Retail: l'animation ne connaît pas la crise
L'animation commerciale se porte bien en France. Le métier n'est pas neuf mais il a de l'avenir. Ce marketing expérientiel est très lié à l'actualité et les marques l'affectionnent.
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Sophie Dahan (Globe Groupe): « 2012 est moins anxiogène que 2008. »
Enfin une bonne nouvelle. L'animation commerciale a le vent en poupe. « Plus la crise s'installe, plus les consommateurs vont en magasin et plus les marques se rapprochent d'eux », explique Christophe Ravelet, directeur de l'agence Strada Marketing. La part du budget médias a fondu dans les investissements marketing, au profit de l'opérationnel. « Le discours des marques est aujourd'hui moins anxiogène qu'en 2008 et l'animation reste une valeur sûre. Le bénéfice marque est immédiat », souligne Sophie Dahan, directrice marketing de Globe Groupe. La pulsion d'achat est encore très souvent déclenchée en magasin. Sept décisions d'achat sur dix sont, en effet, prises en rayon. Et les ventes sont en moyenne multipliées par 1, 6
Le magasin est toujours un marqueur social fort. Bien observer les gens en rayon, c'est déjà mieux comprendre la société. Christophe Ravelet remarque que « ce qui marche à la télé marchera en magasin ». Ainsi, on voit déferler des animations où les consommateurs participent en mettant la main à la pâte. Partout, on trouve des ateliers de cuisine avec des chefs (comme Carrefour Market et Globe Groupe, avec les «coachs du goût» lors de la semaine du goût), qui prodiguent conseils et astuces.
L'important, c'est de participer
De même, la marque Bonne Maman, pour appuyer sa présence récente sur le segment des desserts ultra-frais, a installé de vraies cuisines dans les allées des centres commerciaux (Strada Marketing). De même, Vahiné propose des animations visant à promouvoir ses préparations pour gâteau. « On monte en gamme sur le contenu des animations, continue Eric Popot. Les clients sont très informés, aujourd'hui. Ils veulent du coaching de qualité. Ils ne sont pas dupes de la finalité de l'opération, mais ils veulent être respectés et apprendre quelque chose. » C'est aujourd'hui considéré comme un vrai service... compris dans le prix de vente.
Même processus pour la folie de la déco, du bricolage et du jardinage dans les médias. Partout, on trouve des démonstrations par des professionnels ; de véritables cours où l'on s'inscrit à l'avance et qui affichent complet. Si le BHV de la rue de Rivoli a été le précurseur, avec ses célèbres cours de bricolage, Leroy Merlin ou Castorama proposent des temps pour apprendre à faire soi-même. Le secteur de la beauté verse souvent dans ce que les professionnels nomment la «vente conseil permanente» (VCP), c'est-à-dire des salariés des agences d'animation qui travaillent d'une manière régulière et récurrente in store. Ainsi, Monoprix, avec ses conseillères beautés a créé un rendez-vous avec ses clients. Dans un petit «coin» tranquille, une pro donne des conseils, peut maquiller aussi, et oriente (ou non) vers des marques partenaires. Les spécialistes comme Sephora rivalisent d'imagination pour capter l'attention.
Coller à l'actualité
L'expérience beauté se fait de plus en plus technologique. Ioma, marque de soins, offre gratuitement un diagnostic de peau grâce à un outil présent habituellement chez les dermatologues, baptisé la Sphère. Jean-Michel Karam, fondateur et p-dg d'Ioma, explique: « En 2011, Ioma a réalisé quasiment 1 300 journées d'animation dans les réseaux Beauty Success et Marionnaud. En général, l'animation dure trois jours dans un magasin donné. Le chiffre d'affaires hebdomadaire est multiplié par 3 à 3,5 dans le magasin où a lieu l'animation ». Mais faire participer, c'est aussi recruter des animateurs impliqués, et les réseaux sociaux sont un vivier pour cela. Ainsi, Le Petit Marseillais a recruté, pour ses opérations, des ambassadrices via Facebook.
Etre en phase avec son temps et composer avec une consommation en baisse (- 0,5 % en 2011), c'est aussi doser prudemment ses prises de parole «pour ne pas risquer de trop en faire», car le client sanctionnera d'une manière ou d'une autre les marques aux initiatives bling-bling. Il ne veut pas être réenchanté, mais compris et soutenu... Les animations se font ainsi plus sociales. Trocs, échanges et vide-dressings, par exemple, envahissent les lieux commerciaux. Le dernier exemple concerne les «Dressing Party» dans les centres commerciaux d'Unibail Rodamco ce printemps, au Forum des Halles, à Paris, aux Quatre Temps, à la Défense, à Vélizy 2 et à la Part-Dieu, à Lyon. Les vêtements déposés sont estimés et mis en vente. Leurs propriétaires pourront, à la fin de la «Party», recevoir leur gain ou reprendre les invendus. Un atelier de customisation et un espace de don sont aussi proposés. Une borne de recyclage au profit de la coopérative Le Relais, d'Emmaüs France, récoltera l'ensemble de ces dons. Cette «Dressing Party» est coorganisée en partenariat avec Hippie Chic, agence de ventes privées. Décathlon, avec son historique Trocathlon, avait ouvert la voie.
Eric Popot (Circular France) « Les clients ne sont pas dupes mais ils veulent être respectés et apprendre quelque chose. »
La Halle aux Vêtements propose aussi, depuis deux ans, un système d'échange (toujours avec Emmaüs). Le client apporte les vêtements dont il ne se sert plus et gagne des bons d'achat. Des opérations spécifiques, liées à l'actualité forte de 2012 (élections, J.O.), se développent. On peut citer l'exemple de La Vache qui rit présidente, avec son programme électoral «Veautez!». Elle fera campagne dans une centaine de points de vente en avril (voir Décryptage). Que ce soit dans l'alimentaire ou dans d'autres secteurs, l'animation a toujours la cote.