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Publicite exterieure. Mass média, jusqu'à quand ?

L'affichage essaie de s'adapter à la nouvelle manière qu'ont les Français de consommer les médias sous l'impulsion de l'évolution des technologies et des supports de diffusion. Un chantier abordé toutefois prudemment.

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L'histoire ne dit pas si le procédé a hypnotisé les passants mais il marque une nouvelle étape dans l'évolution de la publicité extérieure. Le 7 septembre dernier et durant une semaine, JCDecaux a, en effet, donné la possibilité de découvrir de manière originale les images et la musique du film publicitaire d'Hypnose, le nouveau parfum féminin de Lancôme. Le groupe avait pour cela équipé cinq Mupis, sélectionnés aux points les plus fréquentés de l'avenue des Champs-Elysées, de puces interactives qui permettaient de télé­charger, sur tous les téléphones mobiles équipés d'une liaison infrarouge, le spot et des images du film. Cette opération, conçue par l'agence Air, qui allie le téléchargement de l'image et du son, est une première en matière de mobilier urbain. « L'abribus communicant est, en effet, une technologie nouvelle complexe qui demande d'être bien verrouillée, note Albert Asseraf, directeur stratégie, études et marketing de JCDecaux France. On sort là du mass média pour entrer dans une logique de ciblage dont les enseignements seront importants pour l'avenir. »

Viacom élargit son offre interactive

L'opération Lancôme n'est cependant pas la première publicité inter­active menée en France par ­l'affichage. Le véritable déclencheur d'une réflexion sur le sujet est Viacom Outdoor, premier inter­venant du marché à avoir signé une campagne totalement interactive en mars dernier. Elle était réalisée pour le compte d'Emi Music France et Virgin Music à l'occasion de la sortie du nouvel album du groupe de musique électronique Daft Punk. “Ce téléviseur est inter­actif” prévenaient les affiches installées sur les onze dispositifs 2 m2 et 8 m2 répartis sur Paris et le site de La Défense. Chacun était équipé d'un tag délivrant du contenu exclusif pour téléphone mobile ou PDA (Palm Pilot, Pocket PC). Il suffisait alors de pointer le mobile vers les affiches pour recevoir trois types de contenus : un logo, une sonnerie mobile et un lien vers un site wap dédié à l'album. Cette opération était orchestrée par l'agence de communication Blackberry, qui représente en France la technologie britannique d'Hypertag, une nouvelle façon d'accéder à de l'information et du contenu sur son téléphone mobile depuis une source “passive” au départ telle qu'une affiche, une PLV, etc. Selon Viacom, plus de 2 300 personnes ont joué le jeu en téléchargeant du contenu, les niveaux de connexion variant fortement selon les panneaux, de 64 à 512 connexions par site en une semaine. « Ce résultat est très bon, estime Alain Dolium, directeur du marketing de Viacom Outdoor France, car les “bonnes” campagnes réalisées par Hypertag en Angleterre affichent un résultat moyen de 100 - 150 connexions par semaine. Cette opération a remporté plus qu'un succès d'estime sachant toutefois qu'il est difficile d'en mesurer aujourd'hui les résultats commerciaux. Nous sommes en train de commencer à travailler sur des mesures d'audience active. » La campagne interactive de Daft Punk reposait sur un dispositif qui utilisait la technologie infrarouge permettant de toucher plus de 70 % des terminaux mobiles et PDA. En 2006, Viacom Outdoor a prévu d'aller plus loin, en proposant de nouvelles solutions de panneaux interactifs, capitalisant sur les différentes techno­logies équipant les terminaux infrarouges mais aussi bluetooth. « C'est une technologie qui permet de mettre les marques en avant de meilleure façon en permettant des téléchargements de contenus plus importants, par plusieurs personnes en même temps et qui ne cannibalise pas la création du fait qu'il n'est plus nécessaire de coller son mobile à 50 cm de l'affiche », explique Alain Dolium. Baptisée tout simplement Viacom Interactive, cette offre concerne à la fois les panneaux 4 x 3 et le mobilier urbain. Et elle s'insère dans la stratégie d'offres de faces allouées à la carte, développée par Viacom depuis 2004. Après la radio, la télévision, Internet, c'est ainsi au tour de la publicité extérieure d'affirmer sa volonté de s'associer au développement des nouvelles technologies qui permettent une interaction avec les consommateurs. « Cela va dans le sens du contexte actuel où les clients attendent que l'on développe une relation de proximité avec leurs consommateurs, estime Benoît Régent, responsable des études chez Carat Affichage. Viacom prend là une longueur d'avance en jouant également sur l'intérêt du 2 en 1 média et hors-médias. » Mais ce dernier d'ajouter : « Le danger serait, en revanche, de demander à l'affichage de sortir de sa fonction en lui demandant de prouver son efficacité par un nombre de téléchargements. Ce n'est pas Internet, c'est un mass média pour lequel c'est d'abord l'exposition au message publicitaire qui compte. » Chacun s'accorde également pour reconnaître que ces nouveaux outils publicitaires demandent une adaptation de la part du piéton français qui découvre ce que son homologue britannique, par exemple, connaît déjà. « L'environnement est a priori favorable dans le sens où on s'adresse à quelqu'un qui peut profiter pleinement de l'interactivité du message qu'on lui délivre, le piéton au téléphone n'ayant pas à craindre le gendarme comme l'automobiliste, sourit François de Chaillé, directeur de la communication d'Insert. Mais si nous travaillons sur des projets de matériels qui peuvent être supports de technologies embarquées, nous restons prudents car il ne faut vraiment pas se tromper de technologie. » « On entre clairement dans l'ère de l'homme numérique qui modifie ses comportements notamment en fonction de sa mobilité », déclare de son côté Albert Asseraf.

