Search Engine Marketing, l'heure de la maturité
En dix ans, les liens sponsorisés se sont imposés comme l'arme publicitaire la plus efficace jamais inventée. Cependant, après s'être précipités vers cet eldorado de la rentabilité, les acteurs du marché cherchent, aujourd'hui, à mieux optimiser leurs investissements.
Je m'abonneLocomotive de la publicité en ligne, le Search Engine Marketing (SEM), autrement dit le marketing des moteurs de recherche, continue à se tailler la part du lion. Aux Etats-Unis, le contexte de crise a profité aux moteurs de recherche qui ont engrangé 10,7 milliards de dollars en 2009. Le SEM représente 47 % du marché outre-atlantique, en hausse de deux points. En France, 41,7 %, soit 880 millions d'euros nets investis en 2009, selon une étude réalisée par le Syndicat des régies internet (SRI) et Capgemini Consulting. Après le ralentissement de l'an dernier, les investissements redémarrent. « C'est un marché dynamique qui ne peut que progresser», estime Olivier Moustacakis, p-dg et cofondateur de eSearchVision, qui prévoit une augmentation de 20 à 25 % des investissements. Ceux-ci devraient atteindre le milliard d'euros. «La croissance du SEM reste forte mais est plus modérée qu'entre 2003 et 200J. Période lors de laquelle Google enregistrait, en France, une progression de 30 % minimum sur les liens sponsorisés. Aujourd'hui, elle n'est que de 9 % », selon Marc Panic, directeur des opérations de GroupM Interaction. «Au vu de la croissance de ces dernières années, ce recul est tout à fait normal», relativise Frédéric Prigent, dg de TradeDoubler. Pour Marc Panic, le marché arrive tout simplement à une certaine maturité.
Vers une internalisation de la gestion du search
«Tous les annonceurs, même les plus orientés vers le branding, ont compris que le SEM était un levier incontournable. Plus de 80 % de nos clients l'utilisent. Ils souhaitent instaurer des dispositifs de search plus importants et plus complets: le ticket d'entrée tourne actuellement autour de 7,5 million d'euros», témoigne Marc Panic. Conséquence? L'expérience de certains annonceurs les pousse à vouloir internaliser la gestion de leurs campagnes. «Notre plateforme est de plus en plus utilisée en self-service, surtout aux Etats-Unis. Certains annonceurs font de même en France, comme Cetelem», indique Olivier Moustacakis. «Cette tendance concerne surtout les grands comptes», précise Frédéric Prigent. Le but: être plus réactif sur la Toile. « C'est le cas de Cdiscount et de Mistergooddeal, qui ont une licence de notre technologie», ajoute le p-dg d'eSearchVision. En outre, cette discipline rend les annonceurs dépendants des moteurs de recherche leaders. En Europe, le géant américain détient, par exemple, près de 90 % des parts de marché (PDM). «En France, la position dominante de Google est claire. Les autres se partagent les miettes. Yahoo se positionne principalement sur le display, et Bing représente 3% de PDM. Nos annonceurs sont conscients de leur subordination à Google», développe Marc Panic. Résultat: les prix des mots-clés augmentent sur le moteur de Mountain View. «Avec un seul acteur sur le marché, cela coûte plus cher aux annonceurs. Il y a une inflation des coûts moyens par clic », poursuit-il. «Certains mots-clés peuvent atteindre un coût par clic (CPC) de 5 à 10 euros sur Google. Il n'y a plus de place pour tout le monde», assure Julien Mosse, directeur général de Ligatus France. « La concurrence est rude sur Google, surtout dans notre secteur, constate Guillaume Thomas, fondateur d'Aladom, site de services à domicile. Mais nous ne souhaitons pas fa ire de surenchère. Nous nous limitons à des CPC de 0,12 à 0,75 euro. Par ailleurs, nous cherchons à perfectionner nos investissements pour maximiser les dies. Sur certains mots-clés, les visiteurs sont de meilleure qualité.» Même priorité chez Performics. « Le travail d'optimisation et de suivi des campagnes est essentiel, affirme Yann Gabay, le directeur général. Au démarrage, dans un secteur comme le voyage, un clic coûtait entre 25 et So centimes. Aujourd'hui, difficile d'en avoir en dessous de 50 centimes.» Une inflation des prix qui oblige les annonceurs à rationaliser leurs investissements...
Frédéric Prigent (eSearch Vision): « Les rendements de Google restent meilleurs que ceux des autres moteurs de recherche en termes de roi. »
Qu'attendre de l'alliance entre Yahoo et Microsoft?
