Salaires 2009 : le marketing perd le sourire
Après une embellie en 2008, la progression des salaires des fonctions marketing a connu un ralentissement sensible cette année. Plus marqué que celui des fonctions commerciales. En cause : la faiblesse de la partie variable.
Je m'abonnePour sa 30e édition, l'étude Mæsina International Search, réalisée en partenariat avec Hewitt Associates pour la 19e année, est fidèle à sa tradition de «changement dans la continuité». Ainsi, on notera qu'au niveau des secteurs étudiés, et en raison de la taille des échantillons, la Pharmacie et l'Hygiène-Cosmétique sont de nouveau réunis tandis que la Construction (BTP et Matériaux) et le Tourisme-Loisirs font leur apparition dans le champ de l'enquête. Autre changement de cette édition : les critères permettant de détailler les fonctions ont été harmonisés. La distinction Paris - région parisienne / Province étant désormais la règle commune, en lieu et place du chiffre d'affaires géré ou de l'effectif supervisé, critères utilisés pour certaines d'entre elles.
Enfin, le nombre des fonctions étudiées a sensiblement diminué, afin de concentrer l'investigation sur les plus représentatives dans les secteurs du marketing et de la vente.
En revanche, on n'enregistre toujours pas de changement concernant les informations relatives aux rémunérations, fixes (effectives en mars 2009) et globales. De même, les augmentations indiquées correspondent toujours à celles dont ont bénéficié des titulaires n'ayant changé ni de société ni de poste entre les deux années de référence.
Jean-Michel Azzi (Mæsina international Search) :
« La baisse générale du niveau d'augmentation est clairement due à celle du variable, spécialement pour les dirigeants et managers. Ce qui indique que les objectifs fixés fin 2007 n'ont pas été atteints. »
Mauvaise année pour le marketeur...
Les années se suivent et, parfois, ne se ressemblent pas. Après une année 2007 qui avait vu un recul sensible du niveau d'augmentation, 2008 avait renoué avec la tendance de hausse significative connue précédemment. En 2009, on assiste à une nouvelle rupture avec une baisse, accentuée, des niveaux de rémunération. En effet, la moyenne des augmentations pour la fonction marketing s'est établie, cette année, à 2,7 % pour le salaire fixe, contre 4,1 % en 2008, et à 1 % pour la rémunération totale, contre 4,4 % en 2008.
Autre différence par rapport à l'an dernier : tous les niveaux ne sont pas égaux devant la baisse, alors qu'ils l'étaient pratiquement tous face à la hausse. Ainsi, les plus touchés apparaissent être les managers (0 % d'augmentation en salaire global), suivis des dirigeants (+ 0,9 %), tandis que les équipes ont vu leur salaire global progresser de 2,3 % (et leur fixe de 3,7 % contre 1,8 % pour les managers et 2,6 % pour les dirigeants) . Mais, selon Mæsina International Search, cabinet conseil en recrutement par approche directe spécialisé dans les fonctions marketing et commerciales, «le niveau d'inflation probable pour 2009 vs 2008 (2 %), annule certains rattrapages réalisés par le fixe».
« Cette baisse générale du niveau d'augmentation est clairement due à celle du variable, spécialement pour les dirigeants et managers, analyse Jean-Michel Azzi, président de Mæsina International Search. Ce qui indique que les objectifs - qui ont été fixés fin 2007 et étaient forcément élevés compte tenu dune fin d'année plutôt euphorique - n 'ont pas été atteints. Néanmoins, les entreprises ont manifesté une volonté de ne pas baisser outre mesure les rémunérations des équipes marketing, tout comme d'ailleurs celles des équipes ventes. » Ce commentaire sur l'influence du variable est confirmé par l'examen des niveaux d'augmentation : 48 % des marketeurs ont vu leur rémunération totale baisser ou stagner à + 1 % maximum. A l'inverse, si 27 % des marketeurs ont connu une augmentation de leur rémunération supérieure à 8 % en 2008, ils ne sont plus que 14 % dans ce cas de figure en 2009.
