La beauté en quête de nouvelles marques
Septembre 2000, LVMH prend une participation majoritaire dans la jeune
société de cosmétiques américaine Fresh. Novembre 2000, L'Oréal noue une
alliance stratégique avec la société japonaise Shu Uemara. Rares sont les
grands groupes du luxe et de la beauté à avoir résisté à la stratégie de
sur-segmentation via des rachats de marques émergentes, voire totalement
confidentielles il y a encore quelques années. Ces rachats, par les "grands
mondiaux", impliquent une nouvelle lecture du marché de la beauté. Face au
développement de ces marques qui, du jour au lendemain, sont propulsées au
niveau international et à l'arrivée en force des distributeurs, entre autres
anglo-saxons, on peut légitimement s'interroger sur l'avenir des marques
installées. Longtemps cantonné à l'hygiène, avec notamment les gammes plus
sophistiquées des distributeurs anglais (Boots, Superdurg, Tesco et
Sainsbury's), le développement de marques propres investit aujourd'hui les
marchés privilégiés du sélectif, tels que le soin et le maquillage. Après
Sephora, l'enseigne européenne de parfumeries Douglas a enrichi, il y a
quelques mois, sa gamme de soins visage Douglas Beauty System avec une offre
corps ancrée dans la polysensorialité. Malgré un packaging peu valorisant, les
produits sont très en phase avec les tendances créées par les leaders du marché
: brume veloutée pour le corps au bénéfice relaxant ou encore pastilles
effervescentes pour le bain à base d'huile essentielle. Quant au distributeur
américain Sears, il développe une offre spécifique pour les peaux ménopausées
avec M Balance, une gamme de soins visage, particulièrement sophistiquée,
contenant 14 produits, dont notamment un nouveau type de soin pour femmes, le
"Heat Relief Cooling Stick", un stick rafraîchissant anti-bouffées de chaleur,
autant dire une approche plutôt innovante sur le marché des seniors. Les
distributeurs étrangers sont donc particulièrement actifs en termes de
développement produits, et sont de plus en plus nombreux à créer des marques
exclusives, dont le lien avec l'enseigne devient invisible pour le
consommateur. En témoigne la marque Sonia Kashuk, développée exclusivement par
l'américain Target, concurrent de K-Mart et Wal-Mart. Maquilleuse de stars et
autres top models, cette Américaine a conçu une gamme entière de maquillage
professionnel, à l'image de l'offre de MAC ou encore Bobbi Brown, qui devient
aujourd'hui un véritable outil de valorisation de l'enseigne. Cette nouvelle
marque de maquillage, qui, au travers d'une véritable caution professionnelle
possède ainsi une forte identité, bénéficie également d'un très fort soutien
publicitaire dans la presse, la positionnant comme marque à part entière. Ainsi
"Sonia Kashuk Professional Makeup" est vendue exclusivement chez Target, tout
comme les nouveautés Clinique sont en exclusivité chez Saks Fith Avenue...
Quand le textile et l'alimentaire se mêlent de la beauté...
Après le parfum Victoria's Secret, distributeur
américain de lingerie, l'enseigne Banana Republic, qui proposait déjà du
parfum, investit aujourd'hui le marché du soin avec Skin Nutrients, une gamme
de sept produits pour le corps, qui sera présente d'ici mi-2001 dans 150 points
de vente aux Etats-Unis. Aujourd'hui, les produits de beauté permettent aux
intervenants du textile d'offrir une réponse globale aux besoins de la femme.
Et les marques du luxe ne sont pas en reste, le meilleur exemple étant la gamme
de soins Prada comprenant des produits unidoses vendus pour un traitement d'un
mois, pour la modique somme de $100. Ou quand la crème de soin devient
accessoire de mode, et remplace le célèbre sac de la marque ! Que dire de
l'arrivée des soins Evian en GMS ? Nouvel intervenant majeur, certes, offre
produits intéressante, certes, mais surtout nouvelle réponse en matière de soin
pour les femmes, véhiculée par la force de la marque Evian.
Vers un développement de nouveaux services ?
Sur un marché de la beauté de
plus en plus encombré en nombre de marques, qui deviennent de plus en plus
généralistes, quelle stratégie de différenciation faut-il adopter ? Au-delà de
l'extension de l'offre produits, qui peut aller jusqu'à l'infini avec les
risques que cela représente, la marque ne pourrait-elle pas se concentrer sur
l'extension de son métier, en développant de nouveaux services pour les
consommateurs ? Encore émergente, cette stratégie a notamment été appliquée par
le groupe Unilever avec myhome.co.uk, service de nettoyage à domicile utilisant
les produits des marques du groupe, ou encore avec l'ouverture d'un
barbier/coiffeur à l'enseigne Lynx, en plein coeur de Londres. Ou quand
l'industriel redevient artisan.