Dans ce contexte, le partenariat entre Yahoo et Microsoft est déjà effectif aux Etats-Unis, devrait également avoir des répercussions en Europe, au premier semestre 2011. Concrètement, la technologie de recherche de Microsoft, Bing, remplace l'actuel moteur de Yahoo. En contrepartie, ce dernier commercialise pour les deux portails les liens sponsorisés. « Plus nous serons puissants, plus nous serons intéressants aux yeux des annonceurs. Le volume appelle le volume. Je pense que le marché attend beaucoup de cette alliance», estime Jean-Christophe Gombeaud, directeur du planning et de la stratégie chez Yahoo! France. En l'occurrence, le marché semble surtout dans l'expectative... «Aux Etats-Unis, cette alliance a du sens. Un peu moins en France», juge Julien Mosse. «On voit difficilement les internautes utiliser autre chose que Google», considère pour sa part Yann Gabay. «La diversité des moteurs de recherche a du bon, concède Frédéric Prigent. Mais, à l'usage, les rendements de Google restent encore meilleurs que ceux des autres moteurs de recherche en termes de ROI. »
Pour diversifier leurs investissements, certains annonceurs se tournent vers de nouveaux acteurs, comme Ligatus. Ce dernier se positionne comme un concurrent du réseau publicitaire Google Content. Le credo de cet acteur: la transparence et la qualité de l'audience. «Nous ne sélectionnons que des éditeurs premium capables de générer de la performance. Les annonceurs savent qui fait partie du réseau », précise Julien Mosse.
Guillaume Thomas (Aladom): « nous cherchons à perfectionner nos investissements pour maximiser les clics. »
SEM et SEO, une complémentarité gagnante
L'un est payant, l'autre naturel. Mais, entre ces deux types de référencement, l'heure est au rapprochement, du moins dans les agences. Ainsi, Isobar (agence de communication digitale) fait intervenir dans ses campagnes de visibilité en ligne, Aposition, une société spécialisée dans le Search Engine Optimization (SEO) qu'elle a rachetée en 2008. Même objectif chez Performics. « Chez beaucoup d'annonceurs, SEO et SEM étaient gérés par des services différents. Aujourd'hui, nous essayons de les convaincre que l'ensemble forme aussi du marketing. Le référencement naturel s'avère moins rentable que les liens sponsorisés à court terme, mais c'est un investissement pérenne. Son ROI se fait dans le temps. On peut investir une certaine somme la première année et n'en tirer les bénéfices que l'année suivante », observe Yann Gabay. Dans ce domaine, le travail de pédagogie ne fait donc que commencer.
On avance aussi à tâtons dans le domaine du Social media optimization (SMO), car les avis diffèrent. «Quelques campagnes d'achats de mots-clés sur Facebook ont donné des résultats au-delà de nos espérances», affirme Marc Panic. « Les médias sociaux sont un support supplémentaire mais nous n'avons pas assez de recul pour connaître leur réelle efficacité », modère Olivier Moustacakis. « Les budgets SMO de nos annonceurs ont été multipliés par dix en un an. Mais, quelques centaines de milliers d'euros, cela reste infime par rapport à leurs budgets globaux, souligne pour sa part Yann Gabay. Si les opérations coûtent moins chères, elles restent limitées par rapport à l'importance prise par les moteurs de recherche. »
Le search sur mobile dans les starting-blocks
Le search sur mobile n'en est qu'à ses débuts avec moins de 1 % du marché global. Mais les estimations vont bon train. Une étude récente de Keysley Group estime que les dépenses mondiales devraient passer de 160 millions de dollars, en 2008, à 2,3 milliards en 2013, au vu de l'évolution rapide des comportements des utilisateurs. «Le potentiel à venir est énorme. Le prix du clic de la recherche sur mobile devrait donc augmenter. Il faut y aller maintenant», explique Frédéric Prigent. Tout le monde ne partage pas cet enthousiasme. «On entend dire depuis cinq ans que ce marché va exploser. Nos annonceurs, en tout cas, ne s'y intéressent pas. Nous avons fait quelques essais avec des annonceurs «ROIstes» qui se sont révélés assez décevants», signale Marc Panic.
Yann Gabay (Performics): « on voit difficilement les internautes utiliser autre chose que Google. »
Un levier en interaction avec les autres
Une chose est sûre, il devient important d'analyser le parcours complet effectué par l'internaute avant la conversion. L'enjeu pour les marques est maintenant d'intégrer le marketing des moteurs de recherche au sein d'une stratégie globale. « On ne peut plus continuer à réfléchir en silo. L'internaute ne rentre pas dans un tuyau. Il y a une perméabilité entre tous les canaux d'acquisition. Ce n'est pas évident car cela demande de travailler en transversalité », assure Frédéric Prigent. «Il y a certains facteurs-clés qui font qu'une campagne search marche mieux certains jours. Nous avons, par exemple, observé que les campagnes télévisées provoquent un pic de requêtes sur les noms de marque», observe Marc Panic. Un constat qui a donné naissance à une étude menée au début de l'année par le département Business Intelligence de GroupM Interaction. Son objectif était d'étudier l'impact de la télévision sur le search afin de développer en amont des solutions d'optimisation des campagnes sur ces deux canaux. Bref, son but est d'anticiper. Voilà bien en un mot, la clé d'un SEM réussi.