On remarquera que, parmi les fonctions marketing pour lesquelles des comparaisons sont possibles, c'est le chef de produit junior qui tire le mieux son épingle du jeu, avec + 4,4 % en fixe et + 2,8 % en global. «On note depuis quelques années des augmentations fortes pour les personnes ayant entre un et cinq ans d'expérience», constate Jean-Michel Azzi.
... un peu meilleure pour le commercial
Curieusement, le ralentissement de la progression des rémunérations en 2009 a moins affecté les populations commerciales que les marketeurs. En moyenne, leur salaire fixe a augmenté de 2,6 %, contre 3,3 % en 2008, et leur rémunération globale de 2,0 %, contre 3,8 %. Cependant, à l'image du marketing, ce sont les managers (+ 1,6 % pour leur rémunération totale, contre + 4,5 % en 2008) et les dirigeants (+ 1,8 % contre + 3,5 %) qui ont été le plus touchés. Les équipes voyant leurs augmentations de salaire total passer de 3,4 % à 2,5 %. «Il est probable que certaines sociétés ont cherché à trouver de nouveaux objectifs commerciaux, pour éviter de voir leurs collaborateurs totalement démotivés par les contre-performances », commente Jean-Michel Azzi. Et l'on notera, comme supra, que les augmentations globales sont en dessous de l'inflation prévisible, sauf pour les équipes.
La difficulté à obtenir, en 2009, une part variable est une nouvelle fois illustrée par la répartition des niveaux d'augmentation de salaire total. 55 % des commerciaux ont vu leur rémunération globale baisser ou stagner ; 29 % ayant enregistré une hausse égale ou supérieure à 4 %, contre 54 % en 2008.
Au sein des fonctions commerciales, ressort notamment le responsable grands comptes (+ 3,5 % en fixe et en global) . «Il est logique, même en période difficile, que ce poste connaisse des augmentations significatives, dues à son caractère indispensable en matière de développement», relève Jean-Michel Azzi. Le directeur du développement des ventes (+ 3 % en fixe et + 2,7 % en global) n'est pas mal loti non plus, tout comme le Category Manager ; « ce qui correspond à une «seniorisationn» de la fonction, compte tenu du développement du marketing vers le trade», remarque Jean-Michel Azzi.
«Le pourcentage de bénéficiaires d'une rémunération variable individuelle est maintenant à son niveau, proche du plus haut ; la tendance lourde à l'accroissement depuis plus de dix ans fait que l'on atteint, pour certaines fonctions, une asymptote», constate, tout comme l'an passé, Mæsina. On remarque ainsi que, pour les populations marketing, la barre des 90 % de bénéficiaires est désormais franchie pour plusieurs fonctions ; ce qui précédemment n'était le fait que de certaines fonctions commerciales. Dans le domaine de la vente d'ailleurs, rares sont désormais celles à ne pas avoir de rémunération variable.
Quant au poids du variable versé en 2009, au titre de l'année précédente, il est généralement en baisse par rapport à celui en 2008, en particulier chez les marketeurs dans leur ensemble.
Parmi les autres critères influençant la rémunération, M æsina a déterminé que la localisation géographique avait un impact sur l'ensemble des fonctions. Ainsi, travailler à Paris et en région parisienne est 5 à 11 % plus rémunérateur que travailler en province (une fourchette plus large qu'en 2008). Par ailleurs, les fonctions de direction à responsabilités internationales ont une rémunération totale supérieure de 3 à 9 % de celle des titulaires occupant la même fonction, mais sans responsabilité internationale. La dimension «groupe» a également une influence positive de l'ordre de 4 % sur les rémunérations globales des fonctions de direction et à responsabilité. Enfin, l'appartenance au comité de direction, à fonction équivalente, engendre une rémunération globale supérieure de 12 % à celle des non-membres.
+ 2,8 %
C'est l'augmentation de rémunération globale enregistrée par le chef de produit junior entre 2008 et 2009, soit la meilleure performance des fonctions marketing.
