Le gender marketing, une affaire de génération
Le gender marketing envahira-t-il nos linéaires? Les lancements de produits et de services se sont, en tout cas, multipliés ces dernières années. A l'instar des yaourts pour femmes ou des sodas pour hommes.
Je m'abonneDésormais, des bénéfices au packaging, tout est pensé dans une perspective «sexuelle» ou «gendered» comme disent les Anglo-Saxons. Du bleu ou du noir pour les hommes, du rose bonbon ou du fluo pour les femmes... Tous les secteurs sont concernés et l'univers des services n'est pas en reste: cartes bancaires, téléphones... Packard Bell vient même de lancer des ordinateurs dédiés spécifiquement à un public féminin.
Le gender marketing est donc aujourd'hui une réalité pour les marketeurs. Mais est-ce une mode ou une tendance durable? Pour le savoir, il faut revenir aux consommateurs. La dernière enquête réalisée par Ipsos Marketing pour Marketing Magazine en mars 2008 auprès d'un échantillon représentatif de 500 personnes interrogées on line permet de mieux comprendre leurs attentes à ce sujet.
A première vue, les consommateurs ne montrent pas un énorme enthousiasme face aux produits ou services destinés spécifiquement aux hommes ou aux femmes. En effet, 60% d'entre eux pensent que ces produits ou services ne répondent pas à de vrais besoins aujourd'hui. Pourtant, à y regarder de plus près, ce premier constat doit être nuancé. On ne peut être que frappé par les différences de points de vue entre les classes d'âge. 48% des moins de 35 ans pensent ainsi que ces produits répondent à de «vrais besoins» contre 32% seulement chez leurs aînés. Cet écart important témoigne d'un clivage générationnel sur cette question.
@ ©Ginaellen/Fotolia
Qu'il s'agisse de produits ou de services, tous les secteurs sont concernés par le gender marketing.
Une question de génération
De fait, parmi les 20% de consommateurs déclarant avoir déjà acheté ce type de produits ou de services, 66% ont moins de 35 ans! Ce chiffre ne doit pas nous étonner car il correspond aussi aux cibles visées par la majorité des produits du gender marketing. Ainsi, Coca Zero cible-t-il les hommes de 16-24 ans. Les femmes, du moins pour l'instant, sont plus acheteuses (22%) que les hommes (18%). Mais l'avenir nous réserve peut-être des surprises... Les hommes se déclarent en effet plus souvent ouverts à ce style de produit.
Parmi les 80% de consommateurs qui n'ont pas encore acheté ce type de produits ou de services, 29% se disent «intéressés». Ce chiffre non négligeable devrait en conforter certains dans leurs stratégies.
Que recherchent les acheteurs de ces produits issus du gender marketing? Il ne s'agit en aucune façon d'une consommation idéologique. L'aspect identitaire est très peu prisé. Seulement 17% disent acheter ces produits pour affirmer leur masculinité ou leur féminité. C'est de mode de vie qu'il est surtout question. Ainsi, 52% de ceux qui en ont déjà acheté considèrent que ces produits leur offrent des avantages «adaptés à leur style de vie et de consommation».
Fait révélateur. Les jeunes hommes sont actuellement les plus enthousiastes. Ce sont eux qui valorisent l'originalité de ces produits (31% vs. 22%) ainsi que leur conformité à leur style de vie. Aujourd'hui, les lancements semblent surtout s'être concentrés sur les femmes. Or les hommes sont de plus en plus concernés par les problématiques de bien-être, d'apparence et de santé. Et les plus jeunes d'entre eux sont ouverts à de nouvelles propositions originales. Un champ à explorer pour l'avenir...
Rémy Oudghiri, directeur du planning stratégique et de la prospective, Ipsos Marketing