Distribution Affichage radio anticipent 2007
L'enseigne Champion sera-t-elle la première à investir les écrans
publicitaires des herziennes le 1er janvier 2007 ? Première s'être lancée sur
ceux du Paf de complément le 1er janvier 2004, elle était également la première
présente, dès le 31 mars dernier, sur NRJ 12, une des nouvelles chaînes
gratuites de la télévision numérique terreste. Si cette question n'est pas
forcément déjà d'actualité chez Cham-pion, l'approche du jour J commence à
faire réagir le marché publicitaire. Le décret du 7 octobre 2003, qui autorise
une ouverture progressive et partielle des écrans publicitaires TV aux
annonceurs de la distribution, a commencé à devenir réalité depuis l'étape du
1er janvier 2004, date d'ouverture aux chaînes du câble, satellite et chaînes
locales (voir plus loin). Le marché a désormais en ligne de mire la levée de
l'interdiction maintenue jusqu'au 31 décembre 2006 pour les actuelles chaînes
nationales. Une attention d'autant plus forte qu'avec 2,262 milliards d'euros
bruts, soit 12,4 % des investissements publicitaires plurimédia, la
distribution se classe toujours à la première place du marché. Une place
qu'elle conforte d'année en année, sa part de voix ayant encore progressé de
12,8 % en 2004. D'après TNS Media Intelligence, le surplus budgétaire de l'an
dernier, généré tant par les enseignes alimentaires que non alimentaires, a
apporté 257,2 millions d'euros bruts supplémentaires, soit 15,2 % des gains
plurimédia.
Manne en vue pour le petit écran
On
comprend que, du côté des agences médias, on planche déjà depuis quelque temps
pour estimer les retombées sonnantes et trébuchantes de cette éventuelle
nouvelle manne pour le média TV. Chez Carat Expert, par exemple, on estime que
“cette dernière échéance devrait permettre au média TV d'engranger l'année de
l'ouverture entre 400 et 500 millions d'euros supplémentaires, en provenance à
la fois du hors-médias, des autres médias ainsi que d'un surplus de budget lié
à un probable “effet d'engouement”. Conséquences directes, si rien ne devait
changer dans l'offre publicitaire : un risque d'encombrement accru, surtout en
Prime Time, et un risque important d'inflation tarifaire. Si ces estimations
varient encore selon les experts, tout le monde s'accorde, en revanche, pour
affirmer que les distributeurs seront au rendez-vous de 2007. « Plus l'étau va
se desserrer, plus la distribution va intégrer la télévision en réinventant la
façon d'utiliser ce média, estime Xavier Guillon, directeur des études et du
marketing de Comareg/France Antilles, groupe qui réalise notamment l'étude
France Pub. Dans la construction de son mix médias - hors-médias, on constate
déjà que ce secteur se réapproprie l'univers des médias en jouant sur une
palette plus fine.» « Il est évident que les distributeurs iront en télévision,
c'est incontournable, dit, de son côté, Jean-Marc Ohran, Dg de ZenithOptimédia
Territoires. C'est un média qui sait tout faire, de la puissance, du trafic, de
l'image. Ils font de l'affichage et de la radio depuis des années, ils auront
envie d'essayer autre chose. » Une évidence pour beaucoup qui n'est bien
évidemment pas sans inquiéter ces deux médias historiquement investis par la
distribution que sont l'affichage et la radio.
