Salaires marketing et vente : tendance toujours positive
“Marketing et vente : salaires en hausse malgré la crise”. Tel était le
titre de l'article que Marketing Magazine avait consacré l'an passé à l'étude
annuelle Mæsina International Search - Hewitt Associates. Pour cette nouvelle
et vingt-cinquième édition - la quinzième en partenariat avec Hewitt -, nous
aurions pratiquement pu reprendre ce titre à l'identique. La conjoncture n'est
pas moins difficile, l'inflation devrait tourner aux alentours de 2 % et les
salaires marketing et vente continuent de progresser, au-delà de cette
inflation. « Dans un environnement particulièrement concurrentiel, les
entreprises cherchent à garder leurs bons éléments », constate Jean-Michel
Azzi, P-dg de Mæsina International Search, conseil en recrutement par approche
directe, spécialisé depuis trente ans dans les fonctions marketing et
commerciales. “Pratiquement”, disions-nous car, cette année, si la tendance
est toujours positive, elle n'en cache pas moins un certain nombre de
disparités et de mouvements non anodins. Notons, au passage que, sur un plan
méthodologique, les augmentations dont il va être fait mention correspondent à
celles dont ont bénéficié des titulaires n'ayant changé ni de société ni de
poste entre les deux années.
Le marketing mieux loti que le commercial
Premier constat : contrairement à ce qui avait été
enregistré l'an dernier, les augmentations des fonctions commerciales sont
inférieures à celles des fonctions marketing. Principalement au niveau des
dirigeants et managers. Un phénomène de balancier déjà remarqué de nombreuses
fois dans le passé. Ainsi, la moyenne des augmentations de la fonction
marketing est de 3,9 %, à la fois au niveau du salaire fixe et du salaire
total, tandis qu'elle se situe, respectivement, à 3,7 % et 2,8 % pour la
fonction commerciale. Deuxième constat : ces augmentations, qu'elles
concernent le marketing ou le commercial, sont moins élevées que celles de
l'année dernière, au niveau du salaire total. Si le marketing bénéficie d'une
légère progression du taux d'augmentation de son salaire fixe (+ 3,9 % vs + 3,7
% en 2003), l'augmentation de son salaire total est en retrait (+ 3,9 % vs +
4,2 %). Mais les taux 2004 restent néanmoins honorables et font dire à
Jean-Michel Azzi que « le marketing reste un métier qui paie bien quand on y
réussit. » La différence de progression est nettement plus marquée au niveau du
commercial en ce qui concerne la moyenne du salaire total (+ 2,8 % contre + 3,6
% en 2003), tandis que le niveau d'augmentation moyen du salaire fixe
progresse, de + 3,3 % à + 3,7 %. Des différences entre fixe et total
imputables, bien sûr, au variable touché au titre de l'année 2003. « Les
objectifs ont été beaucoup plus difficiles à atteindre en 2003, commente
Jean-Michel Azzi. Et la différence au niveau du commercial montre même que
beaucoup n'ont pas été atteints. » Troisième constat : ces augmentations
moyennes cachent de fortes disparités en fonction des niveaux de poste.
Disparités plus marquées dans le cas du marketing que du commercial.
Marketing : des disparités en fonction des niveaux de poste
Les dirigeants marketing ont ainsi vu leur augmentation en
salaire total passer de 2,8 % à 3,5 %, les managers marketing de 3,5 % à 3,9 %
tandis que leurs équipes ont été moins favorisées, descendant de 6,3 % à 4,2 %.
