Michèle Kerrad
Pour créer de la valeur ajoutée consommateur et nourrir sa stratégie d'innovation et de modernité, Carrefour expérimente avec succès les nouvelles règles du jeu de l'efficient consumer response (ECR). Prouvant ainsi qu'un partenariat de lancement de produit préparé très en amont et conjointement avec un industriel, permet d'optimiser la satisfaction du client tout en dopant la performance économique. Michèle Kerrad, directeur du marketing de l'offre du groupe, lève un pan du voile sur les coulisses d'une opération symptomatique d'une certaine évolution des relations fabricants-distributeurs.
Je m'abonneEn quoi a consisté votre partenariat avec Procter pour le lancement du produit Ariel Tablets ?
Carrefour a toujours attaché
beaucoup d'importance à la valorisation de l'innovation. Introduire de nouveaux
produits, c'est satisfaire les attentes de nos clients, nourrir notre stratégie
d'image au plan de la modernité et du choix, tout en gagnant des parts de
marché et de la rentabilité. Nous poursuivons cet objectif en cherchant en
permanence à optimiser nos méthodes de travail. Aller plus vite, toucher le
plus grand nombre sont nos défis, comme ceux des industriels d'ailleurs. Et
c'est bien là l'origine de notre démarche : rechercher systématiquement la
réussite des lancements majeurs. Le chantier initié avec Procter et Gamble à
propos d'Ariel Tablets s'est inscrit dans ce cadre. Après avoir analysé
l'intérêt de ce lancement en termes économiques, nous avons décidé de gérer la
mise en marché comme un projet commun. Procter et Carrefour ont fait travailler
ensemble les équipes concernées de part et d'autre, les achats, le
développement des ventes, le trade-marketing, la logistique. Et ce, tout au
long du projet et jusque dans les magasins.
Les résultats obtenus ont-ils été à la mesure de vos espérances ?
Nous avons clairement
gagné 5 points de part de marché en valeur sur le segment des lessives en
tablettes et 0,5 point sur le marché des lessives. Par ailleurs, tous les
acteurs de ce marché ont profité de cette progression, à commencer par Procter
et Gamble lui même.
En quoi cela a-t-il modifié votre méthode de travail ?
J'ai envie de dire que cela a modifié les méthodes de
travail de part et d'autre. Nous avons chacun dû oublier le syndrome "on sait
mieux que l'autre ce qui est bon pour lui" et travailler ensemble un projet ad
hoc en capitalisant sur nos savoir-faire respectifs plutôt que d'appliquer des
schémas classiques. Carrefour a poussé la démarche aussi loin que possible dans
bien des domaines : dispositifs de lancement et de communication nationaux et
locaux des deux entreprises, conception commune d'un matériel de balisage du
segment des lessives en tablettes, communication unique et commune de
l'ensemble des équipes du siège impliquées à tous les magasins.
Quelles leçons tirez vous de cette expérience ?
Le
terme à retenir est anticipation. Nous avons été informés du lancement
longtemps à l'avance. C'est fondamental quand on veut réellement mettre en
place un projet transversal de ce type. Cela nous donne du temps. Du temps pour
définir le projet clairement, fixer des objectifs, répartir les rôles. Du temps
pour passer les étapes sans les brûler. Du temps pour bien travailler avec les
magasins et les faire adhérer au projet.
Etes vous prêts à l'étendre ?
Cette expérience a valeur d'exemple et nous a permis
de formaliser une méthode de travail applicable à la gestion de tous les gros
lancements. Nous allons chercher à améliorer encore l'efficacité de nos équipes
sur d'autres projets transversaux. Au fond, il s'agit toujours d'organiser le
bon sens. C'est à la fois plus simple et plus compliqué qu'on ne le croit dans
nos organisations !