Du produit de consommation au "produit intelligent"
Il n'est pas très éloigné le temps des corvées à la maison, des courses-galères du samedi après-midi, 47 % des Français les jugeant comme telles en 2000. Pour convaincre les consommateurs existants et les nouvelles cibles, les marques doivent être associées au plaisir et non pas seulement à l'efficacité, voire mieux proposer un produit intelligent. Les industriels de l'entretien et de l'hygiène semblent être en première ligne dans cette démarche dont le claim pourrait être : "il travaille, moi pas".
Le produit intelligent ou la réponse naturelle aux nouvelles occasions de
consommation comme aux nouvelles cibles. Déjà évoquée lors d'une précédente
rubrique (voir MM n° 52), les nouveaux modes de vie des consommateurs des pays
développés obligent les industriels à adapter leur offre. De plus, la faiblesse
des taux de croissance des marchés des biens de consommation (produits de
beauté inférieur à 5 %, biscuits autour de 2 %, sources : fabricants)
contraignent les industriels à développer une offre réellement différenciante
: - les consommatrices actuelles veulent transformer une corvée en plaisir ou
une perception de moindre difficulté, - les nouveaux consommateurs (hommes pour
les produits de beauté et d'entretien, femmes pour l'outillage/bricolage,
pré-adolescentes pour le maquillage, seniors pour l'informatique) acceptent ou
sont intéressés à condition que l'offre soit pertinente et facilement
compréhensible. Via une approche dédramatisante (femme en bricolage et homme en
entretien) ou une démarche éducative (seniors en informatique, pré-adolescentes
en maquillage.)
Le produit intelligent : it works, I don't
Les produits d'entretien et d'hygiène ont les premiers perçu
les limites des revendications d'efficacité et de plaisir si le rôle du
consommateur ne changeait pas. Ainsi devenu "consom'acteur", il souhaite se
libérer de tâches ingrates et ennuyeuses. Les leviers utilisés par les
industriels sont à la fois le service (cf. la stratégie du groupe Unilever dans
les divisions entretien et hygiène beauté) et les ingrédients qui sont ici les
plus intéressants car intrinsèques aux produits intelligents. Deux familles
d'ingrédients/formulations émergent : 1- Formulations utilisant - ou boostées
par des éléments naturels - l'énergie disponible dans le foyer :
chaleur-texture-couleur-humidité-eau. A titre d'exemple, il est intéressant de
relever le succès des appareils de remplacement dont l'énergie interne soulage
la main de l'homme. La brosse à dents à pile de Colgate (Actibrush) est ainsi
un succès mondial. En France, il s'en est vendu 1,2 million d'unités en huit
mois, élevant la part de marché de Colgate de 13,6 à 23 % en valeur. La
confirmation des produits à base d'eau, tels que Karcher proposé au grand
public ou Aqua Broom de Cedar (USA) pour projeter de l'eau à haute pression sur
les parties les plus difficiles à atteindre des sols et murs. 2- Eléments
Techniques/Technologiques : actifs intelligents. Le lancement en Afrique du Sud
par Lever de Skip Intelligent Micro Washing Powder formulé à base de Smart
Activ Targetters renvoie à une revendication intéressante : "un choix
automatique pour le meilleur nettoyage". Une limite néanmoins : l'acceptation
du consommateur qui peut refuser des formulations apparaissant comme "trop
magiques".
Le smart produit une nécessité nouvelle
La
démarche ainsi engagée n'est pas exclusive aux produits d'entretien et
d'hygiène, mais corrobore : - les nouveaux équipements sportifs : raquette de
tennis surpuissante (Wilson), skis facilitateurs ou chaussures de course
dynamiques (Nike), - les produits de beauté émergents : les patchs chauffants
de Bioré (Kao) ou les protections solaires de Coppertone à couleur évolutive
pour indiquer les zones du corps non protégées, - les aliments solides ou
liquides : Nescafé offre, par exemple, une canette chauffante pour une
consommation de café dans des lieux et à des moments nouveaux et différents.
Ainsi, tous les produits semblent devoir être tournés service ou être "smart"
pour reprendre la terminologie utilisée par Skip. Alors la première Smart,
voiture de son état, aura peut-être été rétrospectivement le meilleur
annonciateur du mouvement, malgré les critiques qui se sont abattues sur elle
lors de son lancement.