Heinz met du local dans son ketchup
Ce pourrait être un cas d'école. L'histoire d'une marque emblématique d'un
marché, qui peu à peu, a pourtant failli perdre pied en moins d'une décennie.
Au début des années 80, Heinz régnait encore en maître absolu sur le ketchup.
C'est alors qu'Amora bouleverse les codes du marché. Le Français, repris en
1999 par Unilever Bestfoods, lance la première bouteille en plastique souple du
marché. Les bases du géant américain vacillent. D'autant que quelques années
plus tard, le même Amora inonde les rayons d'un flacon en forme de bonhomme de
neige. Premier à avoir compris que le ketchup est avant tout le condiment
préféré des enfants, il leur propose un contenant adapté à leur petites mains.
Le succès ne se fait pas attendre. A la fin des années 80, Amora détient 50 %
du marché laissant l'Américain, et ses 25 %, loin derrière lui. « A l'époque la
stratégie marketing et commerciale était orchestrée à partir du siège européen.
Notre bouteille en plastique est apparue trois ans après celle d'Amora »,
commente Cédric Wehry, chef de groupe Heinz France.
Innovations sur tous les fronts
Il faudra donc attendre une redéfinition du
rôle du marketing local pour que la machine se remette en route. C'est chose
faite au début des années 2000. Avec dans un premier temps l'introduction d'une
bouteille petit format, puis le lancement au cours de l'été de P'tits Heinz et
d'une nouvelle bouteille, “tête en bas”, baptisée outre-Atlantique “Heinz Easy
Squeeze”. « Entre 2001 et 2002, nous avons repris 3,9 % de part de marché, nous
dépassons à nouveau les 28 %. Le lancement de P'tits Heinz suivi de celui d'une
nouvelle bouteille équipée d'un bouchon à valve en silicone doivent confirmer
cette dynamique », insiste Cédric Wehry. Imaginée pour le marché français,
P'tits Heinz, c'est d'abord une gamme de quatre produits best-sellers de
l'alimentation des plus jeunes. Toujours prêt et propre Outre le fameux tomato
ketchup, elle offre à leurs papilles, des sauces mayonnaise, tomate pizza et
enfin une spéciale frites. Le tout dans des packagings en forme de bonhomme aux
yeux malicieux, chapeautés d'un bouchon doseur fin. « 75 % du ketchup consommé
en France l'est par les enfants, nous avons donc créé une gamme qui soit en
phase avec cette cible. Mais nous n'avons pas oublié que ce sont les mères qui
achètent », poursuit Cédric Wehry. D'où la présence d'information
nutritionnelle largement développée, notamment en matière d'allergie à
l'arachide. Soutenue par une campagne plurimédia, affichage et télé, la marque
fait l'objet d'un vaste programme promotionnel allant des classiques bons de
réduction à des opérations dans les écoles. « En 2003, nos investissements
publicitaires s'élèvent à 2,5 ME, alors qu'Amora investit entre 3 et 5 millions
d'euros. En télévision, nous serons sur TF1 et M6, essentiellement autour des
programmes enfants », indique CédricWehry. Quant à la nouvelle bouteille au
large bouchon, conçue autour du concept “toujours prêt et propre”, elle répond
aux besoins de praticité exprimés par de nombreux consommateurs, fatigués de
devoir secouer la bouteille pour se servir. Mieux, la valve en silicone, placée
dans le bouchon, empêche les bavures qui collent à la bouteille. Lancée dans un
premier temps aux Etats-Unis, elle y est déjà un best-seller. Amora est
prévenue, Heinz est de retour.