Viser les hypermobiles

Pour mieux coller à cette évolution, JCDecaux a d'ailleurs signé cet été un accord avec Chronos pour étudier de plus près le thème de la mobilité, cher à la société de Bruno Marzlof. Le groupe a également souscrit cette année à l'étude Simm sur la chronomobilité que TNS Media Intelligence réalise en collaboration avec le même Chronos. « La scène des médias se transforme à grande vitesse et c'est sans doute du côté de la mobilité qu'il faut se tourner pour comprendre cette mutation, analyse Christine Bitsch, directeur du Pôle Etudes Média de TNS Media Intelligence. L'intensification de la mobilité déplacement redistribue les cartes et les médias extérieurs se voient crédités d'une légitimité accentuée. » D'après cette dernière, 50 % des hypermobiles sont “fortement” et “très fortement” exposés à l'affichage, contre un quart des faibles mobiles. Et d'ajouter : « Cela donne la mesure des possibilités offertes aux opérateurs des médias de la rue et des lieux publics, notamment avec les possibilités offertes par les interactivités prodiguées par les médias électroniques, et par les dialogues qui s'ouvrent avec les affiches et les mobiliers urbains communicants. » Avant la campagne totalement interactive Hypnose de Lancôme, JCDecaux avait déjà misé en juin dernier sur le développement d'une relation privilégiée au bon moment et au bon endroit via son outil de Télé pilotage du Mobilier à Distance (TMD). Le groupe permettait aux Franciliens de découvrir TV Orange Intense, la nouvelle offre de TV sur mobile de l'opérateur, via une opération de communication extérieure qui alliait street marketing et mobilier urbain. Son système exclusif de programmation des affiches permettait, à des tranches horaires prédéfinies, de donner des rendez-vous aux passants pour voir, en direct, des émissions de télévision au pied des mobiliers installés sur des sites en affinité avec la cible.