Ces disparités n'affectent que peu le salaire fixe, dont les augmentations
restent assez homogènes. Cause de cette situation : le variable. “Bien qu'il
soit difficile d'expliquer de pareilles différences, note le rapport d'étude de
Mæsina, nous émettons l'hypothèse que les objectifs fixés aux dirigeants, et
dans une moindre mesure aux managers, sont plus liés aux réalisations de
niveaux de résultat que ceux de leurs équipes qui, en marketing, ont souvent
des objectifs de volume ou de part de marché, de tenue de budget ou liés à la
réalisation de projets dans un timing donné.” Au niveau des dirigeants
marketing, on notera également un nouveau phénomène cette année : le
renforcement des “extrêmes” en matière de salaire total. La preuve manifeste
que certaines sociétés ont bien réussi dans la conjoncture actuelle et d'autres
nettement moins bien. A savoir qu'en 2004, 31 % des dirigeants marketing ont vu
leur salaire total enregistrer une augmentation supérieure à 8 % (27 % en 2003)
et que, dans le même temps, 25 % d'entre eux ont enregistré une baisse (22 % en
2003). A l'inverse, la proportion “d'équipes” ayant vu leur salaire total
augmenter de plus de 8 % est passée de 36 % en 2003 à 22 % en 2004 ; les
baisses de salaire n'affectant “que” 16 % d'entre eux, contre 13 % en 2004. La
situation est nettement plus homogène en ce qui concerne les niveaux
commerciaux. + 2,6 % pour les dirigeants (mais contre + 4,1 % en 2003), + 2,9 %
pour les managers (+ 4,3 % en 2003) et + 2,9 % pour les équipes qui compensent
légèrement leur bas niveau de l'an passé (+ 2,3 %). Dans les trois cas, le
salaire fixe s'est beaucoup mieux tenu, avec même des progressions pour les
managers (+ 3,9 % vs + 3,4 %) et leurs équipes (+ 3,8 % vs + 2,9 %). « Ce
constat global de baisse du niveau d'augmentation des commerciaux montre à quel
point les objectifs doivent être fixés avec précision, note Jean-Michel Azzi.
D'autant plus que la non-atteinte des objectifs peut entraîner un phénomène de
démotivation. » Si le marketing a vu des pourcentages significatifs de baisse
en salaire total, le mouvement est encore amplifié pour le commercial : 26 %
pour les dirigeants (contre 17 % en 2003), alors que dans le même temps ils
n'étaient plus que 16 % à enregistrer une hausse de plus de 8 %, contre 33 % en
2003 ; 33 % pour les managers (proportion stable) ; les équipes confirmant
qu'elles ont mieux su tirer leur épingle du jeu avec 29 %, contre 36 % l'an
passé. On vient de voir concrètement l'incidence de la partie variable
individuelle - dans un sens comme dans l'autre d'ailleurs -, au niveau de la
rémunération totale. Le pourcentage de bénéficiaires est de nouveau en
augmentation. « C'est une tendance lourde depuis plus de dix ans, constate
Jean-Michel Azzi, mais elle devrait maintenant tendre à plafonner. » Plus de 72
% des dirigeants et managers marketing en bénéficient et même 82 % des
directeurs marketing. Pour les plus jeunes au sein des équipes, cette
proportion s'élève maintenant à 52 %. Chez les dirigeants et cadres commerciaux
de terrain, elle se situe entre 80 et 95 %.
Des taux de variable généralement en ligne avec 2003
Contrairement à l'an passé, le
poids du variable réellement touché est calculé par rapport au salaire fixe,
conformément à la façon habituelle des sociétés de présenter un package
salarial. D'une manière générale, les taux sont en ligne avec ceux de l'année
passée, avec quelques variations en harmonie avec les évolutions
d'augmentation. Le marketing ayant plutôt des taux légèrement en augmentation
et le commercial en baisse. Ainsi, le poids du variable d'un directeur
marketing, par exemple, est en 2004 de 17 % du fixe contre 15 % en 2003, et
celui d'un directeur des ventes de 18 % du fixe contre 19 %, d'un directeur des
ventes export de 13 % contre 17 %. « Néanmoins, constate Jean-Michel Azzi, on
voit depuis deux ans que des grands groupes ont modifié le niveau de
rémunération de leurs commerciaux en montant le potentiel de variable à des
niveaux très élevés, jusqu'à 30 %, afin de générer davantage de motivation. »
En ce qui concerne la participation légale, elle atteint, sans changement par
rapport à l'an dernier, un niveau de 7 à 8 % du salaire total annuel, soit
l'équivalent d'environ un mois de salaire ; 25 % de l'échantillon payant de
l'ordre d'un mois et demi de salaire. Des taux qualifiés par Mæsina de
“raisonnables et à peu près cohérents par société”. Quant aux stock options, si
elles restent un bon outil de fidélisation des cadres, lorsque tout va bien,
leur nombre de bénéficiaires reste faible. « La volatilité de la bourse rend
cet avantage peu lisible pour des cadres non avertis et peut engendrer de
vraies frustrations », prévient Jean-Michel Azzi. L'appartenance à un comité de
direction - qui concerne 69 % des directeurs marketing ventes, 63 % des
directeurs de la communication, 56 % des directeurs marketing, 43 % des
directeurs des ventes, 39 % des directeurs des achats… - entraîne en moyenne
une différence de salaire de l'ordre de 9 %.
