Street marketing, des opérat ions qui courent les rues
Qu'on l'appelle street marketing ou marketing de proximité, il a le vent en poupe. Tant pour lancer un nouveau produit que pour élargir ou conquérir une cible de consommateurs. A doser toutefois pour ne pas lasser.
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Sortir d'un concert et se voir remettre des Chipsters de Lu ou des patchs
Nivea, calmer le petit dernier dans un restauroute avec des jumelles en forme
de ballon de football estampillées Danone ou tester la dernière variante à la
cannelle du chewing-gum Stimorol dans un restaurant des Halle..., les exemples
de ce type sont légion. Toucher le consommateur directement dans son quotidien
pour l'informer sur une marque ou un produit fait plus que jamais partie des
recommandations marketing des services du même nom. Certains l'appellent
"street marketing", d'autres comme Alban Maitrot, responsable des opérations
transversales chez Nivea, préfèrent la version soft de "marketing de
proximité". Chez Chupa Chups, Brigitte Ter Berg, chef de produit en charge des
opérations spéciales, en donne une vision plus combative en n'hésitant pas à
parler de "guérilla marketing". Une guérilla qui amène la marque a
échantillonné sa célèbre sucette ronde au rythme de 40 000 unités par mois dans
tous les événements de mode, cinéma, musique, sport extrême, VIP comme grand
public pour élargir sa cible. Le street marketing est, de fait, depuis
longtemps pensé comme un bon outil d'éducation des foules. C'est surtout vrai
pour les marques liées à l'univers de la santé et de l'hygiène, comme Signal
par exemple, dont le camion sillonne les rues en prêchant la bonne parole sur
l'hygiène dentaire. Ou encore le duo Always-Tampax de Procter, Nana de Sca
Mölnlycke ou Vania de Fort James qui distribuent échantillons et leaflets
pédagogiques à la sortie des lycées pour informer les adolescentes des effets
de la puberté. Pour convaincre les jeunes de sortir couverts, Durex opte pour
les soirées étudiantes. « Nous disposons du listing des BDE des principales
écoles avec lesquelles nous réalisons quelque 250 opérations d'échantillonnage
de 300 000 produits chaque année, raconte Vincent Jeanniard, directeur du
marketing de l'entreprise. Cela nous permet de communiquer dans un
environnement propice à nos produits tout en sortant de notre image un peu trop
pharmaceutique. » Le street marketing est également de plus en plus choisi
comme outil de recrutement ou d'extension de cible par des marques qui n'y
avaient pas recours auparavant. Pyrex en est un bon exemple. La marque qui
souffre encore d'une image vieillotte vient de distribuer pour la première fois
300 000 livrets en centre-ville pour battre cette image en brèche. « Nous
voulons surtout toucher les 20-35 ans qui s'équipent ou vont s'équiper en leur
expliquant la praticité du Pyrex », explique Valérie Isabel, chef de produit.
Rajeunir sa cible est également la volonté de Procter dont la Pringle'smania
gagne les boîtes de nuit parisiennes avant d'échantillonner les nuits
provinciales au second semestre. Pour traquer les 15-25 ans là où ils se
trouvent, Axe Voodoo, la nouvelle référence de parfums masculins
d'Elida-Fabergé, monte un programme dont le point d'orgue sera la nuit Voodoo
du 16 juin prochain dédiée à la techno. Avant ce rendez-vous, ces jeunes hommes
auront été inondés de parfum sous forme de flyers, cartes postales, boîtes
d'allumettes distribués dans les boîtes de nuit, bars, lycées, universités et
lors de la tournée de la Nuit des Publivores.
Quand les marques font leur ciném...
Mais cet outil marketing est de plus en plus
utilisé à l'occasion de lancements et ce, dans des lieux plutôt nouveaux. Une
des dernières tendances en date consiste à traquer les lecteurs de journaux et
magazines en leur remettant la presse dans un sac, aux couleurs d'un produit,
dans lequel figurent un échantillon et une information sur ledit produit.
