C'était mieux avant
Marche arrière toute! A l'heure du tout numérique, rien n'est plus tendance que le noir et blanc. Ah, le bon vieux temps, celui du franc, quand la vie n'était pas aussi chère qu'aujourd'hui. L'euro ne rend pas heureux les Français qui, selon un sondage de l'Ifop, sont de plus en plus nombreux (69 %) à regretter l'ancienne monnaie. En proie à la nostalgie, les consommateurs entretiennent le culte d'une France vintage. La dernière étude de l'observatoire des modes de vie et de consommation des Français, parue en octobre 2010, en témoigne. Les experts d'Ipsos ont demandé à 4 500 personnes la période à laquelle elles aimeraient vivre. Les réponses sont révélatrices du rapport que les Français entretiennent avec leur histoire. Seules 32 % des personnes interrogées ont choisi notre époque. Le futur n'attire pas davantage, bien au contraire, avec seulement 22 % des voix. La majeure partie des Français préférerait revenir en arrière et vivre dans le passé récent. 36 % opteraient pour les années cinquante-soixante et 50 % pour les années soixante-dix ou quatre-vingt. « Cette tendance passéiste n 'a cessé de s 'accentuer au cours des trois vagues d'enquêtes, analyse Rémy Oudghiri, directeur du département corporate et 'tendances d'Ipsos. Le passé serait devenu le refuge imaginaire des Français. Au fond, ce que traduisent ces chiffres, c'est que les Français, insatisfaits par la période actuelle d 'une part et anxieux face aux modes de vie incertains que le futur leur réserve d'autre part, se sont exilés dans le culte imaginaire des Trente Glorieuses. Les différents effets revival artistiques que nous avons vécus ces dernières années en témoignent. La société de 1960 au début des années quatre-vingt est rétrospectivement parée de toutes les vertus et sacralisée. La France de ces années-là est devenue un mythe », conclut Rémy Oudghiri.
Le passé à travers des lunettes roses
Certes, le sentiment de nostalgie n'est pas neuf. Le mot est apparu à la fin du XVIIe siècle dans le vocabulaire médical, avant de passer peu à peu dans le langage courant. « Son utilisation dans le marketing date du XXe siècle », explique Aurélie Kessous, professeur de marketing à l'Ecole de commerce européenne de Lyon, chercheur affilié Cergam et auteur d'une thèse intitulée Nostalgie et relations des consommateurs aux marques. Comment la définir? « La nostalgie, c'est le désir d'on ne sait quoi », a écrit Antoine de Saint-Exupéry dans Terre des hommes. Pour Aurélie Kessous, elle représente « une préférence envers des objets (personnes, lieux ou choses) qui étaient familiers quand on était plus jeune. » Ce sentiment « repose sur des mécanismes d'idéalisation du passé. Le temps filtre les aspects négatifs du souvenir. Il ne reste que le positif. C'est un peu comme si l'on regardait le passé à travers des lunettes roses », ajoute Aurélie Kessous. « Les femmes qui fantasment sur le look des années cinquante ont par exemple oublié ce qu'était la condition féminine à cette époque-là », remarque Dominique Levy, directrice générale d'Ipsos Marketing. Qui sont ces Français nostalgiques? Eprouver ce sentiment est-il lié à l'âge? « Les traits de personnalité, l 'expérience et le vécu des personnes ont un impact sur leur propension à être nostalgiques, remarque Paul-Emmanuel Pichon, maître de conférences en marketing à l'université de Toulouse 2. Tous les publics sont touchés, mais le phénomène prend de l'ampleur après la tranche des 20-25 ans. » Pour Dominique Levy « la nostalgie est transgénérationnelle. » Au cours de ses recherches, Aurélie Kessous a mis en évidence quatre types de nostalgie, liés au quotidien passé, à la tradition, à la rareté et à la transition. Tous les nostalgiques n'ont pas le même profil, ainsi on distingue quatre groupes de consommateurs: les adolescents, les traditionnels, les transgénérationnels et les transitionnels. « Nous sommes tous un peu nostalgiques, mais chacun à notre façon », résume Paul-Emmanuel Pichon.
