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PQN: des titres en mouvement

La Croix vient de rééditer, avec l'institut Scenarii, son étude qualitative sur les Unes des titres de la presse quotidienne nationale (PQN). Qui révèle des changements de positionnements. Synthèse des résultats en exclusivité pour Marketing Magazine.

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La deuxième édition de Pétude La Croix Scenarii est consultable sur www. emarketing. fr/PQN 2007

Quels sont les territoires de traitement de l'information occupés par les titres de la presse quotidienne nationale (PQN)? Telle était la question à laquelle le quotidien La Croix a voulu répondre en 2006. «Nous avions envie de sortir de l'univers quanti qui domine les études médias, raconte Michel Montagnier, directeur de la publicité de La Croix. Chacun des titres de la PQN a sa personnalité et nous avons cherché à établir leur ADN, à savoir, à travers le type d'information délivrée, quel était leur contrat de lecture.» Pour ce faire, La Croix a travaillé avec Scenarii-Research, un institut d'études qualitatives choisi, notamment, parce qu'il n'avait pas d'expérience du secteur de la presse et pouvait ainsi apporter un regard neuf. «Nous avons considéré, en premier niveau, explique Fabrice Krzeminski, directeur associé du cabinet, la Une des titres comme un packaging, qui émet des signaux, tout comme un produit dans un linéaire. En un instant, la Une doit exprimer l'essence du titre. Elle traduit la relation au lecteur et à l'information. Puis, en second niveau, nous avons étudié les contenus de ces Unes.» C'est donc sur ces packagings que s est effectuée une analyse sémiologique. L'étude des différentes combinaisons de signes et de sens a abouti en 2006 à la création d'une carte formée par quatre grands territoires de traitement de l'information sur lesquels chaque titre occupait une place spécifique, avec une coloration propre (voir tableau «Les quatre territoires de la PQN»).

Dans un objectif barométrique, La Croix a décidé de renouveler cette étude en 2007, pour mettre en valeur les évolutions des titres. Avec un échantillon élargi, Matin Plus, Direct Soir et France Soir, qui ne paraissaient pas lors de la première observation, venant s'ajouter aux huit titres précédents. Il était donc intéressant de voir leur place ainsi que leur influence éventuelle sur les positionnements observés en 2006. Tout comme lors de la première édition - réalisée lors du débat sur CPE - cette nouvelle étude s'est déroulée pendant une période riche en informations, à savoir l'élection présidentielle. «Lors de telles périodes, les titres sont obligés de radicaliser leur approche afin d'émerger, estime Fabrice Krzeminski. Un même sujet ne va pas être traité de la même manière

Les nouveaux totems de la PQN

@ Source: Etude PQN 2007. La Croix - Scenarii-Research

Les nouveaux totems de la PQN

Un nouveau rapport à l'émotion

En 2006, le territoire le plus occupé était celui de «Partager» avec pas moins de cinq titres sur huit: Aujourd'hui, Métro, 20 minutes, Libération et La Croix 'Actualité», sachant que ce dernier occupe un double positionnement de par ses deux types de Unes («Actualité» et «Perspectives»). L'Humanité occupait, seul, celui du «Protéger», tandis que Le Figaro, Le Monde et La Croix «Perspectives» étaient dans le domaine «Orienter».

En 2007, c'est sur le territoire du «Partager», où se situent aussi France Soir, Direct Soir et Matin Plus, que sont observées les évolutions les plus marquantes. «On constate, décrypte Fabrice Krzeminski, que l'émotion est amenée à jouer un rôle fondamental dans l'univers de la PQN. Une nouvelle logique apparaît, avec l'irruption du langage télévisuel dans la presse.» Ce recours à l'émotion peut prendre des voies différentes, telles que celles de l'«évasion» pour Direct Soir, de T'urgence« pour Matin Plus ou de»l'identification au lecteur«pour France Soir. Apparaît donc un type de Une, la Une»atmosphère«, qui donne un rôle-clé à l'offre d'émotion par une saturation visuelle, destinée à donner une forte valeur émotionnelle, et des partis pris forts par rapport à l'actualité dominante. D'où une nouvelle relation, à la fois à l'information et au lecteur. Si, en 2006, le territoire du»Partager«combinait à la fois émotion et faire savoir, on assiste en 2007 à une scission entre ces deux notions. Le savoir faire fait l'objet d'un recentrage de la part des acteurs de 2006, à l'exception d'Aujourd'hui qui se situe à la charnière, avec pour positionnement le «penser comme vous». Parallèlement, certains titres glissent vers les codes de leur voisin. Métro, qui s'est recentré sur l'actualité, se rapproche du territoire occupe auparavant par 20 minutes qui, lui, se rapproche, en découvrant la connivence, de celui de Libé qui est arrivé à la frontière du «Rallier», jusqu'ici inoccupé. «Ce titre, constate Fabrice Krzeminski, a perdu un peu de la connivence qu 'il entretenait avec le lecteur, pour se situer dans une démarche de défense d'un système de valeursL'Humanité, Le Figaro et Le Monde, titres «institutionnels», sont restés, quant à eux, stables sur leur territoire. Il n'en est pas tout à fait de même pour La Croix qui, tout en pratiquant une alternance équilibrée entre «Partager» et «Orienter», a entamé un repositionnement vers «Orienter» sous l'effet de sa nouvelle maquette et de la tonalité différente de ses titres de Une.

L'étude a enfin observé l'évolution du «totem» de chaque titre, c'est-àdire de la fonction qui lui est attachée (voir tableau p. 64) . A travers ces derniers, apparaît toute la diversité de la PQN. «On se rend compte ainsi de l'extrême richesse de l'offre rédactionnelle de cette presse et de ses différentes expressions», conclut Michel Montagnier.

Méthodologie Observation et analyse des 11 titres de la PQN du 19 avril au 10 mai 2007, soit quelques jours avant et après les deux tours de l'élection présidentielle. Trois titres supplémentaires ont été étudiés par rapport à 2006: Matin Plus, Direct Soir et France Soir, qui ne paraissaient pas lors de la première période d'observation.

FRANCOIS ROUFFIAC

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