Laurent de Camas (Canal +) : « Notre nouvel outil de tracking nous permettra d'éviter les doublons et de faire évoluer les campagnes avec les agences. »
Trois questions à Laurent de Camas, directeur marketing Internet de Canal +
Quelle part de vos investissements publicitaires accordez-vous au Search Engine Marketing?
Chez nous, le budget consacré à l'achat de mots-clés est important mais pas prépondérant vis-à-vis des autres leviers. En 2010, nos investissements en search seront équivalents à ceux de l'année dernière. Nous sommes surtout présents sur Google. Le premier critère de jugement est la performance liée au volume généré et le coût par abonné. Nous considérons que nous avons pour le moment atteint un bon ratio coût/efficacité.
Comment analysez-vous le ROI de vos campagnes?
Nous allons prochainement nous doter d'un tout nouvel outil de tracking. Celui-ci va nous permettre de mieux répartir notre budget en attribuant précisément la conquête d'un client au média d'origine. Cela permet d'éviter les doublons et de faire évoluer les campagnes avec les agences en fonction des résultats obtenus.
Votre stratégie marketing inclut-elle le référencement naturel?
Aujourd'hui, nous faisons beaucoup de liens sponsorisés mais nous cherchons de plus en plus à améliorer notre référencement naturel. Il est vrai que sur certains mots-clés, les coûts au clic sont tels qu'il faut trouver d'autres alternatives. Nous essayons alors d'améliorer la construction de nos sites, mais c'est un travail de longue haleine.
Yahoo décrypte l'usage des moteurs de recherche par les internautes
Outils Pour la première édition de la Yahoo! Search Academy, une étude sur le comportement des internautes sur les moteurs de recherche a été réalisée. Pressés et exigeants, ils cliquent en connaissance de cause sur les liens sponsorisés.
Que serait Internet sans moteur de recherche? Plus de neuf internautes sur dix lancent, chaque mois, des requêtes sur un moteur, selon Médiamétrie. La recherche sur le Web est la première activité devant la correspondance par courrier électronique. 74 % des 1228 internautes, interrogés par Yahoo!, disent qu'ils ne pourraient pas bénéficier du meilleur d'Internet sans moteur de recherche. De plus, si 69 % jugent cet outil fiable, ils attendent qu'il soit pratique, efficace et rapide. Pressés, 61 % des internautes ne vont pas plus loin que la première page de résultats. 93 % des personnes interrogées utilisent un moteur pour trouver le site d'une marque. 68 % ont déjà cherché une marque dont ils ne se rappelaient plus le nom. Comment ont-ils procédé? Pour 69 % d'entre eux, ils ont cherché à partir d'un slogan ou d'un élément descriptif, d'une publicité (musique, personnalité...) qu'ils ont souvent aperçus sur d'autres médias. Une méthode qui a fonctionné pour 71 % des personnes. 87 % ont effectué leur recherche à partir de «termes génériques» et leurs démarches ont abouti dans 75 % des cas. Lorsqu'ils ne trouvent pas le site d'une société ou d'une marque sur la première page des résultats de recherche, 31 % des internautes remettent en cause la qualité du moteur de recherche ; 34 % pensent que c'est la marque qui est responsable de son mauvais référencement, et pour 35 % c'est tout simplement de leur faute! 35 % des personnes vont donc consulter les pages de résultats suivantes alors que 40 % affinent les termes de la requête. 23 % sont moins obstinés et se rabattent sur un site équivalent apparu dans les résultats de recherche.
Les liens sponsorisés bien identifiés
87 % des internautes ont déclaré avoir remarqué les liens sponsorisés sur les pages de résultats de recherche. 75 % sont même capables de les définir correctement, notamment dans la dimension publicitaire et commerciale. Bien informés, 22 % savent que ces liens sont payants pour l'annonceur et qu'ils permettent aux moteurs de recherche de se financer. Pourquoi cliquent-ils dessus? 34 % parce qu'ils sont bien visibles ; 32 % car il s'agit des résultats les plus pertinents ; 32 % s'attardent sur le caractère «officiel» de la marque ou de la société qu'ils cherchent. Enfin, 32 % estiment que ces sites sont de qualité convenable.
Yahoo Search academy, mode d'emploi
Présentée comme un nouveau format de rencontres-formations réunissant les agences et les annonceurs, la Yahoo Search Academy est surtout l'occasion, pour Yahoo, de reprendre la parole sur le sujet du search. « Nous voulions réunir nos clients le temps d'une journée pour dialoguer avec eux à propos de l'état du marché. Même si, ces dernières années, il y a eu plus d'innovation sur le display, nous voulions leur dire que le search compte toujours pour nous », explique Jean-Christophe Gombeaud, directeur planning et stratégie, Yahoo! France.