Dominique Levy (Ipsos Marketing):
« La crise n'explique pas le besoin de réassurance que révèle la nostalgie, elle l'amplifie. »
No future
« Dans les années cinquante-soixante, chacun se passionnait pour la science-fiction, en imaginant ce qui allait se passer en 2000. Le futur était une valeur. Maintenant, un effet de cycle assez étonnant veut que nous regardions dans le rétroviseur une société qui elle-même nous rêvait à travers le parebrise! », observe Dominique Levy (Ipsos).
L'époque actuelle est marquée par la peur du lendemain. Selon un sondage Ipsos pour le Secours populaire (en septembre 2010), un jeune sur deux se dit angoissé lorsqu'il pense à sa situation actuelle et à son avenir. Les consommateurs recherchent une sécurité que ne leur procurent plus notre monde instable, notre système économique de plus en plus fragile et ils doutent. La crise y est certainement pour quelque chose, mais selon Dominique Levy, « elle n'explique pas à elle seule ce besoin de réassurance, elle l'amplifie ». Jacques Bouey, président des Gens de l'atelier, constate un « retour à une dimension du temps long ». Pour lui, la nostalgie ne serait qu'« une des expressions de la quête d'authenticité, qui est un phénomène de fond beaucoup plus important ».
La dictature du divertissement
La nostalgie se fait d'abord entendre dans la musique populaire. Joe Dassin et Mike Brandt, ces idoles des seventies, ont tous les deux eu droit à leur comédie musicale fin 2010. Age tendre et tête de bois, RFM Party 80, RTL Disco show, les tournées du souvenir J font un tabac. Le walkman est mort, mais le vinyle fait son grand retour. Selon Nielsen Soundscan, aux Etats-Unis, 2009 a été la meilleure année de vente de ces galettes noires depuis 1991. Les adeptes du rétrogaming se multiplient. Ils collectionnent les vieilles consoles et se passionnent pour les jeux vidéo d'antan en 2D. Les dessins animés Félix le Chat, Oui-Oui, Barbapapa et Maya l'abeille font leur retour sur le petit écran. Les livres sur les cupcakes, ces jolies pâtisseries colorées des années cinquante, envahissent les librairies. Le tricot de nos grands-mères connaît une seconde jeunesse. On rend hommage au déhanchement sensuel de Patrick Swayze, en apprenant, dans les cours de danse, la chorégraphie finale de Dirty Dancing. Ce phénomène de mode n'a pas échappé aux Black Eyed Peas, qui ont repris la chanson-phare du film, Time of my life. A la rentrée, Pierre Palmade est remonté sur scène après dix ans d'absence pour un one-man show intitulé «J'ai jamais été aussi vieux» et se définit lui-même comme « un comique vintage ». De même, M6 a laissé tomber sa Nouvelle Star, et sa petite soeur cathodique, W9, a lancé à la rentrée un programme intitulé A la recherche du nouveau Michael Jackson. L'émission Champs-Elysées, présentée par Michel Drucker, fait son retour sur France 2. Et comment ne pas parler de Mad Men? Cette série télévisée américaine, créée en 2007, se déroule dans les années soixante à New York, dans une agence de publicité. Elle dépeint les changements sociaux et moraux qui ont eu lieu à cette époque. L'esthétisme et le sens du détail y sont poussés à l'extrême. La série connaît un tel succès qu'elle est devenue prescriptrice de tendances. Les créateurs de mode viennent y puiser leur inspiration. Taille ceinturée, poitrine corsetée, tête coiffée, avant-bras gantés: sur les podiums, les silhouettes des années soixante font un carton, notamment chez Vuitton et Prada. Résultat: plus de la moitié des Françaises adopteront un look «rétro sixties» pour la saison hiver 2010-2011, selon une étude BVA/Showroomprive.com. « C'est assez drôle de voir qu 'avec Mad Men, on se penche avec tendresse sur la naissance de la société consumériste et de la publicité, alors qu'aujourd'hui, les consommateurs sont assez publiphobes », remarque Dominique Levy (Ipsos).
