Unilever Bestfoods France sur les traces de Mondrian
Pour ses premiers pas dans le mécénat d'art, la filiale française du géant anglo-néerlandais de l'alimentaire a suivi les traces de Mondrian. Elle a choisi d'apporter son soutien à l'exposition du Musée d'Orsay, retraçant l'oeuvre du peintre de 1898 à 1914, et esquisse ainsi une communication institutionnelle naissante.
Même origine hollandaise. Même quête de modernité et de simplicité. Pour
Alain Justet, président d'Unilever Bestfoods France, « les chemins de la
croissance et de la modernité sont pour Unilever Bestfoods France comparables
aux chemins de l'abstraction pour Mondrian ». Un mariage de coeur qui a poussé
la filiale française à soutenir l'exposition organisée par la Réunion des
musées nationaux, le musée d'Orsay et le Kimbell Art Museum de Fort Worth, en
collaboration avec le Gemeente-museum de La Haye, et qui rassemble 109 oeuvres
retraçant le parcours artistique de Mondrian, de l'art figuratif à
l'abstraction et de la Hollande à la France. Un mariage de raison aussi pour la
jeune filiale, née officiellement le 1er avril 2001 de la fusion
d'Amora-Maille, Astra-Fralib et Bestfoods France, et qui regroupe désormais
plus de 3 500 personnes et surtout trois cultures d'entreprise différentes.
Pour environ 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires net en 2001. « A un
moment important de la vie de notre entreprise, nous avons souhaité associer
notre nom à celui d'un artiste qui compte parmi les plus grand pionniers de
l'Art du XXe siècle, commente Alain Justet. Dans le secteur qui est le nôtre,
nous cherchons à faire évoluer le monde de l'industrie alimentaire, en
conservant intacte cette passion du goût que nous puisons au coeur de nos
racines pour apporter au consommateur, à force de créativité et de maîtrise
technologique, le plaisir de manger bien en toute simplicité et en confiance. »
Fédérer les cultures internes
Loin des mécénats
sportifs qui véhiculent l'image institutionnelle d'un groupe auprès du grand
public, ce premier mécénat culturel a plutôt les allures d'une communication
interne élargie au premier cercle de ses clients. « Nous avons jugé important
de pouvoir apporter à ces trois entités aux cultures différentes un événement
fédérateur qui puisse leur insuffler un sentiment de fierté et d'appartenance
», explique Sophie Jaillet, directrice de la communication. L'événement a été
largement relayé par le tout nouveau magazine interne La Marmite. Et une grande
soirée est organisée le 18 juin pour l'ensemble du personnel. Jusqu'à présent,
la filiale française d'Unilever a plutôt privilégié des projets communautaires
surtout liés à ses métiers et principalement en relation avec la santé publique
et pour lesquels elle a investi 4 millions de francs en 2000. Ses seules
initiatives dans le domaine de l'art ont été le soutien à une publication sur
l'expédition de l'explorateur batave Willem Barentsz et une participation à la
restauration de dessins de l'école de Rembrandt. Une collabo-ration aux
couleurs très anglo- néerlandaises. En soutenant l'exposition Mondrian, la
filiale française, au passage toujours aux couleurs néerlandaises, s'inscrit
désormais dans la politique de mécénat culturel que mène le groupe Unilever au
niveau mondial. Ce dernier est, entre autres, un des mécènes du Guggenheim à
Bilbao et du MOMA à New York. Et il s'est engagé de 2000 à 2004, à hauteur de
1,25 million de livres auprès de la Tate Modern à Londres pour commissionner
chaque année une oeuvre monumentale destinée au Turbine Hall dans le cadre du
concept "The Unilever Series". La première série fut réalisée par Louise
Bourgeois en 2000, avec une spectaculaire installation de trois tours d'acier
et de la plus gigantesque araignée jamais créée par elle. La seconde est celle
de Juan Munoz, reconnu pour ses installations sculpturales qui mettent en scène
des person- nages à l'échelle humaine dans un décor architectural élaboré ou
complexe. Mais, alors que l'initiative française se veut plus modeste et
n'affiche pas le budget investi dans l'opération, elle pose déjà la question de
la suite que donnera le fabricant à ce type de mécénat et en filigrane la
question de sa communication institutionnelle. Car si Unilever Bestfoods suit
les traces de Mondrian, elle n'a pas encore suivi celles de ses concurrents
Danone et Nestlé sur la voie de la notoriété institutionnelle auprès du grand
public. Et reste un mécène très discret.