Valeurs éthiques. Valeurs porteuses ?
En 2003, Research International France met en place L'observatoire des valeurs éthiques des entreprises. Trois ans après, quelle place occupe le développement durable et quel classement font les Français des entreprises du CAC 40 ?
Il y a trois ans, la notion de développement durable était confuse et l'intitulé était souvent inconnu du grand public et réservé aux seuls experts. Aujourd'hui, l'essentiel des grands groupes a mis en place une direction du développement durable et communiquent à l'attention du grand public sur leurs efforts en termes de respect des valeurs éthiques, de protection de l'environnement, etc. Comment les Français ont-ils abordé ce nouveau courant ? Jusqu'où sont-ils prêts à faire des efforts pour valoriser les entreprises qui adoptent un comportement éthique ? Quelles entreprises profitent aujourd'hui de ce “nouveau” courant ? Autant de questions sur lesquelles Research International France a souhaité se pencher au travers de L'observatoire des valeurs éthiques des entreprises (L'OVE).
Des opportunités croissantes pour les entreprises
Premier enseignement : le travail
des enfants, la santé et la sécurité des clients et la pollution de
l'environnement constituent toujours les trois univers incontournables où les
entreprises se doivent d'avoir un comportement exemplaire. Tout manquement
pourrait entraîner un risque fort pour l'entreprise (boycott), a contrario tout
respect peut permettre à celle-ci de gagner des consommateurs.
Second
enseignement : les opportunités supplantent aujourd'hui les risques. Alors
qu'en 2003, la proportion des Français qui mettaient en avant les risques pour
les entreprises (érosion de leur portefeuille clients) était bien supérieure à
celle qui leur reconnaissait des opportunités (potentialité à faire payer plus
cher leurs produits ou services), on observe aujourd'hui un renversement de
cette tendance. Est-ce que les nombreuses communications déployées par les
entreprises ont su convaincre que les efforts devaient être récompensés ?
Est-ce que les consommateurs acceptent plus facilement de payer un peu plus
cher des produits ou services proposés par des entreprises éthiques ? L'essor
du commerce équitable au cours de ces dernières années est indéniable. Il s'est
fait connaître du grand public et a conquis les linéaires. Au vu de l'analyse
des résultats 2006, il semble bien que, sur ce point, les mentalités et les
comportements ont évolué.
Troisième enseignement : les Français demeurent très
sensibles à l'actualité sociale. On a pu observer en 2003 une forte sensibilité
aux délocalisations qui apparaissaient alors dans L'observatoire à la fois
comme un risque majeur pour les entreprises et une opportunité pour celles qui
maintenaient leur production en France. En mai 2006, dans une actualité marquée
par les débats à l'Assemblée sur l'adoption de nouveaux contrats de travail, on
note une montée de l'importance des dimensions liées aux conditions de travail
(“l'égalité professionnelle hommes/femmes”, “des conditions de travail
satisfaisantes pour tous” : aujourd'hui respectivement en cinquième et septième
position des opportunités). A contrario, on assiste à une baisse des dimensions
liées aux délocalisations moins présentes dans l'actualité (le risque attaché
aux délocalisations recule de quatre places alors que, parallèlement,
l'opportunité de ne pas délocaliser recule de cinq places). Au-delà de
l'analyse des perceptions globales des Français en matière d'éthique, L'OVE
opère un classement de plus de 70 entreprises, parmi lesquelles figurent celles
du CAC 40 (voir les top 10 sur chacune des six dimensions de l'éthique
évaluée).
Renault prend la pole position
L'entreprise
qui, selon les Français, arrive en tête des entreprises du CAC 40, en termes de
respect des valeurs éthiques, est Renault, ce qui constitue une confirmation de
la cote d'amour des Français à l'égard de l'entreprise plus que centenaire. Le
constructeur automobile français se plaçait en cinquième position des
entreprises du CAC 40 en 2003, derrière Peugeot-Citroën, Michelin, Danone et
Thomson. Trois de ces quatre entreprises demeurent dans le top 5, seule Thomson
accuse un léger retrait de la quatrième à la septième position. La belle
performance de Renault se traduit par des places gagnées sur la totalité des
dimensions testées.
Renault occupe la seconde place en matière d'éthique
commerciale (respect des clients) et d'éthique sociale (respect des employés)
soit respectivement cinq places et deux places de mieux qu'en 2003. Mieux
encore, Renault entre dans le top 10 en matière d'éthique environnementale
(seul constructeur automobile aux côtés d'entreprises de services - seul ST
Microelectronics, un des leaders du marché mondial des semi-conducteurs,
rejoint Renault au sein du top 10 de l'éthique environnementale). Enfin,
Renault se positionne aussi dans le Top 10 de l'éthique sociétale (respect des
régions où l'entreprise est implantée) pour y occuper d'emblée la troisième
place.
Une belle progression pour Veolia Environnement
Parmi les entreprises du CAC 40, apparaît une entreprise qui connaît en trois ans une belle progression en termes de perception éthique globale. En effet, en 2003, alors même que le nom “Vivendi Environnement” changeait en “Veolia Environnement”, l'entreprise n'était pas représentée auprès du top 10 des entreprises du CAC 40. Aujourd'hui, Veolia Environnement peut se targuer d'arriver dans les dix premières entreprises du CAC 40 sur la quasi-totalité des dimensions : éthique globale (sixième position), éthique environnementale (première), éthique commerciale (huitième) et éthique sociétale (neuvième).
Note morale par les dirigeants
Research
International France a complété cette année son évaluation des entreprises par
une nouvelle dimension : le respect des valeurs morales par les dirigeants.
Cette dimension constitue clairement un risque pour les entreprises
(“l'entreprise a des pratiques financières douteuses” : sixième risque sur
seize proposés, “le patron tire un profit personnel de sa position” : huitième
risque) mais pas une opportunité (“patron irréprochable” et “transparence
financière” se positionnent parmi les dernières opportunités testées). Autant
dire qu'au travers de l'éthique morale des dirigeants, nous touchons à une
exigence jugée comme le passage obligé pour tout groupe.
C'est le Crédit
Agricole, suivi de près par Renault, qui occupe la première place sur cette
nouvelle dimension. L'entreprise qui signe “une relation durable, ça change la
vie” (i.e. Le Crédit Agricole) occupe par ailleurs une position forte sur les
autres dimensions : première en éthique sociale soit huit places de mieux qu'en
2003, première en éthique sociétale soit sept places de mieux : une proximité
avec les Français qui se voit largement valorisée. Renault, qui a vu en 2005 le
départ de Louis Schweitzer, remplacé par l'emblématique Carlos Ghosn, prend
donc, dès cette première évaluation, une position clé en termes de valeurs
morales des dirigeants. Le dirigeant amorce ici un parcours à suivre dans les
années à venir…