L'affichage consolide ses réseaux
« C'est moins de l'inquiétude qu'une très
grande vigilance dans le sens où il y aura évidemment une évaporation de
chiffre d'affaires du moins au début, répond Vincent Piot, directeur général du
groupe Clear Channel. Nous nous y préparons en segmentant notre offre autour de
réseaux sectoriels, très formatés, en nous dotant d'outils destinés à démontrer
la capacité de la publicité extérieure à augmenter la vente de produits et à
nourrir le capital des marques. » Ce que l'on pourrait traduire par « investir
dans la culture de la preuve », selon les termes d'Albert Asseraf, directeur de
la stratégie et des études de JC- Decaux, qui définit de cette manière la
stratégie de son groupe pour préparer 2007. Cela passe notamment par
l'augmentation du nombre de campagnes testées avec MarketingScan, par le
lancement à la rentrée de nouveaux produits destinés à faire évoluer la
manière de communiquer de façon évé-nementielle, « par tout ce qui peut
permettre de montrer que l'affichage est le dernier média de masse mais
également un média ciblant, dernier média avant l'acte d'achat », résume Albert
Asseraf. Le risque de voir la distribution désinvestir une partie de leurs
panneaux pousse clairement les afficheurs à aller au-delà des seules stratégies
de leurs propres entreprises. « L'objectif majeur est de nous doter d'une
mesure d'audience nationale d'ici 2007, confirme Damien de Foucault, directeur
commercial et marketing d'Affimétrie. Ce besoin existe depuis longtemps et
l'ouverture des écrans de télévision à la distribution est une des raisons qui
va nous faire précipiter le mouvement pour pouvoir se battre à armes égales. »
Une nécessaire souplesse
Du côté des agences médias
qui ont en charge des budgets de distributeurs, on attend de pouvoir apporter
des éléments de réponse concrets à leurs interrogations. « Les risques sont
effectivement importants pour l'affichage, dans le sens où ces budgets
représentent un quart de leurs revenus, note Jean Minost, directeur du
département affichage chez MPG. Ils l'ont un peu sous-estimé en optant pour
l'auto-réassurance, mais il leur faut maintenant quantifier les choses et voir
comment remettre leur patrimoine en ordre pour aussi accueillir de nouveaux
annonceurs.» Et ce dernier de donner des pistes à suivre pour étendre la
longueur des campagnes, via le recency planning, ou encore revoir la notion
d'exclusivité, « une notion, que les distributeurs, qui communiquent aux mêmes
moments forts, reconnaissent difficile à gérer en affichage, sauf cas
naturellement trop flagrants, mais qui sera plus fondamentale aux yeux
d'annonceurs TV, média où les règles sont plus définies. » « Pour être
complémentaire avec la télévision, l'affichage doit proposer des produits plus
affinés, plus légers en termes de pression publicitaire, en termes de coûts,
avance Hélène Le Corre, directrice de l'affichage chez OMD Rouge. Il a déjà
l'avantage, par rapport à la télévision, d'offrir à la distribution du sur
mesure géographique lorsque la télévision offre une couverture nationale,
mais avec la déperdition que cela implique.» Pour les agences, l'affichage ne
met pas forcément suffisamment en avant sa force de média local. « L'affichage
est en cela le relais terrain de la télévision, la piqûre de rappel
essentielle, estime Benoît Régent, directeur de l'affichage chez Carat Expert.
En ce sens, la publicité extérieure ne devrait pas être trop pénalisée en
2007, car son ancrage local, et le fait qu'il n'y ait pas de déperdition, est
déterminant pour soutenir une campagne promotionnelle, par exemple. » «
L'affichage est un peu le GPS des distributeurs dans le sens où le média assure
la signalétique des magasins, analyse Xavier Guillon. C'est un rôle très
important que le média aura toujours à jouer comme il est aussi là pour relayer
les temps forts de l'actualité de la distribution. La radio fonctionne
également très bien dans ce cadre-là, l'un comme l'autre peuvent travailler en
local d'une manière que la télévision ne saura pas faire. »
La radio redouble d'efficacité
Dans la bataille contre le petit
écran, les deux médias ne partent cependant pas avec les mêmes atouts. « A la
différence de l'affichage, qui commence seulement, cela fait des années que le
média radio développe ses outils de mesure d'efficacité des campagnes avec
MarketingScan », note François Dufresne, directeur délégué marketing de NRJ
Group. Et d'ajouter, « chez NRJ Régies, depuis deux ans, nous avons monté un
panel spécifique avec ACNielsen et Carat Expert, qui intègre maintenant
l'analyse de quatre-vingt campagnes de marques en allant jusqu'à mesurer des
critères comme le cycle d'achat d'un produit ou le poids des ventes sous
promotion.» Les deux médias ont, en revanche, en commun le poids considérable
qu'occupe la distribution dans leur chiffre d'affaires, à savoir de l'ordre de
25% pour chacune des trois grandes régies. Les deux tiers viennent de la
distribution généraliste, le tiers restant des enseignes spécialisées. Selon
TNS Media Intelligence, ce marché numéro un des recettes publicitaires de la
radio a généré l'an dernier 676,8 millions d'euros bruts, en hausse de 15,9 %
par rapport à 2003. Les trois premiers annonceurs émanent d'ailleurs du
secteur, Carrefour en tête avec un chiffre de 100,1 millions d'euros bruts de
budget publicitaire devant Leclerc et Intermarché. « Cela crée bien évidemment
une inquiétude, avoue Jean-Luc Viaud, directeur général d'IP. Mais les
distributeurs savent également depuis des années remplir leurs magasins avec
nos spots. Média de trafic, la radio est également un média excessivement
souple qui permet d'ajouter ou de supprimer des messages en quelques heures. »
Chez ZenithOptimédia, le département radio vient de mettre au point un nouvel
outil de médiaplanning permettant de ventiler un plan national sur des zones de
chalandise. « Il permet de voir quel est le niveau de puissance sur un magasin
et d'effectuer des renforts en local, sachant que la radio est un bon outil de
surpression en local », explique Jean-Marc Ohran.