L'affichage transport dans l'expectative

Si la rue peut être envisagée comme un terrain d'expression d'une campagne de publicité extérieure interactive, cela devrait être encore plus vrai pour l'affichage dans les transports. Or, on n'en est clairement pas encore là. « Dans le métro, par exemple, non seulement le réseau d'écrans plasma sur les quais mériterait d'être plus dense mais on pourrait imaginer un système d'écrans à l'intérieur des wagons même, à côté du plan des lignes », avance Benoît Régent. « On peut effectivement penser que le métro est un lieu privilégié mais je ne suis pas certaine que les annonceurs soient encore mûrs pour cela, répond Danielle Cassan, directrice du marketing de Metrobus. Celle-ci n'en réfléchit pas moins à l'installation d'écrans dans les rames, « pas forcément interactifs » ou encore à l'utilisation du pass, « de plus en plus appelé à remplacer les titres de transport et qui pourrait être utilisé pour envoyer des messages à des cibles précises ». Côté transports, l'utilisation de l'aéroport n'en est encore qu'à l'état de projets expérimentaux, et ce alors que le lieu est totalement équipé pour recevoir l'ensemble des technologies. JCDecaux Airport n'a à ce jour effectué qu'un seul test à Nice, permettant de télécharger des informations sur son mobile à partir d'un mobilier. Les 130 AEO, média télévisé de proximité, qui consacrent 25 % du temps d'antenne à la publicité n'ont pas non plus été utilisés dans ce sens. « AEO est effectivement un média interactif à lui seul car il permet de diffuser de l'information en temps réel, il est équipé Mpeg et bluetooth mais, même si on aimerait sincèrement le faire, il n'a pas encore été testé dans ce sens, regrette Sandrine Mettetal, directrice du marketing de JCDecaux Airport. Il faut à la fois attendre que les usagers le maîtrisent bien et que le marché soit suffisamment arrivé à maturation pour initier le mouvement. » Et d'ajouter  : « Plus que l'interactivité au sens technologique du terme, nous mettons en avant les notions de dialogue, d'échange qu'impliquent les opérations réalisées sous forme de podiums, tests produits, questionnaires, etc. ». Qu'il s'agisse de transports ou de publicité extérieure, le groupe Clear Channel est, pour l'instant, le plus discret en matière d'affichage interactif. « Nous avons des choses dans les cartons en matière de technologie bluethooth, dit Etienne Reignoux directeur du marketing et de la stratégie de Clear Channel France. Mais si la profession et le marché s'organisent pour aller dans cette direction, l'environnement ne nous semble pas assez structuré compte tenu de la nature du média. »

Interactivité par les sens

Pour se démarquer et se faire remarquer, la publicité extérieure peut également faire interagir marque et consommateur par les sens. Premier à avoir utilisé le réseau d'affichage olfactif mis en place dans les gares de Paris et RER par Clear Channel il y a trois ans avec H pour Homme, LaScad a recommencé l'expérience avant l'été. La division grand public du groupe L'Oréal a, cette fois, proposé aux voyageurs de découvrir l'odeur fruitée et gourmande de sa nouvelle douche - crème Dop parfumée à la cerise, via les diffuseurs de senteurs mis au point par Prolitec pour le groupe. Le dispositif d'affichage était complété par 183 4 x 3 suspendus dans les six grandes gares de Paris et 10 gares de province et 1 795 faces 2 m2 (Réseau “Destination Cadres” implanté dans 115 gares, dont 35 en Ile-de-France). Autre support, mais même stratégie. En juin toujours, c'est le Crédit Agricole Alpes Provence qui avait choisi de véhiculer son image par une communication olfactive pour soutenir l'opération commerciale “Les jours en fleur”. L'organisme bancaire a fait appel à Carlogo qui a fait circuler, durant près d'une semaine, dans le Sud de la France, quatre “Cocci­nelles” non seulement fleuries aux couleurs de la banque mais aussi diffusant des senteurs de fleurs.

Ce qu'en pensent les annonceurs…

Meetic, première campagne d'affichage réalisée cet été avec Clear Channel et déclinée sur les Smart de Liberty Drive.