Agroalimentaire et Hygiène-Cosmétique : la fin des différences
Si l'on regarde
maintenant les évolutions des rémunérations par secteur d'activité,
comparativement à la moyenne tous secteurs confondus, on ne constate que peu de
changements majeurs dans la valorisation des métiers par rapport 2003.
Historiquement meilleur “payeur” du marché en marketing et communication, le
secteur Hygiène-Cosmétique-Pharmacie est désormais rejoint par le secteur
Agroalimentaire. Et ce, en raison de transferts de l'un à l'autre qui, selon
Mæsina, “ont complètement éliminé les disparités que l'on pouvait constater il
y a encore cinq ans”. 2003 avait été particulièrement favorable aux métiers du
marketing dans l'Agroalimentaire. Si les chiffres sont plus raisonnables cette
année, ces métiers y restent particulièrement favorisés, tout comme en
Hygiène-Cosmétique. Les responsables du marketing tournés vers les
distributeurs, notamment, sont en pointe sur un secteur “où le poids de la
grande distribution oblige les industriels à pratiquer des méthodes modernes et
sophistiquées de category management”, commente Mæsina. Et l'on notera
également l'écart de plus de 9 % par rapport à la moyenne, qui caractérise le
chargé d'études marketing, fonction qui retrouve de l'importance, sur les deux
secteurs. Tout comme celle du directeur de la communication, plus de 7 %, en
raison du rôle de la communication corporate face aux risques alimentaires
permanents que courent les entreprises. Ou encore le bon + 10 % du directeur du
service client, toujours sur les deux secteurs, relation client oblige ! Au
niveau commercial, les différences par rapport à la moyenne ne pas très
élevées. “Le métier y est difficile, mais ne justifie pas une surévaluation des
rémunérations”, estime Mæsina. Toujours en B to C, le secteur des biens
semi-durables (petit électroménager, gros électroménager blanc, bricolage,
hi-fi…) ne déroge pas à son habitude de moins bien payer que les autres
secteurs ; ce qui est particulièrement vrai dans le marketing où les chefs de
produit peuvent se trouver 15 % en dessous de la moyenne et près de 18 % en
dessous de la grande conso. En revanche, sur le plan commercial, ce secteur se
situe dans la moyenne. Et, là encore, le directeur du service client performe,
à plus de 10 %, “ce qui peut montrer une envie de se rapprocher des clients en
améliorant, par exemple, le service après vente”, commente Mæsina.
Les Services en retard
En B to B, le secteur
Chimie-Parachimie-Plastique, constitué d'entreprises ayant souvent une division
grand public, apprécie le marketing et la communication et leur offre des
rémunérations légèrement supérieures à la moyenne ; les commerciaux étant
traités comme la moyenne, mais avec une importance accrue donnée aux
responsables grands comptes. Quant au secteur Métallurgie-Mécanique-Automobile,
secteur technique par excellence, on y paie mieux les ingénieurs que les
marketeurs et commerciaux ; le marketing souffrant particulièrement par rapport
à la moyenne tous secteurs avec des écarts entre - 6 et - 16 %.