Le secteur Commerce-Distribution se distingue
De nouveau rassemblés, les secteurs Pharmacie-Hygiène-Cosmétique se révèlent une nouvelle fois les meilleurs payeurs du marché au niveau des fonctions marketing. Pour ces métiers, «les niveaux sont, cette année encore, largement supérieurs à ceux de l'Agroalimentaire», indique Mæsina. Il est vrai que ce secteur rassemble de grands groupes, très rentables, payant bien des titulaires pour lesquels, note également le cabinet, «ils montrent un niveau d'exigence largement au-dessus de la moyenne». Chez les commerciaux, les trois fonctions hiérarchiques les plus élevées sont également mieux reconnues que la moyenne. Quant à l'Agroalimentaire, secteur où le marketing est roi, qu'il soit orienté consommateurs ou distributeurs, il est pénalisé par les sociétés moyennes ou petites qui constituent l'échantillon et viennent diminuer la rémunération moyenne. Cela explique, par exemple, que le directeur marketing dans ce secteur se situe qu'à un peu plus de 1 % au-dessus de la moyenne tous secteurs.
L'étude 2009 confirme une tendance lourde ressentie nettement depuis deux ans, à savoir la pénétration de plus en plus importante du marketing au sein du B to B, et notamment du marketing client, ce qui a pour conséquence la valorisation des rémunérations. Ainsi, dans le secteur des Produits intermédiaires (produits vendus aux entreprises tels que les produits chimiques, emballages...), le marketing est, cette année, plutôt mieux payé que la moyenne avec des niveaux de 4 à 10 % supérieurs et rivalise même parfois avec la Pharmacie-Hygiène-Cosmétique. En revanche, les ingénieurs sont toujours mieux payés que les hommes de marketing dans le secteur Métallurgie - Electronique - Industries connexes ou dans celui de la Construction.
Si le Tourisme-Loisirs et les autres Services non financiers sont très nettement en dessous de la moyenne, il est un secteur qui se distingue : celui du Commerce et de la Distribution où le marketing enregistre des niveaux nettement supérieurs à la moyenne. «Ce qui est d'autant plus vrai pour le marketing direct ou le marketing sur Internet valorisés par ce circuit», relèvent les auteurs de l'étude.
Cette nouvelle version de l'étude Mæsina-Hewitt fait, comme de coutume, un point sur les rémunérations européennes de fonctions significatives, portant cette année sur six pays. Elle en conclut que «les grandes différences restent les mêmes. L'Allemagne est toujours au-dessus du lot, suivie par le Royaume-Uni qui, pourtant, voit son poids relatif considérablement diminuer du fait de la baisse de la livre sterling par rapport à l'euro». La «supériorité» de ces deux pays est particulièrement nette en ce qui concerne les postes de dirigeants (directeur marketing ventes et, dans une moindre mesure, directeur marketing et commercial). Cependant, en 2009, la Belgique et l'Italie gagnent du terrain, surtout pour le directeur marketing. Pour les postes de managers, les rémunérations apparaissent plus homogènes ; l'Allemagne conservant néanmoins son avance. «La fluidité des mouvements entre pays reste limitée, constate l'étude. Car les disparités en matières sociales et fiscales ainsi que la barrière de la langue restent des obstacles importants.»
@ Fotolia/Imageteam/LD
Quant à 2010, les prévisions des DRH étaient, en juin dernier, de l'ordre de 2,5 % d'augmentation moyenne, soit une estimation prudente. Ce qui n'est pas particulièrement surprenant...
Méthodologie
La 30e étude «Salaires Marketing & Vente» de Mæsina International Search, réalisée en partenariat avec Hewitt Associates depuis dix-neuf ans, a été menée au printemps 2009 sur la base des déclarations des responsables des ressources humaines de 138 groupes représentant 151 entreprises, sur 8 secteurs d'activité, regroupant 2 031 dirigeants, managers et responsables. Elle passe au crible 18 fonctions représentatives dont 8 marketing, 9 commerciales et un service clients. Elle détaille tous les éléments de la rémunération : fixe, variable, participation, intéressement, voitures de fonction... La «rémunération globale» correspond au brut annuel 2009 pour le salaire fixe auquel s'ajoutent les rémunérations variables effectivement touchées au titre de l'année 2008 par les titulaires, à l'exception de la participation légale. Marketing Magazine propose ici une sélection de fonctions et de secteurs ; l'ensemble de l'étude étant disponible auprès de Mæsina International Search.