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Les noms sur Internet, pour une révolution annoncée

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Le moins que l'on puisse dire, c'est que la configuration de la création de noms sur Internet a complètement changé, que ces figures du changement ne font que commencer et augurent des mutations à venir. Les créateurs de noms devront utiliser toute leur imagination pour anticiper, s'adapter, jouer l'opportunité, bref, évoluer fortement dans leur métier et pas toujours du côté de la créativité ! Comme cabinet à la fois de création de noms, d'études auprès des consommateurs et d'observations des évolutions sociétales, des questions s'imposent sur l'évolution de la profession conjointe avec celle des exigences de la nouvelle économie. Cette dernière a pour impératifs la rapidité, la distinction et, paradoxe, l'inscription dans la durée. Sur Internet, il faut aller vite, pour préempter un site et un territoire linguistique qui doit très rapidement "parler de lui-même" et s'inscrire à terme dans le paysage encombré des signifiants de la Toile... et dans le cerveau des consommateurs. Ce qui veut dire un minimum de fidélisation et de durée de vie du site. Parce qu'un nom de site est aussi immatériel qu'un nom de marque, sauf que la marque est soutenue par la matérialité d'un produit et d'un service qui lui donne une corporéité et donc une mémoire affective. D'autant plus que l'infidélité - le "butinage" - sur Internet est le miroir d'un média qui a basé sa "philosophie" sur le concept de liberté, ce qui pour les dépôts de noms veut dire anarchie et "jungle"... Oui, il faut effectivement débroussailler beaucoup pour s'imposer et se munir de belles armes pour se défendre. Mais cette profusion de noms de sites oblige aujourd'hui à établir un certain nombre de règles, même si celles-ci sont encore floues et pas toujours appliquées, et à faire évoluer nos métiers. Les voies de dépôts des noms de domaines qui s'ouvriront demain, notamment les alternatives au .com (.biz, .info, .pro, .coop, .museum, .aero...), l'arrivée des accents sur les noms, l'écriture non latine (en japonais, cyrillique, chinois), offriront des opportunités de dépôt pour les PME qui ne pourront accéder au .com et, plus généralement, des possibilités de segmentation et de "positionnement" des noms de sites sous un "dot" plutôt qu'un autre. C'est là aussi où nous devrons exercer la polyvalence de nos prestations, en étoffant la panoplie de nos outils, non seulement dans le juridique et la négociation, mais également dans le conseil marketing. En effet, des questions nouvelles pourront se poser, comme de savoir, par exemple, s'il faut privilégier, pour un secteur donné et pour plus de reconnaissance, le .fr au .biz, ce qui veut dire choisir dans quel "imaginaire de dot" on souhaitera s'inscrire pour, inciter, guider la recherche des navigateurs ou tout simplement se démarquer. Ce qui frappe aujourd'hui, quand on consulte les quelques milliers de noms de sites/domaines récemment déposés, c'est qu'il n'y a plus de tendances ni de modes en création pure de noms, alors qu'il y a encore un ou deux ans, nous pouvions évoquer encore des axes structurants (mythologie, descriptivité, etc.) et les justifier. Toutes les compositions lexicales se côtoient parce que le nombre invraisemblable de noms déposés aujourd'hui oblige à des astuces, créatives ou pas, à l'assemblage et à une phraséologie plus ou moins heureuse, qui curieusement prend du sens à l'énonciation verbale. Comme si l'écriture et sa syntaxe - sa construction, ses règles et son histoire - allaient céder le pas à la phonétique dans une juxtaposition aléatoire, symptôme en soi de l'éphémère. Nous devrons donc apprendre les distorsions de langage moins créatives qu'opportunistes. Mais gageons qu'il reste encore, enfouis dans le trésor des langues et des textes qui sont à découvrir, des mots qui feront des noms éphémères ou durables, marqueurs signifiants du monde virtuel.

Danielle Rapoport

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