Les années cinquante adulées
Le vintage est mis à toutes les sauces: mode, décoration d'intérieur, électroménager... Il possède même son grand rendez-vous annuel, le Salon du vintage. Pour la rentrée 2010, le concept store tendance Fnac It a lancé la collection «Vintage lovers». Les fans pouvaient y trouver des produits et des accessoires high-tech, dont le design allait des années quarante à quatre-vingt. L'occasion de redécouvrir la forme arrondie des vieilles radios, le mange-disques des yéyés ou encore le casque audio des studios Abbey Road pour donner un petit air Happy Days à son salon. Les parents offrent des meubles vintage à leurs enfants. Pour les initier au design, mais surtout pour se faire plaisir. De nombreuses boutiques en ligne surfent sur cette vague, comme Bianca and family ou Balouga, qui proposent une sélection de commodes et bureaux «années cinquante» au Bon Marché. Un filon intéressant, que savent exploiter les marques de luxe, à l'exemple de Lamarthe qui, pour fêter ses 80 ans, a réédité un modèle de sac vintage, baptisé Icon, créé dans les années soixante. Paco Rabanne a signé son retour dans l'univers de la mode en lançant le sac à main 69 Paco Rabanne, qui est une réédition d'un modèle original, imaginé par le créateur en 1969. Même démarche chez Giorgio Armani, qui lance une collection de lunettes, Frames of life, qui revisite les années vingt et quarante. Sur un tout autre segment, Absorba a conçu une ligne exclusive vintage pour l'enfant et la maman à l'occasion de son soixantième anniversaire. Les vêtements et accessoires s'inspiraient des archives de la marque.
Utiliser des images d'hier pour vendre des produits d'aujourd'hui: c'est le pari tenu par Lagostina et Eurostar.
Souvenirs, souvenirs
D'ailleurs, la célébration d'un anniversaire est souvent l'occasion pour les marques de jouer sur la fibre nostalgique. Pour les 50 ans de la brique Lego, l'agence Family et Compagnie s'est adressée aux quinquagénaires. Elle leur a demandé de transmettre à la jeune génération (enfants, petits-enfants) leurs meilleurs souvenirs de jeux avec les produits Lego. Les auditeurs de la radio Nostalgie étaient incités à déposer leur témoignage sur le site web de la station. Les cinq meilleures dédicaces ont été sélectionnées par un jury pour être diffusées à l'antenne. « Notre travail consiste à comprendre l'origine de l'attachement à une marque et à la transmettre aux consommateurs d'aujourd'hui », explique Loïc Mouquet, directeur de l'agence Family et Compagnie qui a également accompagné le retour de la bande dessinée Blake et Mortimer. « Pour la sortie du prochain album, nous avons noué un partenariat avec la société Royal Enfield et nous espérons relancer la mode du side-car », ajoute-t-il.
Cette année, Danette a soufflé ses 40 bougies. Elle en a profité pour relancer sa fameuse barquette de 500 grammes, créée en 1970. La consommation alimentaire, qui fait appel aux sens, est particulièrement propice à transporter les individus dans le passé. Comme le rappelle Paul-Emmanuel Pichon, « la filière alimentaire est extrêmement sécurisée en France. Pourtant, la consommation de produits agroalimentaires modernes nous donne le sentiment de manger moins sainement, ce qui renforce le succès de produits alimentaires à connotation nostalgique ». Le détail rétro peut apparaître dans le packaging, dans la recette dite «à l'ancienne» ou dans l'habillage du point de vente, comme pour les boulangeries Paul, qui cherchent à recréer l'atmosphère des fournils d'an tan. C'est aussi en faisant appel à leurs souvenirs que l'agence Leg a incité les consommateurs à prendre l' Eurostar, en avril dernier. Pour cette campagne d'affichage, de vieilles photos d'une famille en voyage à Londres étaient associées au slogan «Depuis quand n'êtes-vous pas allé à Londres?» Parallèlement, les internautes étaient invités à publier leurs plus belles photos rétro sur le site Getbacktolondon.com, afin de gagner des allers-retours pour la capitale anglaise.
