Réseaux sociaux et stratégies de marque
Avec la crise, les marques ont l'opportunité de nouer ou renouer le dialogue avec leurs clients. Cette année, l'espace privilégié pour les conversations entre marques et consommateurs est celui des réseaux sociaux. A partir de ce postulat, professionnels et directeurs marketing digital ont échangé leurs points de vue, le 18 mai, à l'occasion d'une conférence organisée par Marketing Magazine, en préambule de la soirée des Trophées. Les notions fondamentales ont été rappelées pour assurer des bases solides au débat. L'importance prise par Facebook semble être, pour de nombreuses marques, le point de départ d'une prise de conscience irréversible. Elles ne peuvent plus faire l'impasse sur ces nouveaux supports de communication. Leur utilisation s'est généralisée et leurs intérêts touchent désormais tous les départements d'une entreprise: marketing, vente, service client, conception, développement de produits, etc. Il convient donc à chaque marque de construire un plan de développement spécifique et unique, avec la possibilité d'y intégrer les réseaux sociaux. L'emploi de ces plateformes doit se faire dans une logique globale, pour parfaitement s'intégrer dans la stratégie de la marque et servir des objectifs précis.
Stratégie intégrée et multicanal
Il existe une multitude de réseaux sociaux: les «trombinoscopes» (type Facebook et Copains d'avant), les plateformes pour échanger des contenus (YouTube et Dailymotion pour les vidéos, Flickr pour les photos), Twitter pour partager, en temps réel, des bribes d'information (140 caractères maximum)... Chacun a ses spécificités, un public type et des exigences singulières. Pour les marques (et les agences), l'art consiste à identifier les réseaux les mieux adaptés à leurs cibles et à leurs objectifs.
Ainsi, lorsque Philips souhaite promouvoir ses téléviseurs, mettre en avant son potentiel d'immersion, la qualité d'image et de son, et sa technologie Ambilight unique, la marque choisit YouTube pour monter une opération de grande envergure. Philips lance, en effet, un concours proposant aux réalisateurs en herbe de soumettre leur travail à Ridley Scott, l'un des réalisateurs les plus célèbres au monde. Intitulé «Tell it your Way», ce concours permettra au gagnant de remporter un séjour dans les locaux de la Ridley Scott Associates de Los Angeles, New York, Londres ou Hong Kong. Les participants peuvent s'inscrire sur le canal officiel Philips Cinéma de YouTube, avant le 8 août 2010, minuit. Les productions seront examinées lors de trois sessions, notamment le vote du public via YouTube. En alliant brand content et marketing participatif sur les réseaux sociaux, cette opération permet à la marque d'entrer en relation avec ses consommateurs de façon pertinente et pérenne. Philips fait figure de précurseur en la matière. Une section «Assistance» a même été intégrée au site pour servir de point de contact avec le service client. Les acheteurs sont d'ailleurs encouragés à déballer leurs acquisitions Philips devant une caméra, pour l'appréciation de tous.
Ces initiatives, auxquelles on peut ajouter de nombreux liens constructifs avec la communauté des blogueurs, reflètent les valeurs mêmes de la marque: proximité et praticité. Elles illustrent également l'idée selon laquelle la relation opportune à construire avec le consommateur repose sur la mise en place d'une expérience interactive.
Les réseaux sociaux au service du consommateur
D'autres marques comme Coca-Cola, la plus populaire sur Facebook (5,5 millions de fans au niveau mondial), ont su s'en remettre à leurs meilleurs représentants: les consommateurs. Deux d'entre eux ont pris l'initiative de créer une page Facebook, laquelle a vite été récupérée par la marque. Coca-Cola a proposé aux deux fondateurs de gérer le projet, et a réussi à maintenir un espace dédié aux fans, dépourvu de message corporate et offrant un contenu organique et original. En France, la marque s'est également alliée à Skyrock (plateforme de blogs préférée des jeunes), pour lancer un réseau social d'entraide baptisé Kohop (pour cooptation) ciblant les 12-19 ans. Le principe est simple, les internautes qui souhaitent proposer ou participer à des actions de soutien dans divers domaines (humanitaire, sport, culture, etc.) peuvent entrer en contact par l'intermédiaire de ce réseau. Même si l'offre et les leviers de motivation ne sont pas encore bien définis, cette initiative a le mérite d'offrir la possibilité aux jeunes de s'engager ou d'entreprendre dans des sphères qui leur plaisent. De son côté, Pages Jaunes devient tout aussi populaire. Connue dans la plupart des pays, et disposant de l'une des applications iPhone les plus téléchargées, la marque a décidé de ne pas «s'encombrer» de Facebook. Elle reste concentrée sur son site, ouvert depuis février 2010 aux avis des internautes sur les professionnels. En laissant des commentaires pour chaque prestataire de services, les consommateurs enrichissent la base de données et affinent leurs choix. L'interactivité reste toutefois limitée, les échanges et discussions ne sont pas légion et le «réseau» Pages Jaunes devient plus commercial que social.
Une plateforme de solidarité
Certaines marques, que l'on pourrait penser moins en affinité avec leur public, ont su bâtir de véritables plateformes d'échange permettant une discussion permanente entre elles et leurs clients. Tel est le cas de la Bred Banque Populaire qui fut l'une des premières banques à lancer son site, en 1995 ; et à proposer à ses clients un espace dédié en ligne pour consulter leurs comptes, effectuer leurs opérations au quotidien...
Plus récemment, elle a présenté Bred Solidaire, un projet de plateforme opérationnelle en septembre prochain. Ce site sera consacré aux sociétaires de la banque. Sa mission: soutenir leurs activités locales et permettre à d'autres «clients actionnaires» de participer à ces projets. Un moyen, pour la banque, d'expliquer ses activités régionales et sociales au quotidien. Cette relation de proximité permet à la Bred de mieux comprendre ses clients et leurs habitudes pour mieux construire la banque de demain. La quantité d'information client dont elle bénéficie est utilisée pour établir divers scoring et profiling et ainsi proposer, par exemple, des cartes de crédit cobrandées ou affinitaires plus ciblées.
L'utilisation, l'analyse, l'exploitation et la revente des données issues des réseaux sociaux préoccupent les consommateurs comme les responsables marketing. Formidables outils, ces données permettent de développer de nouveaux produits ou services, mais peuvent aussi être utilisées par des marques peu scrupuleuses et prêtes à s'enrichir sur la simple monétisation des données clients en leur possession. L'utilisation des réseaux sociaux par les marques est donc très hétérogène. Leurs apports et enjeux étant aussi larges que les différents types de plateformes disponibles. Quoi qu'il en soit, ces outils devenus indispensables sont au coeur des stratégies de communication.