Sécurité alimentaire : malaise dans les assiettes
Pour ceux qui en doutaient encore, la dernière enquête Inca du Crédoc pour l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), sur les consommations et opinions alimentaires décrit une population française déboussolée par l'effritement de ses modèles alimentaires classiques et en mal d'informations dans les domaines de la sécurité alimentaire et de la nutrition.
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Intervenant après plusieurs années troublées par de multiples crises
alimentaires, l'étude Inca arrive à point nommé pour éclairer ce qu'il faut
bien appeler la "psychose" de la vache folle et, plus largement, celle liée à
la sécurité alimentaire. Elle comporte en effet un important volet sur les
attitudes et comportements dans le domaine de la sécurité et des risques
alimentaires. Il en ressort ainsi que près de deux Français sur trois pensent
que les produits alimentaires présentent des risques pour la santé. Un sur
quatre estime ces risques importants. Même s'ils reconnaissent les progrès
réalisés, cette inquiétude révèle un pessimisme global sur l'avenir de
l'alimentation. Cette perception s'accompagne d'un jugement négatif sur
l'évolution de la qualité des produits alimentaires depuis dix ans, ainsi que
sur les contrôles effectués sur ces derniers. S'ajoute à cela un sentiment de
perte des repères alimentaires traditionnels. Les consommateurs accordent
également une très grande place aux risques nutritionnels et particulièrement à
l'obésité et aux maladies de société (maladies cardio-vasculaires, diabète...).
D'ailleurs, nos concitoyens les associent étroitement aux risques nutritionnels
et sanitaires. Et ce n'est probablement pas un hasard si les groupes d'aliments
les plus touchés par les crises (viandes, matières grasses, charcuteries...)
sont aussi ceux souffrant d'un sérieux déficit d'image sur le plan
nutritionnel. Ils sont perçus comme porteurs de nutriments à éviter (matières
grasses, sel...). Dans ce contexte, les Français sont à la recherche d'autres
repères que la confiance dans l'alimentation traditionnelle "variée et
équilibrée". Les nutriments, tels que le calcium, les protéines, les "sucres
lents" ou les fibres, font déjà l'objet d'un intérêt soutenu de la part des
adultes. A l'opposé, les matières grasses et graisses saturées en général et
les sucres sont identifiés comme des composants plutôt à éviter. Mais si les
adultes flirtent avec le végétarisme, ils sont encore loin d'y succomber. Et le
taux de consommateurs hebdomadaires (au moins une fois par semaine) de viande
s'élève encore à 96 % et à 93 % pour le fromage et la charcuterie. Plus
inquiétant, en revanche, le phénomène observé sur la consommation de fruits et
légumes. Elle se maintient chez les consommateurs âgés, mais faiblit chez les
jeunes, tout comme les apports moyens en fibres. En outre, la baisse relative
de la consommation de lipides observée chez les adultes n'est pas confirmée
chez les enfants dont les apports énergétiques augmentent. Il n'est pas
scientifiquement possible pour l'instant de mettre en relation cette
augmentation des apports énergétiques chez les enfants avec l'augmentation de
la prévalence de l'obésité constatée dans d'autres études. L'étude Inca 2, qui
sera menée courant 2001, établira plus sûrement les choix des Français qui ne
savent plus très bien actuellement à quel aliment se vouer.
MÉTHODOLOGIE
L'enquête Inca (Individuelle et nationale sur les consommations alimentaires) a été menée par le Crédoc pour le compte de la Direction générale de l'alimentation (DGAL), l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), le Centre interprofessionnel de documentation et d'information laitières (Cidil), le Centre d'information des viandes (Civ), l'Office national interprofessionnel des vins (Onivins), l'Association sucre produits sucrés consommation communication (ASPCC) et le centre de recherche Jean-Thèves de Danone. Elle se base sur un échantillon d'adultes et d'enfants en France et porte sur les consommations et opinions alimentaires de 3 000 individus de 3 ans et plus, représentatifs de la population française.