La presse TV championne de l'audience
Près de 39 millions de Français lisent au moins un magazine TV, soit près de 82 % de la population. Un score de lectorat qui en fait le magazine familial par excellence. Nourrie de la télévision, la presse TV cherche cependant à se poser comme une alternative publicitaire pour étendre son portefeuille aux gros annonceurs du petit écran.
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Elle fait un peu partie des meubles, au même titre que le poste de
télévision dont elle est inséparable. Mais un meuble qui bouge, car la presse
TV est depuis pas mal d'années en constante évolution tant dans son contenu que
dans ses ventes. Comme le résume Pascale Lévêque, directrice d'études chez
Interdeco Expert, « avec 17 millions d'exemplaires par semaine contre 11
millions en 1998, on peut dire que c'est une famille de presse qui se porte
bien. On y enregistre de nombreuses créations et très peu de disparitions car
elle est constituée de gros titres, à la fois bien installés et qui évoluent
régulièrement. » Les derniers résultats d'audience de la presse magazine,
livrés par l'AEPM, confirment cette tendance. On y constate notamment que sur
les six hebdomadaires qui peuvent se féliciter de compter plus de 6 millions de
lecteurs, hormis Femme Actuelle, cinq appartiennent à l'univers de la presse
TV. TV Magazine, Télé 7 Jours, Télé Z, Télé Loisirs et Télé Star peuvent se
targuer de figurer dans le top 6 des hebdomadaires ayant plus de 3 millions de
lecteurs hommes et plus de 3 millions de lectrices. Télé Star disparaît au
profit de Télérama dans la catégorie "plus de 1,4 million de lecteurs dans les
foyers AB+". Les plus lus, ils sont aussi les plus repris en main par leurs
lecteurs réguliers ou occasionnels : neuf fois en moyenne contre 4,5 fois pour
l'ensemble des magazines. Autant de chiffres qui prouvent, s'il en était
besoin, la proximité et le côté familial de cette famille de presse magazine.
UN UNIVERS HÉTÉROGÈNE
Selon Simm 2000, le programme TV
est plébiscité à 55 % comme le premier centre d'intérêt de la presse magazine.
Ce choix des lecteurs a d'ailleurs déclenché des vocations dans nombre de
titres d'univers très différents, de Télé Obs au city magazine Zurban tout
récemment. « On trouve effectivement des grilles télé un peu partout dans des
titres qui viennent nous chatouiller sur notre terrain, mais on est là dans des
comportements de lecture différents et une stratégie qui est surtout faite pour
fidéliser les lecteurs », estime Jean-Pierre Adejes, directeur d'édition de
Télé Star et Télé Poche. A l'intérieur de la famille presse télé elle-même,
règne déjà la plus grande hétérogénéité, et ce sur un univers de concurrence
très serré. Peu de rapports, en effet, entre des généralistes type Télé 7 Jours
ou Télé Loisirs, des guides type Télé Z, des spécialistes comme Télé Câble
Satellite et Télé KZ ou des suppléments de PQR comme TV Magazine et TV Hebdo.
Sans parler de Télérama, cousin éloigné qui, en dépit de son nom, se refuse à
appartenir à la famille. « La diffusion des titres généralistes a subi pendant
deux ans l'expansion des zones d'implantation des suppléments de la PQR mais on
arrive à la fin de ce phénomène d'expansion, analyse Jean-Pierre Adejes.
L'explosion du nombre de chaînes est le second facteur qui a modifié la donne
en nous lançant tous dans une course à l'augmentation de la pagination
programme au détriment de la partie magazine. Mais on arrive là aussi à la fin
d'un cycle. » Concernant les suppléments, la boucle est en quelque sorte
bouclée depuis la rentrée avec la couverture de l'Ile-de-France via l'offre de
TV Hebdo dans Le Parisien du vendredi. Journaux gratuits ou magazines à part
entière, le débat continue de diviser. « Nos titres ne sont pas des gratuits.
Tous les quotidiens répercutent le prix facial, même de façon minimale,
s'insurge Bruno Desjeux, directeur général de Socprint en charge de la
commercialisation de TV Magazine. Tout le monde développe ce concept
aujourd'hui, en presse TV , mais aussi féminine ou autres. Et je ne comprends
pas le débat qui consiste à dire que ces titres ne jouent pas pleinement leur
rôle. » Carole Fagot, directrice déléguée d'Emap Media, note, de son côté, que
« les suppléments sont également puissants mais ont un taux de reprise en main
moindre que la presse TV payante. » Et de se baser sur l'étude interne "Lecture
et dynamique familiale" qui précise que, vendu en kiosque le lundi pour des
programmes qui débutent à la fin de la semaine, le magazine TV est lu dès le
premier jour et ce durant douze jours alors que les suppléments vivent sept
jours à partir du premier jour de début des programmes.