Indémodables
« Avant la crise, les marques avaient tendance à multiplier les produits, les éditions limitées et les dérivés. La crise a jeté un discrédit sur ce mouvement, affirme Jacques Bouey (Les Gens de l'atelier). Elles souhaitent désormais revenir à l'essentiel, aux fondamentaux. » Ainsi, elles associent leur image à des valeurs sûres et à des personnalités indémodables dont l'aura a survécu à toutes les époques. C'est le cas de Dior, qui s'est offert Alain Delon pour son parfum Eau sauvage. « C'était une évidence. Alain Delon est un mythe vivant et Eau Sauvage, un grand classique de la parfumerie française », explique-t-on chez Dior Parfums. Sur l'affiche, l'acteur, aujourd'hui âgé de 75 ans, a quelque peu rajeuni... « Nous avons choisi une photo de 1966, car c'est l'année de création d'Eau Sauvage. Cette image n'a pas vieilli et nous permet de toucher à la fois les hommes qui se souviennent de Delon à cette époque et une clientèle plus jeune qui sera séduite par son côté insoumis et irrévérencieux. » De même, Lancel a choisi des clichés de Brigitte Bardot datant des années soixante pour promouvoir le sac conçu en partenariat avec l'actrice. Et depuis octobre dernier, Sophia Loren incarne l'image de Lagostina, une marque d'articles culinaires haut de gamme. L'agence DDB Paris, en charge de la campagne, a choisi une photo en noir et blanc de l'actrice prise par Alfred Eisenstaedt, photographe vedette de Life Magazine. « Il y a deux ans et demi, Lagostina nous a contactés car la marque souhaitait se faire connaître, tout en renouant avec ses origines italiennes, explique Vincent Leorat, directeur général de l'agence. Elle voulait une égérie. Après avoir longtemps cherché parmi les Italiennes d'aujourd'hui, nous nous sommes rendu compte que l'égérie parfaite appartenait aux années soixante: Sophia Loren. Nous avons choisi une photo de cette époque-là car, dans l'imaginaire des gens, l'actrice est associée à cette photo. »
Certes, la mère Denis n'est pas aussi glamour que Brigitte Bardot ou Sophia Loren, mais elle n'en demeure pas moins une formidable icône publicitaire.
Difficile de trouver mieux pour représenter la marque Vedette. Qu'à cela ne tienne! L'enseigne a décidé de remettre son personnage fétiche sur le devant de la scène après 20 ans d'absence. « La Mère Denis est toujours associée à la marque vedette, elle n'a pas été oubliée, raconte Mauricio del Puerto, directeur de la communication de Fagor-Brandt. Elle fait partie de la mémoire collective. Des gens nous envoyaient des lettres et des photos d'elle. Et puis nous avons vu qu'il existait plusieurs pages Facebook consacrées à la Mère Denis. Nous avons demandé à quelques fans ce qu'elle représentait pour eux. Il se trouve qu 'elle véhicule des valeurs très actuelles: écologie, efficacité, économies. Il faut savoir que dans les années quatre-vingt, la Mère Denis était révolutionnaire. » La marque a donc décidé de lui rendre hommage à l'occasion du 21e anniversaire de sa mort en 1989. D'abord dans une page du Figaro, puis en ouvrant une page Facebook intitulée «Rendez-nous Mère Denis». « La presse et le public en ont beaucoup parlé. Cela nous a convaincus de passer au stade supérieur en créant le site internet Meredenis.com, poursuit Mauricio del Puerto. La banque d'images de la Mère Denis étant limitée, nous avons choisi de la représenter en 3D. Les agences nous ont conseillé de la rajeunir, mais nous avons préféré lui laisser des rides. La Mère Denis d aujourd'hui est moderne dans son traitement, mais conserve un fort capital tradition. » Bilan? « Le retour sur cette campagne est très positif. La marque Vedette a refait son apparition dans le top 10 des marques d'électroménager les plus connues en France. Nous allons même lancer une machine à laver estampillée Mère Denis et nous étudions la possibilité de lancer une application iPhone », s'enthousiasme Mauricio del Puerto. Lustucru a elle aussi de nouveau fait appel à son ambassadrice de charme du 3e âge, la fameuse Germaine. Tout le monde se souvient encore de la célèbre grand-mère enlevée par un groupe de martiens sympathiques pour qu'elle leur fasse goûter des pâtes aux oeufs Lustucru. La création d'une nouvelle gamme a été l'occasion pour l'agence BDDP de relancer la saga publicitaire de «Germaine et les martiens». « Certaines marques ont parfois perdu le fil des valeurs qui ont fait leur succès et elles veulent les retrouver aujourd'hui », constate Loïc Mouquet (agence Family et Compagnie).
A l'instar de Brigitte Bardot, certaines icônes transcendent les époques et les modes, devenant ainsi des valeurs sûres pour les marques.
