Les médias en pleine mutation
«D'ici deux ans, une révolution va avoir lieu dans l'univers des médias.» C'est la conviction de Guillaume Multrier, directeur général d'Aegis Media, pour qui nous allons observer une mutation d'un média éditorial à un média plateforme, à l'instar de ce qui se produit dans le secteur musical . «La star n'est plus le média, mais le contenu», précise-t-il. De fait, les radios musicales affichent une nette diminution de leur audience. La part d'audience des programmes musicaux des stations musicales nationales étant passée de 36,4% en avril-juin 2007 à 33% pour la même période en 2009, selon Médiamétrie. La mission des radios musicales se voit fortement concurrencée. D'autant que, maintenant, il est très facile d'écouter un titre sur son ordinateur ou sur son mobile. «Cela change profondément la manière de consommer ce média», explique le directeur général d'Aegis Media. Le caractère de recommandation et de conseil de la radio se voit en outre supplanter par les recommandations d'amis sur Facebook notamment, et par la découverte de nouveaux artistes sur des sites comme Deezer ou MySpace. Ce qui fait dire à Guillaume Multrier que nous sommes dans un monde «délinéarisé», à la fois social et convergent. Or, ce qui est à l'oeuvre dans l'univers des radios musicales, et de la musique en général, pourrait bien contaminer les autres médias. A l'instar de la vidéo notamment. Avec la télévision à la demande, la possibilité offerte aux téléspectateurs de suivre une émission quand ils le souhaitent et où ils le souhaitent, avec l'apparition d'offres comme M6 Replay sur le Web engrangeant plus de 1,2 million de visiteurs uniques (source: Médiamétrie//NetRatings-août 2009) et TF1 Player sur iPhone, la télévision est en pleine mue. Ainsi, 38% des internautes déclarent avoir vu une émission TV sur Internet après sa diffusion. Le téléspectateur, au lieu de sélectionner une chaîne, choisit une émission.
Du contenu de qualité à la demande
Il n'y aura donc bientôt plus une bataille entre chaînes, mais une bataille des contenus. Les chaînes ne joueront plus le rôle de programmateurs, mais de sélectionneurs. Les formats publicitaires seront à revoir en fonction du contenu et non d'une tranche horaire ou d'une chaîne. Et il en ira de même dans le domaine de la presse écrite. Reste que, pour le moment, à part Google News, site généré par ordinateur proposant des articles de presse tirés de plus de 500 sources d'actualités, la place demeure vacante.
Pourquoi ne pas imaginer un partenariat entre plusieurs titres pour concevoir une plateforme de la presse francophone? C'est ce que préconise Guillaume Multrier. Car la chasse au contenu est bel et bien ouverte. C'est d'ailleurs ce que recherchent téléspectateurs, auditeurs, lecteurs et internautes.
Il suffit d'observer ce qui se passe à l'étranger pour s'en persuader. Ainsi, aux Etats- Unis, Hulu, créé en mars 2007, propose du contenu vidéo disponible en tout lieu, à toute heure et sous n'importe quelle forme, que ce soient des films, des séries TV, des émissions ou des clips. Preuve que la formule plaît, les recettes publicitaires d'Hulu devraient dépasser celles de YouTube cette année, selon une étude de Screen Digest! Par ailleurs, le contenu proposé par des marques pourrait bien constituer une autre piste d'évolution. A condition toutefois que la marque crée du contenu de qualité, et qu'elle le diffuse sur un carrefour d'audience, à l'instar de Yahoo! ou MSN. C'est ce qu'ont entrepris E. Leclerc et Yahoo! avec la chaîne Ecotidien. Il en va de même pour le partenariat entre PPR et le film «Home» visible sur YouTube. Transmettre un contenu de qualité au plus grand nombre, en tout lieu et à tout moment, voici bien le défi de demain. Et même d'aujourd'hui!
Guillaume Multrier (Aegis Media)
«La star n'est plus le média, mats le contenu».