Marques et musique recherchent le bon accord
Le marketing sonore occupe une place grandissante dans la stratégie relationnelle des marques. Celles-ci cherchent à transmettre une émotion ou à s'associer à une communauté d'intérêt. Le point sur les pratiques qui jouent sur l'émotionnel.
Je m'abonneLa musique est souvent un élément de l'exécution créative des marques et s'exploite via trois pratiques majeures. Tout d'abord, si la marque veut créer de la connivence avec le consommateur ou si elle veut émerger, elle va s'associer à une musique existante. Par exemple, Numericable a choisi le titre Dance de Justice pour crédibiliser un discours d'innovation et de modernité. Il est alors important de bien veiller en amont que la musique ne cannibalise pas l'offre ou la marque en question. Si la marque opte pour une musique existante «détournée», elle se sert de la puissance et de l'attractivité du thème pour faire passer un message ou une valeur revendiquée. C'est le cas de LCL avec le tube Tout, tout pour ma chérie de Michel Polnareff. Autre pratique: la marque opte pour une musique sur mesure. Autrement dit, elle recherche une reconnaissance d'expression identitaire sur la durée, elle est en quête de notoriété. Et la répétition va permettre de s'ancrer sur le territoire sonore. C'est le choix retenu par les magasins E. Leclerc, Renault ou encore la SNCF. Enfin, troisième voie, certaines marques s'associent à des auteurs, des DJ ou des directeurs artistiques musicaux pour valoriser leur personnalité au sein d'une communauté spécifique. C'est le cas de l'Hôtel Costes, qui a fait appel pour ses disques au compositeur Stéphane Pompougnac, et de Cartier avec sa Love Compilation.
Certaines marques, à l'instar de l'Hôtel Costes, s'associent à des compositeurs pour valoriser leur personnalité au sein d'une communauté spécifique.
Effets de mode
Depuis que la musique est dématérialisée, la consommation musicale a explosé. Ce qui a pour conséquence une intensification des effets de mode dans tous les secteurs de la consommation. Reste qu'il faut faire attention au phénomène de saturation. Evian avec Waterboy, EDF avec les Strokes, Air France avec les Chemical Brothers, Sony Bravia avec José Gonzalez... Ces sons dominants créent à chaque cycle autant de bulles de spéculation sonore où l'engouement pour la mode commence à desservir la singularité d'expression des marques.
Les défilés de mode, souvent précurseurs, utilisent la musique comme support avant que l'industrie du «disque» n'inonde ensuite le secteur communication et médias. C'est aussi le choix des marques qui commencent, elles aussi, à lancer des modes publicitaires: rock électro en 2004, puis folk en 2006 ou new soul en 2008... Cette culture de la consommation du «son» arrive à son apogée lorsqu'un discours de marque reprend des noms d'artistes ou de chansons célèbres pour traduire le langage de marque, comme l'a fait Neuf Télécom.
Dans une ère où la construction d'une relation fondée sur le désir et l'attachement est importante, les marques deviennent conteuses d'histoires et empruntent de plus en plus des références au cinéma, à la télévision, au Web... La musique devient un langage des émotions dont le rôle est de créer plus de connivence et d'intensité. Les marques s'associent ainsi à des styles musicaux ou à des référents culturels, que ce soit pour créer de la proximité comme le font certaines compagnies d'assurances, ou en développant des Lips Dubs (clips tournés par des amateurs, NDLR) dans les entreprises. Peut- être entrons-nous alors dans une culture de l'entertainment. La musique, comme la publicité, est le miroir de notre société. Nous sommes passés d'une écoute à une consommation sans modération. Pour les marques, ce support permet de transmettre une émotion ou de s'identifier à une communauté d'intérêt. Elles vont donc avoir de plus en plus besoin de penser en termes de langage sonore sur le long terme pour pérenniser leurs relations avec le consommateur.
OLIVIER COVO, DIRECTEUR ASSOCIE DE BRANDY SOUND