L'avis de Cécile Moulard, directrice marketing Europe. « L'idée d'interactivité nous intéresse évidemment, d'abord car elle est induite dans notre activité même et aussi car nous avons notamment Meetic Mobile. Tout ce qui va permettre de faciliter l'accès au site Meetic, je prends. Il faut savoir que l'écrasante majorité de notre commu­nication est on line, car la plus proche possible de notre cible marketing, étant donné que nous sommes dans une activité récente que les gens ne connaissent pas encore très bien. On ne sort du on line que pour de bonnes raisons, en souhaitant plus acheter des écrins que des écrans, quel que soit le média. C'est le cas quand nous nous associons à des émissions comme Bachelor ou Mon incroyable Fiancé, en totale légitimité avec la marque. C'était également le cas avec notre première campagne d'affichage sur le thème “Cet été, vous allez aimer”, déclinée sur des formats de 6 m2 et 12 m2, difficiles à ne pas voir. »

Dim, utilisateur historique de l'affichage.

En campagne JCDecaux et Metrobus à partir du 4 octobre. L'avis de Adeline Desjonquères, directrice du marketing. « En 2004, nous avions testé avec JCDecaux un système de mini-transistor embarqué en abribus qui diffusait les notes de la musique Dim. La difficulté était d'émerger dans le bruit ambiant de la rue, de donner envie de fredonner sans pour autant être intrusif. Nous avons mis ce test en stand by à la fois parce que le système n'était pas tout à fait au point et parce que c'était l'époque où la publicité lingerie en affichage faisait polémique. Le système n'était pas interactif mais on s'était posé la question qu'il le soit via un méca­nisme que les gens activeraient en marchant ou en appuyant sur un bouton. L'idée de faire interagir les consommateurs nous semblait intéressante. C'est quelque chose qui nous trotte encore dans la tête, sachant que ces notes de musique sont l'ADN de Dim. Nous l'avons d'ailleurs fait télécharger comme sonnerie de portable lors d'une opération promotionnelle. »

Sony Ericsson, annonceur plurimédia, en affichage avec SFR à la rentrée.

L'avis de Alexandra de Chazeaux, directrice de la communication. « L'affichage interactif nous intéresse énormément par les possibilités qu'il offre de montrer les appli­ca­tions de nos produits. Mais il faudrait qu'il puisse être développé de manière plus massive, dans les cinq plus grandes villes de France, par exemple. Même chose pour les écrans plasma, même si le coût est encore énorme, on pourrait faire beaucoup de choses avec nos applications photo, par exemple. Globalement, notre stratégie est très plurimédia, avec une grosse partie des inves­tissements dépensés en TV car il fallait d'abord installer la marque qui, si elle avait des parents célèbres, n'était pas connue en tant que telle à sa création il y a trois ans. »

Clear Channel planche sur l'efficacité du média

Le 4 octobre 2005, ce n'est pas sur le thème de l'interactivité mais sur celui de l'efficacité que Clear Channel a choisi de réunir le marché. Le groupe va, en effet, à la fois dévoiler les résultats de l'étude des premières mesures d'efficacité sur les ventes du média publicité extérieure et annoncer la mise en place d'un outil d'analyse récurrente des performances du média, baptisé Clear Channel Monitor. « L'affichage restait le seul média à ne pas proposer de mesure d'efficacité de ses campagnes à cause de contraintes propres qui rendaient difficiles les méthodologies employées par les autres médias », indique Etienne Reignoux, directeur du marketing et de la stratégie de Clear Channel France. D'après ce dernier, « des approches type MarketingScan posent le problème de la repré­sentativité nationale d'un plan d'affichage sur une agglomération, tandis que dans les cas d'utilisation de panels consommateurs, la rapidité de construction de la couverture d'un réseau rend difficile le découpage du panel en consommateurs faiblement et fortement exposés. » Pour lever ces contraintes, le groupe a travaillé depuis un an sur une quarantaine de campagnes en collaboration avec Carat Média Marketing à partir des données HomeScan Média d'ACNielsen, MarketingScan. Puis il a développé un indice d'exposition publicitaire avec Solis Conseil qui a élaboré la méthodologie d'analyse d'efficacité des ventes des produits Malls et abordé les problématiques de mobilité avec Simaris. Conclusion avancée : 37 % de progression moyenne des ventes grâce au média.

Lena Rose

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