DES MAGAZINES PLUS MAGAZINES
« On se bat sur un petit marché, on
s'espionne tous beaucoup pour essayer d'être les premiers sur une actualité que
tout le monde partage », explique Jean-Pierre Adejes. Cette concurrence serrée
entraîne une évolution rédactionnelle régulière depuis quelques années vers un
axe plus magazine. A cet égard, Télé Loisirs continue de se poser parmi les
plus réactifs du marché. Une stratégie qui lui réussit car, même si son
audience marque légèrement le pas, le titre de Prisma Presse peut se targuer
d'être en positif sur toutes les cibles depuis trois ans. « Télé 7 Jours a
toujours été un journal magazine mais avait un peu perdu cette spécificité au
profit d'un 100 % télé, reconnaît Patrick Mahé, directeur de la rédaction de
l'hebdomadaire. C'est pourquoi nous avons lancé un chantier, il y a trois ans,
pour reprendre le terrain perdu dans tout ce qui est pratique et loisirs. »
Cela s'est traduit par une consolidation de la partie Art de Vivre via un
cahier final délimité par un sommaire spécifique et d'un travail sur l'image
toujours en cours. « Télé 7 Jours est un peu ressenti comme une institution et
il fallait dépoussiérer son image, interpeller pour dire "ce n'est plus le
journal de votre grand-mère", explique Christine Lenoir, directrice de
publication. Nous voulions également capitaliser sur le fait que Télé 7 Jours
est plus qu'un magazine télé mais une véritable marque. » Une stratégie qui
s'est traduite par une campagne de publicité décalée au cinéma, pour toucher
les plus jeunes, et sous forme de sponsoring de séries "culte" diffusées sur le
câble comme "Sex in the City". Le titre développe aussi une série d'actions de
proximité via des opérations ciblées région par région. « On reste sur les
mêmes rails de travail de proximité tant sur le plan éditorial que promotionnel
car il faut du temps. Télé 7 Jours est un gros porte-avion à qui on ne peut pas
faire réaliser de virage à 180° », ajoute Christine Lenoir. Pas de virage
radical non plus du côté de Télé Star. « On reconstruit la ligne éditoriale en
marchant, depuis douze à dix-huit mois, raconte Jean-Pierre Adejes. Pas
question d'envisager une nouvelle formule qui peut séduire de nouveaux entrants
mais décevoir les anciens lecteurs. » Et d'ajouter « 30 % des lecteurs de la
presse TV ne lisent que ce seul magazine, et s'il n'y a pas forcément à s'en
glorifier, cela implique une véritable attente d'informations générales et
pratiques. » Télé Poche, l'autre titre d'Emap, qui s'est déjà recentré sur les
juniors, depuis deux ans, est lui aussi appeler à évoluer.
MAIS D'ABORD DES MAGAZINES DE SERVICE
Cette évolution vers le magazine
ne doit cependant pas faire oublier à la presse TV sa fonction de service. Une
fonction qui rapporte, si on en juge par le succès de Télé Z avec son petit
format et ses grilles sèches en noir et blanc. Chez Télé 7 Jours on en reste
conscient. L'hebdomadaire offre, depuis le printemps dernier, une place accrue
aux programmes des chaînes hertziennes et propose une double d'avant programme
autour des rendez-vous forts de la journée. Le développement du paysage du
câble et du satellite a globalement amené les titres à augmenter leurs grilles
de programmes, et donc leur pagination. Télé Z, par exemple, propose les
programmes de 90 chaînes. Les résultats de MédiacabSat, qui montrent que 20
chaînes représentent 53 % de l'audience, auront-ils un effet sur la politique
de la presse TV ? « Cela pourrait donner lieu à des aménagements chez nous, ou
chez nos concurrents, mais il est un peu tôt pour le dire », commente Pascale
Lévêque. « A Télé 7 Jours, nous avons dès le départ choisi de ne pas nous
rendre prisonniers de ce système en nous en tenant aux cinquante chaînes qui
marchent le mieux, explique Patrick Mahé. C'est cinquante pour l'instant, mais
ce n'est pas évident que cela dure éternellement car s'il y a effectivement un
bouquet de chaînes, dans tout bouquet, il y a des épines. » Pour l'heure, il
semble qu'il soit urgent d'attendre. Une politique qui devrait encore se
compliquer avec l'arrivée du numérique terrestre.