Elida-Fabergé a, par exemple, opté dernièrement pour ce moyen comme soutien de
la douche Dove Body Wash et du shampooing Color Activ' d'Organics. « Cela
permet un ciblage plus précis que d'autres moyens dans le sens où l'on choisit
des magazines bien spécifiques, en l'occurrence des féminins dont les lectrices
sont plus que d'autres concernées par les soins du corps », analyse Isabelle
Castellain chef de groupe. Un plus qui a également convaincu les responsables
de l'activité hors foyer de Gervais. Partenaire historique du Festival de
Cannes, la marque du groupe Nestlé organise, avec les NMPP, une opération
baptisée "La presse fait son cinéma avec Gervais Extrême". Du 10 mai au 21 mai,
les 1 000 plus gros points de vente de presse hors les Relay distribueront aux
acheteurs de magazines de cinéma 500 000 sacs avec une face dédiée à Extrême et
l'autre à Maxibon, le gros lancement de cette année. 100 000 de ces sacs seront
plus spécifiquement distribués à Cannes. « Cette opération légitime encore un
peu plus le territoire de Gervais, partenaire du cinéma en France, et nous
donne une présence dans les rues de Cannes en plus de celle que nous avons dans
les endroits réservés aux professionnels », explique Alexandre Bouchy, Monsieur
Cinéma du groupe Nestlé. Ces marques sont loin d'être les seules à avoir pris
conscience du potentiel de trafic que représentent les 31 000 points de vente
de presse gérés par les NMPP. « Le fait d'échantillonner des produits ou des
brochures d'information dans les sacs donnés aux lecteurs de magazines est
effectivement une tendance qui se développe », confirme Jacques Gérard,
directeur de clientèle éditeur des NMPP. Une tendance qui a d'ailleurs amené
les Messageries à réfléchir à la mise en oeuvre d'une diversification autour
d'actions directement menées avec les annonceurs, et qui devrait voir le jour
dans les mois à venir. Autre lieu qui monte dans les actions de street
marketing, les salles de cinéma. « En organisant des opérations dans les halls
d'attente, les marques savent qu'elles peuvent s'adresser à des gens qui sont
en situation de détente, en couple ou entre amis et donc réceptifs », analyse
Servanne Fouyer, responsable de la cellule Médiavision Plus, structure ad hoc
créée l'an dernier pour gérer la promotion événementielle. Selon une étude
menée par la Cofremca pour Médiavision sur la motivation de ceux qui
fréquentent les multiplex, les halls sont perçus comme des lieux de vie où l'on
trouve restauration sur place, divertissements, voire cyber-cafés. Du kit de
connexion d'AOL à la distribution d'échantillons d'Obsession de Calvin Klein
pour la Saint Valentin 2000 en passant par un stand d'essai de chaussures
Reebook ou une dégustation de soupes chinoises Maggi, les opérations de tests,
lancements de produits et création d'événement se succèdent à bon train dans
les multiplex et grandes salles de cinéma.
A l'approche des grandes vacances,
les marques sont dans les starting-blocks Une
des dernières en date était organisée par Saupiquet à l'occasion du 1er avril.
90 000 échantillons de rillettes de poisson et des leaflets en forme de poisson
d'avril ont été distribués dans une quinzaine de multiplex. Le même jour, la
marque distribuait également 30 000 boîtes aux voyageurs de la Gare
Saint-Lazare. « Les opérations de street marketing que nous organisons dans les
gares sont à la fois en nombre croissant et de plus en plus lourdes, déclare
Isabelle Courthieu, responsable des opérations spéciales de France Rail. On
joue sur l'effet de masse pour l'annonceur - 520 millions de voyageurs par an
sur le seul réseau Ile-de-France - et sur l'effet de surprise pour le voyageur.
» Le rythme est là encore soutenu, plusieurs petites opérations par semaine,
et, chaque mois, une ou deux poids lourd portant sur un minimum de 250 000
produits, leaflets. Ces dernières impliquent généralement les six gares
parisiennes et les 15 plus grosses gares de régions. « Nous travaillons de plus
en plus avec les secteurs de l'alimentation et des parfums », précise Isabelle
Courthieu. Les marques de produits technologiques ou touristiques choisissent
également de communiquer à l'intérieur même des trains via la remise à la place
d'un échantillon ou un document. L'arrivée des vacances devrait encore
accélérer la cadence. France Rail s'y prépare avec le Top Soleil, un outil
testé l'an dernier par Flodor et Procter lors des grands départs en vacances,
et qui englobe les gares des plages. Côté cinéma, Médiavision lance "le produit
vacances" qui permet de cibler les petites salles des stations balnéaires. Les
marques sont également dans les starting-blocks pour communiquer en direct
auprès des vacanciers. Gervais va les chercher dans les campings en leur
distribuant des kits de jeux. Les spécialistes du solaire et du soin accostent
sur les plages. Nivea fera, par exemple, voler sa montgolfière en forme de
déo-bille deux mois, contre trois semaines l'an dernier, et échantillonnera une
dizaine de produits différents « pour montrer que Nivea, c'est 500 références
sous des marques différentes », explique Alban Maitrot. Les adeptes du street
marketing s'accordent globalement pour dire être plutôt bien reçus, surtout
s'il y a échantillonnage de produit. Mais encore faut-il savoir doser pour
éviter tout phénomène de rejet.