Délicieuse sophistication…
Une nouvelle race de produits habillés de packagings tantôt épurés à l'extrême, tantôt excessivement sophistiqués envahissent les rayons des épiceries fines. Les bons vieux codes graphiques “terroir” ne semblent plus faire recette. La tradition a vécu, place à la modernité…
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Selon le Panorama Mondial de l'Innovation de XTC, lors du Sial 2002, 36,4 %
des nouveautés étaient positionnées sur les axes de l'origine et de la
tradition. En effet, il y a encore très peu de temps, l'alimentation haut de
gamme ne pouvait provenir que de nos terroirs et reposer sur un savoir-faire
culinaire fort de plusieurs siècles d'expérience. Quoi de mieux que le berceau
de la vieille Europe, à commencer par la France, riche de la diversité de ses
régions et de sa gastronomie pour puiser de quoi régaler des consommateurs qui
cuisinent de moins en moins. “Reflets de France” (Carrefour), “Le Savoir des
Saveurs” (Système U), “Nos Régions ont du Talent” (Leclerc)… Les enseignes de
la grande distribution se sont rué sur cette tendance en apportant à leurs
clients leurs lots d'offres qualitatives autrefois réservées au circuit des
épiceries fines. Les grandes marques ne sont pas restées muettes en incluant ce
segment premium à leur catalogue. Enfin, des PME, belles endormies comme la
Maison Geyer avec sa limonade Lorina, se sont subitement réveillées en surfant
brillamment sur cette tendance du retour aux valeurs d'autrefois. L'expression
packaging joue, dans la majorité des cas, sur des registres graphiques surannés
remis au goût du jour. Ainsi, nous ne comptons plus dans les rayons les
emballages qui font référence à une imagerie traditionnelle revisitée. La roue
tourne. Ces décors d'emballage hier originaux et novateurs, sont désormais
devenus d'une uniforme banalité. Ne sommes-nous pas arrivés à saturation avec
ce référentiel de sophistication qui puise ses racines dans la tradition ?
D'autant qu'une concurrence venue d'ailleurs semble vouloir remiser nos
vieilleries dépoussiérées au grenier. Une autre vision de l'alimentation haut
de gamme est en passe de franchir nos frontières. Après nous avoir prouvé
qu'une bonne bouteille de vin ne devait pas forcément représenter un château
sur une étiquette blanche dorée à l'or fin, nos voisins sont en passe de nous
donner une nouvelle leçon de design-packaging. Tout semble avoir commencé
outre-Atlantique. Aux Etats-Unis émerge depuis environ deux ans une nouvelle
idée de la qualité alimentaire. Ayant parfaitement intégré que la gastronomie
traditionnelle haut de gamme venait du Vieux Continent, les fabricants
américains investissent un terrain laissé vierge et au potentiel prometteur :
la gastronomie moderne haut de gamme.
Un positionnement communiqué par le design
Ces nouveaux produits adoptent deux
styles graphiques très différents. Presque opposés, mais néanmoins actuels tous
les deux, leurs conditionnements émergent des rayons pour exprimer une
sophistication empreinte de modernité. Le premier style graphique est
minimaliste : “no logo, just typo”. Noir et blanc, ou deux couleurs à l'aplat
maximum. Tout est écrit, rien n'est montré. Simple, efficace, ils donnent envie
d'acheter pour en savoir plus… Le second style est beaucoup plus raffiné. Le
visuel y est prépondérant. Onirique, parfois décalé, il nous montre le produit
sous un angle radicalement différent. Là encore, le décor de l'emballage nous
invite à la découverte. Les innovations présentées lors du Sial 2004 devraient
confirmer l'émergence de ces nouvelles tendances packaging. Espérons simplement
que les industriels français de l'agroalimentaire ne réagiront pas une fois de
plus comme des irréductibles Gaulois retranchés derrière leurs certitudes.
Qu'ils en soient persuadés par Toutatis ! La potion magique d'un produit, c'est
son design-packaging !!!