Luminou ou l'étoffe du héros anti black-out
Le fan club de Grumly, l'ours qui fait des blagues à deux balles, va se réjouir. Son petit cousin Luminou arrive dans les rayons accompagné d'une campagne publicitaire qui n'a pas peur du noir.
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A première vue, Luminou est une gamme de peluches comme il en éclôt chaque
année dans les vitrines de Noël. Sympathique, douce et câline. Mais il ne faut
pas se fier aux premières impressions. De fait, Luminou est une vraie
innovation. Le fruit d'une rencontre. Celle d'un spécialiste du jouet "soft",
en l'occurrence Jemini, et d'un tisseur. Luminou existe parce que la fibre qui
compose l'étoffe des peluches est un matériau dit "intelligent".
Intrinsèquement photoluminescent, il capte la lumière du jour et la restitue en
pleine nuit. Grâce à leurs peluches, les enfants n'auront plus peur dans le
noir. « Les jouets lumineux existent depuis plusieurs années. Ils fonctionnent
soit avec des piles électriques, soit grâce à l'usage d'un colorant dont est
recouvert le tissu. Après plusieurs lavages, l'effet lumineux disparaît avec le
colorant. La technique que nous utilisons est totalement différente et rend
obsolètes les autres systèmes », indique Thierry Bertoux, directeur général de
la société Jemini, qui dispose de l'exclusivité des droits sur ce matériau pour
toute l'Europe. Composée dans un premier temps d'une trentaine de modèles, la
gamme a été imaginée par la cellule développement de l'entreprise et fabriquée
en Orient. « Douze stylistes et designers travaillent dans cette cellule pour
créer, à partir d'une bibliothèque de tissus, les 700 à 800 modèles de peluches
qui chaque année renouvellent les gammes », poursuit Thierry Bertoux. Des
modèles exploités sous les marques de l'entreprise (Jemini, Grumly, Luminou...)
ou sous licences, Fox, Disney, la Fondation Cousteau... Présentée au Salon du
jouet en début d'année, Luminou a convaincu la distribution française et
au-delà les grandes enseignes européennes et notamment les Britanniques. « Au
Royaume-Uni, les peluches ne sont pas réservées aux enfants. Pour répondre à
une invitation nous offrons des fleurs, les Anglais n'hésitent pas à offrir une
peluche », note Thierry Bertoux, en précisant que l'Angleterre est un des
principaux marchés de l'entreprise. Dans l'Hexagone, les premiers symptômes
visibles de ce trouble régressif sont apparus au grand jour en mai dernier,
lorsque Loft Story nous faisait découvrir en direct live la relation quasi
fusionnelle du péroxydé Steevy et son âne Bourriquet. Un état régressif qui
semble toucher bon nombre de pré et post-adolescents, voire même d'adultes,
confer l'explosion du marché des "bonbecs". Et qui pourrait justifier, en
partie, la bonne santé du marché des peluches. « Trois facteurs expliquent le
dynamisme du marché : l'effet peluches électroniques, l'effet collection et
enfin la sortie de la peluche du monde de l'enfance », analyse Thierry
Bertoux.
Les vertus de l'absurde
Cette incursion hors
du monde de l'enfance, Luminou la revendique clairement à travers sa campagne
de communication. Si les peluches sont effectivement destinées aux 0-4 ans, les
films publicitaires qui accompagnent son lancement sont un clin d'oeil appuyé à
leurs parents. Et au fan club de son cousin Grumly, l'ours en peluche lancé en
1999 par le même Jemini et son agence conseil Enjoy Scher Lafarge. « Compte
tenu du budget d'achat d'espace dont nous disposions pour le lancement de
Grumly, entre 100 000 et 150 000 francs, nous avons inventé un système de
communication fondé sur la multiplication de spots courts et une création
artistique maline et ludique qui lui a permis d'exister dans les écrans
publicitaires. Aux côtés des jouets mais aussi des voitures ou des lessives.»,
commente Christophe Lafarge. Un système qui a marqué les esprits et suscité bon
nombre de vocations. Pour s'en convaincre, il suffit de surfer sur le Net où
les fans de Grumly font vivre l'esprit de la campagne, via son site officiel
ouvert depuis peu, mais surtout via les pages personnelles. Mais la campagne ne
s'est pas contentée de faire du bruit. « Grumly est l'exemple même d'un
marketing de l'offre. Nous l'avions lancé comme un produit saisonnier visant
les enfants. Deux ans plus tard, et grâce à l'effet de rebond de la campagne
publicitaire, nous en avons vendu quelque 120 000 exemplaires, soit plus que
nos prévisions, auprès d'une cible plus âgée et il est toujours au catalogue »,
indique Thierry Bertoux. Si, pour Luminou, la donne a quelque peu changé - son
budget d'achat d'espace est d'environ deux millions de francs, soit le double
d'un investissement moyen pour ce type de produit -, Enjoy lui applique le même
traitement créatif. Une économie de moyens évidente pour une campagne
joyeusement décalée et absurde, conçue et réalisée par Christophe Caubel,
créatif et réalisateur de la campagne Grumly. « Luminou a un vrai bénéfice à
mettre en avant. Les films le démontrent par l'absurde à travers un effet de
réminiscence », poursuit Christophe Lafarge. Au total une quarantaine de spots
de 20", diffusés sur TF1 et Télétoon, font donc la preuve que, contrairement à
l'escalope de veau, aux cyclistes dans la nuit ou à l'homme invisible, Luminou
dans le noir, on peut le voir, le tout sur un ton emprunté à la fois à la
minute de Monsieur Cyclopède de Pierre Desproges et à Claude Piéplu nous
commentant les tribulations des Shadoks. Bref, c'est idiot et hilarant et ça
fait du bien au potache qui sommeille en chacun de nous.