Vêtimarché Sables-d'Olonne).
CHIFFRES CLÉS
PARC DE MAGASINS : ÉVOLUTION SUR QUATRE ANS