L'insight est un faux débat
L'insight est réclamé depuis plusieurs années comme une évolution nécessaire des études au service du marketing, pour aider ce dernier à générer des transformations au sein de l'entreprise.
Certes, les directeurs d'études sont désormais des insight managers, et en institut, la capacité de conseil doit constituer un standard. Comment peut-on tendre vers l'insight alors que l'enseignement en marketing continue à prôner les «4P» des années soixante (produit, prix, promotion, place) et que l'expression «chefs de produits» continue à évoquer l'ancien paradigme du marketing, centré sur l'utilité du produit et la promotion de bénéfices?
L'appel vers l'insight correspond à une nouvelle ère du paradigme de la valeur. Selon le modèle économique néoclassique, la valeur était ancrée dans l'échange entre produits et prix, elle était régie par l'utilité. Le marketing inventait des fonctions, qui apportaient une valeur ajoutée au produit. Puis la valeur s'est orientée sur l'usage et les produits n'étaient plus seulement vendus pour leurs attributs, mais pour leurs bénéfices. Il fallait satisfaire les clients. Progressivement, le transactionnel évoluait vers le relationnel, qui a pris de l'ampleur: nous sommes rentrés dans l'économie des services. La valeur se définit désormais en fonction de la nature et de l'intensité de la relation entre la marque et le consommateur.
Et maintenant? Nous sommes passés à une économie de réseau. Le marketing se fait toujours l'avocat du consommateur, mais il recherche les meilleurs moyens de créer de la valeur en collaboration avec les clients, ainsi qu'avec les «stakeholders». Une belle opportunité pour le marketing de devenir acteur de la stratégie de l'entreprise et pourquoi pas, de sortir de sa fonction isolée dans l'organisation, afin de tendre vers une pratique managériale globale, fondamentale pour relier la valeur consommateur et la valeur de l'entreprise, au bénéfice des «stakeholders».
Marketing de réseau
C'est parce que les pratiques managériales du marketing doivent changer qu'elles ont besoin de l'insight de la recherche marketing. En d'autres termes, sans engager ni expliciter le changement du marketing, forcer l'insight études est stérile. Trois grands registres de pratiques doivent changer au niveau du marketing et des études. - Le marketing avait besoin d'analyses de marché? Il doit capter une information plus sensible sur l'expérience des «stakeholders», tant institutionnels que liés à la chaîne business. Il analyse les relations au sein du réseau de l'entreprise. Il est également nécessaire qu'il se renouvelle et qu'il challenge les briefs pour progresser. Une étude «baromètre, notoriété, image» est obsolète lorsqu'elle n'étudie pas les relations entre les «stakeholders» et la marque et qu'elle mesure l'image sans la satisfaction, alors que l'expérience d'achat constitue la symbiose des deux. Autre exemple: le nouveau marketing a besoin d'études shopper en adéquation avec l'environnement ouvert du «point d'achat» et ne peut se limiter au cadre fermé et utilitariste du «point de vente».
- Le marketing devait «implémenter» son plan d'action? Il a maintenant pour mission d'aider à cocréer avec les clients, fournisseurs, communautés, distributeurs, fournisseurs de services internet... Il doit travailler l'appropriation au sein du réseau et combattre les résistances culturelles. Plutôt que de «tester» des produits, publicités, etc., la recherche marketing devrait stimuler la cocréation et tester en multicible.
- Le marketing avait une fonction mécanique de contrôle après «implémentation»? Il doit maintenant travailler aussi sur les enseignements tirés de ses échecs et de ses succès. Il doit présenter les analyses et résultats de trackers selon un angle d'enseignement à partir des données multisource.
- Et tout cela, est-ce de l'insight? Peut-être, s'il est associé à une méthode de création de valeur entre le consommateur et l'entreprise, dans un contexte de dialogue, de transparence, de collaboration et de cocréation, en lieu et place du modèle hiérarchique de test et de contrôle. Mais l'insight, ce n'est pas juste «raconter une histoire» autour d'une étude! Au fait, le mot «études» est-il toujours approprié? Probablement pas. Et si l'«insight» était un no man's land, qui témoignait du point d'inflexion d'une discipline de sciences sociales dont l'avenir est d'aider le marketing à devenir le coeur même de la stratégie d'entreprise?
Helen zeitoun (Gfk Custom research): « Le marketing se fait toujours l'avocat du consommateur.»
Helen Zeitoun, directrice France de gfk custom research