Opération recyclage
Certaines grandes marques sont aujourd'hui riches d'un capital d'histoire et d'image. Et elles ne se privent pas de l'exploiter. Les parfums Caron ont ainsi remisé leur ancienne icône Sébastien Chabal au placard et opté pour Serge Gainsbourg. Ils ont exhumé une chanson écrite et chantée par l'artiste en 1972, intitulée Pour un homme, dans laquelle il cite le parfum. Le vinyle a été réédité pour l'occasion. De même, afin de promouvoir le recyclage de ses rasoirs jetables, Bic a choisi de recycler une ancienne publicité télé en mettant en scène Eric Cantona, versions 1995 et 2010. Pour d'autres marques, nul besoin de caution écologique pour ressortir leurs anciens spots télé. C'est le cas de Mousline, qui a remis au goût du jour une publicité de 1976. La famille attablée, le petit volcan, la chanson, tous les ingrédients sont les mêmes que dans la version originale. Pepsi, quant à lui, a réalisé le remake d'une publicité de 1995, qui opposait la marque à son concurrent Coca-Cola. Mars et McCain ont fait beaucoup plus simple, en rediffusant tels quels des spots datant des années quatre-vingt-dix. Une ficelle marketing qui laisse Vincent Leorat un peu dubitatif: « Recycler un spot télé s'apparente à un aveu d'impuissance. Cela donne l'impression que la marque n'a rien de nouveau à raconter. Ce n'est pas très rassurant. »
A contre-courant, Citroën a lancé sa campagne «Anti rétro» pour valoriser la créativité sans tomber dans le passéisme.
Anti rétro
Certaines marques s'inscrivent d'ailleurs à rebours de cette tendance nostalgique. Il y a quelques mois, l'assureur Amaguiz.com a fait parler de lui en invitant les internautes à démontrer avec humour que notre époque moderne avait vraiment du bon. Le jeu consistait à réaliser et à poster sur un site dédié des photos et des vidéos pour illustrer le fait que, contrairement aux idées reçues, ce n'était pas mieux avant.
L'étiquette passéiste n'est ainsi pas toujours bonne à porter pour une marque. « Le risque de miser sur la nostalgie est de paraître démodé, affirme Aurélie Kessous (Ecole de commerce européenne de Lyon) . Il faut l'utiliser avec précaution. » En effet, ce culte du rétro ne doit pas être un frein à l'innovation. « On peut puiser dans les univers du passé, mais la condition sine qua non du succès est d'y ajouter une dimension contemporaine », estime Jacques Bouey (Les Gens de l'atelier) . « La nostalgie exprimée comme un regret est inintéressante », affirme Hugues Reboul, directeur de l'agence H et responsable du budget Citroën. La campagne Anti rétro, imaginée pour le lancement de la DS3, reflète ce sentiment. « Nous utilisons le nom d'une voiture légendaire mais, contrairement à la Fiat 500 ou à la Mini, nous n 'avons pas voulu jouer la carte du revival », explique Hugues Reboul. Les spots télé mettaient en scène deux stars mythiques, Marylin Monroe et John Lennon. Un choix a priori surprenant pour parler de la modernité. « Marylin Monroe et John Lennon sont devenus des figures légendaires car ils ont réalisé des choses qui ne ressemblaient à rien de ce qui avait été fait avant. Avec la première DS, Citroën a révolutionné le design automobile. Pourtant, la nouvelle DS3 ne lui ressemble pas du tout. Nous n'avons rien conservé de l'original, excepté l'état d'esprit. Avec cette campagne, nous avons relevé le défi de concilier le passé, le présent et l'avenir. Nous revendiquons l'héritage créatif de la première DS, mais sans aucune nostalgie », affirme Hugues Reboul. Pour Aurélie Kessous, « la nostalgie et les nouvelles technologies ne sont pas antinomiques, bien au contraire. » Puiser dans les codes du passé a du sens dès lors que l'on réussit à adapter le produit ou le message au?XXIe siècle. L'Histoire doit permettre d'avancer, pas de ressasser.
Hugues Reboul (Agence H ): « La nostalgie exprimée comme un regret est inintéressante. »
Jacques Bouey (Les Gens de l'atelier): « La nostalgie est une expression d'un phénomène plus important: la quête d'authenticité. »