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Projection vers le futur

Lors de la biennale internationale du design de Saint-Etienne, des entreprises ont dévoilé quelques produits concepts issus de leur département de design avancé. L'occasion de lever le voile sur une démarche de plus en plus prisée et sur ce qui nous attend dans le futur...

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Des tatouages qui se dessinent au gré des émotions, bne voiture dont la u carrosserie s'étire et se gonfle pour chercher le meilleur aérodynamisme, des vêtements intelligents qui corrigent nos faux mouvements... Ces produits font rêver. Mais ils n'existent encore que dans l'imagination des designers ou sous la forme de prototypes. Et ne seront jamais commercialisés tels quels. Issus du design prospectif, ce sont des outils stratégiques destinés à inspirer les produits futurs, mais à long terme. En la matière, le Néerlandais Philips fait figure de précurseur. Depuis 1999, le «design probes» est ainsi chargé de traquer les tendances futures - dans les domaines politique, économique, culturel, environnemental et des nouvelles technologies - qui impacteront nos comportements en 2020 et, éventuellement, de créer des prototypes d'objets correspondants. D'autres, comme Electrolux avec son concours Design Lab ouvert aux étudiants, font appel à des designers extérieurs «pour sortir des sentiers battus et montrer que l'entreprise est aux avant-postes en matière de design». La démarche est aujourd'hui adoptée par un nombre croissant d'entreprises, à l'image du fabriquant d'interrupteurs Legrand. «Les designers de l'entreprise consacrent désormais 15% de leur temps à cette réflexion sans objectif de productivité et nous travaillons également avec des designers extérieurs qui nous permettent de sortir de notre territoire de confort», explique ainsi Pierre-Yves Panis, directeur du Studio design. Un investissement rentable et un élément- clé de la compétitivité selon lui. «Ce travail d'anticipation a de multiples vertus, poursuit-il. Il permet aux designers d'enrichir l'opérationnel d'une vision à plus long terme, de nourrir la réflexion et l'innovation en interne, d'envisager toutes les pistes d'avenir aux niveaux techno logique, économique ou sociologique et bien sûr de communiquer sur le savoir-faire de l'entreprise et tester le consommateur.» Reste un problème à régler: gérer la frustration générée par ces produits concepts dévoilés au public mais jamais commercialisés.

Un consommateur responsabilisé

La technologie est utilisée à la fois pour réduire la consommation d'énergie ou de matière mais aussi pour nous en faire prendre conscience. Ainsi EDF, avec l'aide de designers externes, réfléchit à rendre visible l énergie dépensée par l'utilisation de nos appareils électriques, que ce soit par une prise lumineuse qui change de couleur en fonction de la consommation ou une horloge indiquant les kWh utilisés en temps réel (watt'time). Nokia, lui, s'interroge sur l'impact environnemental du renouvellement frénétique des téléphones portables, toujours dépassés par l'arrivée de nouvelles technologies. Son concept «wears in, not out» est donc un téléphone évolutif qui permet aux utilisateurs de mettre à jour leur mobile sans le remplacer.

Un homme augmenté

- Mieux affronter son environnement grâce à son propre corps. Karim Zaoui (ENSCI) imagine ainsi une ligne de vêtements de sport munis de détecteurs qui envoient au sportif une impulsion électrique, afin qu'il corrige ses mauvaises positions. Plus audacieux, le Royal Collège of Art conçoit des équipements d'organes tels des embouts nasaux pour améliorer notre perception altérée au fil du temps. Quand l'architecte Philippe Rahm nous propose une eau de fraîcheur (à boire) ou une crème de chaleur (à étaler)... Enfin, le département design probes de Philips cherche à transformer le corps avec des tatouages électroniques qui se modifient en fonction des émotions ou du toucher.

Un citoyen autonomisé

- Emporter son énergie avec soi pour pouvoir recharger ses appareils numériques et éclairer ses balades nocturnes (Plateform de?> Positiveflow) ou transporter ses aliments dans une mini glacière fonctionnant à l'énergie cinétique (e-bag d'Apore Püspöki)... les nanotechnologies nomadisent à l'extrême les objets pour nous offrir toujours plus de liberté. Une liberté dans l'espace mais aussi dans notre sociabilité comme nous le montre toute une série d'objets réalisés pour garder son intimité et son autonomie même lorsque l'on vit en colocation. A l'image des frigos (Flatshare et go fresh) à compartiments multiples primés par le design lab d'Electrolux qui récompense des projets d'étudiants.

Un malade assisté

- Si le domaine médical et les services à la personne suscitent déjà l'intérêt des marques, ils seront amenés à se développer bien davantage dans le futur. Carlin International s'interroge sur la question du lit médicalisé «comme territoire de vie à construire pour la personne contrainte à l'alitement». Sachant que près d'un 1,3 million de personnes seront touchées par la maladie d'Alzheimer en 2020, le réseau Méotis a lancé un appel à projets auprès d'étudiants en design. Ces derniers ont imaginé des boussoles permettant un retour facilité du malade chez lui, une série d'objets conçus comme des points de repères spatiotemporels ou encore un robot qui apprend la personnalité et le mode de vie du malade pour lui apporter une aide au quotidien.

Béatrice HERAUD

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