En attendant une redistribution des cartes
Dans ce contexte, qui présente à ce
jour peu de certitudes et beaucoup d'inconnues, l'affichage comme la radio
doivent à la fois retenir les distributeurs, mais également convaincre à leurs
médias les annonceurs qui ne pourront pas ou plus investir le petit écran. La
fragmentation du paysage audiovisuel, l'extension ou non du temps dévolu aux
écrans publicitaires sont des éléments qu'ils suivent de près dans l'hypothèse
d'une redistribution des cartes. Ils espèrent également tirer parti du fait que
la nature des messages publicitaires délivrés en TV devrait rester limitée.
Pour le CSA, la mention du prix dans les publicités des enseignes “est licite
dès lors que cette offre ne présente pas un caractère occasionnel ou saisonnier
et aucun message publicitaire en faveur d'une enseigne de distribution
mentionnant un prix ne doit indiquer ni suggérer sa durée de validité”. Un
argument que les deux médias mettent en avant dans la guerre du prix que se
livrent les distributeurs et qu'ils ne pourront pas porter aussi radicalement
en télévision.
JouéClub joue sur tous les écrans
« L'ouverture des nouveaux écrans en 2007, bien sûr que cela nous intéresse », affirme Jackie Pellieux, président du groupement des magasins de jouets JouéClub. Mais pour ce distributeur, ce ne sera qu'une étape supplémentaire dans une stratégie publicitaire qui inclut depuis longtemps la télévision. A l'époque où, tous les dimanches, Jacques Martin animait encore L'Ecole des Fans, JouéClub faisait déja son entrée comme parrain de l'émission. L'enseigne parrainne également régulièrement chaque dernier trimestre de l'année Questions pour un Champion et d'au-tres émissions de FranceTélévisions comme Télématin, Plus belle la Vie, etc. « Nous revenons également cette année sur TF1 comme sponsor des feuilletons du lundi soir, notamment “Joséphine Ange Gardien”, précise Jackie Pellieux. Notre objectif est de toucher les seniors, clients potentiels en tant que grands-parents. » Stratégie multimédia Quand JouéClub s'est lancé sur les chaînes thématiques dès l'ouverture des écrans l'année dernière, l'enseigne l'a, en revanche, fait pour s'adresser aux premiers consommateurs de jouets. « Nous avons pris des options sur l'ensemble des chaînes enfant, soit sous forme de spots de vingt secondes mettant en avant un produit JouéClub, soit sous forme de parrainage, poursuit Jackie Pellieux. Nous avons un grand avantage par rapport à d'autres distributeurs, c'est que nous savons précisément qui est notre cible et où on peut la trouver.» C'est pour cette raison que le distributeur ne s'est, en revanche, pas lancé dans l'aventure TNT, préférant attendre et voir. Le fait d'investir en télévision n'a pas fait renoncer JouéClub aux autres médias, et notamment la radio. L'enseigne est ainsi fidèle aux radios de RTL depuis dix ans en fin d'année. La régie IP a ainsi réalisé, en décembre dernier, une émission avec Cauet, l'animateur de Fun Radio, en direct de son magasin parisien Village JouéClub, « une opération positive qui nous a permis de toucher un nouveau public », conclut Jackie Pellieux.