Electricité-Electronique-Bureautique et Informatique donnent une prime aux
commerciaux, bien mieux lotis que les hommes de marketing. “Dans la plupart des
cas, constate Mæsina, le marketing est ici très proche du commercial et ne
s'occupe pratiquement que de mise en marché, les produits étant conçus et
développés dans d'autres pays.” Enfin, si les Services financiers (Banque et
Assurance) avaient eu des velléités, il y a deux ans, de mieux rémunérer le
marketing, ce n'est plus le cas en 2004, tout comme en 2003, alors que les
commerciaux sont dans une bonne moyenne. A noter, de nouveau, la bonne
performance du directeur du service client, toujours à plus de 10 %. Quant au
secteur des Services non financiers (Tourisme, Loisirs…), il a été fortement
sinistré ces dernières années et ne peut donc offrir des rémunérations
supérieures à la moyenne, tant en marketing qu'en commercial. “Ce qui, commente
Mæsina, rend difficile les transferts depuis d'autres secteurs. Il existe peu
d'enrichissement dû à de la fertilisation croisée, caractéristique de l'apport
de candidats extérieurs à un secteur.” Les résultats de la précédente étude
Salaires Mæsina-Hewitt sont parus dans le numéro 81 de Marketing Magazine
(octobre-novembre 2003).
Fonctions : des performances diverses
En comparant les moyennes de rémunération 2003 et 2004, et en prenant les précautions dues à des échantillons parfois faibles, une fonction apparaît particulièrement touchée : celle de directeur marketing-ventes, dont la rémunération totale a baissé en moyenne de 1,4 %, en dépit d'une augmentation de son fixe de 3 %. La plupart des fonctions marketing ont enregistré des progressions supérieures à 4 %, toujours en salaire total ; l'assistant chef de produit bénéficiant même d'un + 5,2 %. Deux sont néanmoins en dessous de 4 % : le chef de groupe et le chef de produit, ou de marque, international ; deux fonctions dont l'évolution du fixe a été supérieure à celle du total. Chez les commerciaux, c'est le directeur des ventes export qui a réalisé la moins bonne performance en salaire total : + 0,5 % seulement, faisant suite à une augmentation de 7,2 % en 2003. Et le chef des ventes national la meilleure, avec + 4,3 %. Deux fonctions ont été sensiblement revalorisées : celles de directeur national des ventes (+ 3,4 % contre + 0,1 % en 2003) et de directeur régional (+ 4 % contre + 2,4 %). Le directeur de la communication a, quant à lui, connu une revalorisation significative, dans le contexte, de son salaire total, passant de + 1,9 % en 2003 à + 4,5 % en 2004. A l'inverse, et de manière amplifiée, le directeur des achats a vu l'augmentation de son salaire global chuter de + 8,1 % (la plus élevée en 2003) à + 2,7 %. Et pourtant, on connaît le poids croissant de cette fonction…
Méthodologie
La vingt-cinquième édition de l'étude “Salaires marketing ventes” de Mæsina International Search, en partenariat avec Hewitt Associates, a été menée au printemps 2004 sur la base des déclarations des responsables des ressources humaines de 140 entreprises, sur 8 secteurs, regroupant 3 754 cadres (dirigeants, managers et responsables). Ce, dans tous les secteurs d'activité. L'étude passe au crible 27 fonctions, dont 24 dans l'univers marketing (10), vente (11) et communication (3), et 3 dans celui des achats. Elle tient compte de tous les éléments de la rémunération : fixe, variable, participation, intéressement, voitures de fonction… La “rémunération globale”correspond au brut annuel 2004 pour le salaire fixe auquel s'ajoutent les rémunérations variables effectivement touchées au titre de l'année 2003 par les titulaires, à l'exception de la participation légale et de l'intéressement collectif. Marketing Magazine propose ici une sélection de fonctions et de secteurs ; l'ensemble de l'étude étant disponible auprès de Mæsina International Search.