Bricorama sous le signe de la proximité
Distancé dans la course à la taille critique par les enseignes leaders, Bricorama n'en reste pas moins un acteur majeur du marché du bricolage. Il a même quelques atouts susceptibles de lui assurer des lendemains qui chantent. A suivre de près...
HISTORIQUE
1975 : Jean-Claude Bourrelier ouvre
avec un associé un premier magasin de bricolage, à Paris, place d'Italie : La
Maison du 13e. Il est affilié à l'ANPF. 1983 : Cinq magasins ont déjà ouvert
leurs portes. Ils arborent l'enseigne M. Bricolage, lancée en 1980. Mais l'ANPF
refuse d'accueillir sous son enseigne un nouveau magasin acheté par Jean-Claude
Bourrelier. Celui-ci crée alors sa propre enseigne : Batkor. 1990 : Sept
nouvelles ouvertures plus tard, c'est la rupture avec l'ANPF, le développement
du "petit empire Bourrelier" étant peu compatible avec une structure
coopérative. Les magasins M. Bricolage prennent le nom de IDF Bricolage (pour
Ile-de-France). Cette même année, reprise de l'enseigne Pictoral (7 magasins).
1992 : Acquisition de la chaîne Bricorama (15 magasins) auprès de Castorama.
1995 : Rachat de la Bricaillerie, spécialisée dans le petit bricolage, soit 15
nouveaux magasins. Bricorama se hisse à la troisième place des réseaux intégrés
de bricolage en France, derrière Leroy-Merlin et Castorama. Chiffre d'affaires
: 1,2 milliard de francs. 1996 : Bricorama entre au second marché. 1997 :
Acquisition de la branche continentale du groupe Wickes, implantée au Benelux.
Janv. 2001 : Rachat à la compagnie Bresson de l'enseigne Bricostore.
PRINCIPAUX DIRIGEANTS
P-dg : Jean-Claude Bourrelier
Directeur d'enseigne Bricorama : Philippe Colomby Directeur d'enseigne Batkor :
Xavier Descroix Directeur Benelux : Eric Haegeman Directeur administratif et
financier : Thierry Scordel Directeur de l'expansion : Olivier Vergnière
Directeur de l'expansion affiliés : Alain Caron
RÉSULTATS
Chiffre d'affaires 2000 : 455 millions
d'euros (près de 3 MdF), en hausse de 4,4 %. Le chiffre d'affaires France a
progressé de 7,3 %, à l'inverse de l'activité Benelux, qui est en recul de 2,9
%. Parmi les 67 magasins français, 9 sont à l'enseigne Batkor.
EFFECTIFS
Près de 3 000 salariés. Le 2 janvier dernier,
Bricorama rachetait à la compagnie Bresson son activité bricolage France,
exploitée à l'enseigne Bricostore. Soit six magasins, un chiffre d'affaires de
260 millions de francs et 40 000 m2 de surface de vente. Une opération qui, à
elle seule, symbolise parfaitement le groupe de Jean-Claude Bourrelier.
Pictoral, Projet, Bricorama, Bricaillerie, Wickes, Outirama, Bricostore...
Depuis sa création, Bricorama s'est principalement constitué par croissance
externe. Une stratégie qui lui permet d'occuper aujourd'hui le sixième rang sur
le marché français du bricolage, et le troisième rang parmi les intégrés.
Un concept axé sur la proximité
Règles d'or
revendiquées par Bricorama : de larges gammes de produits (bricolage,
décoration, jardin, bâtiment), du conseil et de l'accueil, le sens de la
proximité et un bon rapport qualité-prix. Rien de très différent, en fait, de
ce que propose la concurrence, sur un marché du bricolage où, à la décharge de
Bricorama, les concepts marketing sont globalement assez homogènes, si l'on
fait abstraction des concepts entrepôt (de type Brico-Dépôt) ou hard-discount
(de type Bricoman). Plus que toute autre variable, ici, c'est la taille du
point de vente qui détermine le positionnement. Plus petits que les Casto ou
Leroy-Merlin, plus grands que les Weldom, les magasins Bricorama ont une
superficie moyenne de 3 400 m2 (1 200 m2 pour les points de vente implantés en
centre ville). A ce niveau de taille, la notion de proximité a encore un sens.
C'est donc tout naturellement que Bricorama s'y est attaché. L'accent est mis
sur le conseil et les services, à l'image du "Faîtes le faire" (pose à
domicile) ou du lancement, fin 2000, d'une carte de fidélité. Le discours
client joue lui aussi sur cette proximité, avec une communication qui repose
essentiellement sur du catalogue, à l'heure où les ténors du marché
(Leroy-Merlin, Weldom) se laissent tenter par les médias nationaux à travers le
partenariat TV. A titre d'anecdote, dans les prospectus ou sur les affiches du
groupe Bricorama, on ne trouve que du personnel maison. Jamais un mannequin
professionnel. « Cela dans un souci de proximité et d'identité », explique
Jean-Claude Bourrelier, qui a eu quelques difficultés à imposer ce principe aux
agences. Côté assortiment, Bricorama a entrepris un travail sur ses gammes,
avec un merchandising plus pointu par familles de produits, une augmentation de
la part du bricolage lourd et un développement de sa marque distributeur. Fin
2000, celle-ci générait environ 15 % du chiffre d'affaires contre 8 % deux ans
plus tôt. Objectif final : environ 20 %.
Les outils de la croissance
Adepte de la croissance externe, Bricorama a décidé de
se pencher plus attentivement que par le passé sur la croissance interne en
renforçant ses équipes de développement. Ainsi, en 2001, huit nouveaux projets
devraient voir le jour en France et trois au Benelux. Une croissance interne
qui est à la fois gage de croissance du chiffre d'affaires et d'amélioration de
la productivité. Le rachat en 1997 de la branche continentale du groupe Wickes
(37 magasins situés au Benelux pour 800 millions de francs de chiffre
d'affaires) a permis à Bricorama de franchir les frontières. Présent en
Belgique et aux Pays-Bas, Bricorama peut se présenter comme un groupe
international... même si l'affirmation est un rien pompeuse. Cette
internationalisation là n'a rien à voir avec celle, par exemple, d'un
Castorama. Bricorama le reconnaît d'ailleurs volontiers. « Notre présence en
Belgique et aux Pays-Bas nous a permis d'acquérir un état d'esprit européen,
une autre façon de penser notre métier, plus qu'une véritable dimension
européenne », estime Jean-Claude Bourrelier. Tout du moins pour l'instant car
des acquisitions au Benelux sont tout à fait envisageables. Ce serait pour
Bricorama l'une des façons d'améliorer les résultats. Car il faut bien admettre
que pour l'année 2000, les performances de la branche Benelux ont été
décevantes. La mise sous enseigne Bricorama des magasins acquis auprès du
groupe Wickes tarde à donner des résultats et si les ventes ont été stables aux
Pays-Bas, elles ont régressé de 5 à 10 % en Belgique (- 2,9 % pour l'ensemble
du Benelux). Remodeling des magasins, lancement de produits, développement de
nouveaux services, économies (transfert de fonctions vers le siège français) et
développement de la notoriété (grâce à la publicité) sont au programme pour
améliorer la situation.
Perspectives
Les résultats
mitigés du Benelux expliquent en bonne partie un exercice 2000 relativement
moyen : + 4,4 % de croissance, soit nettement moins que les progressions
observées lors de l'exercice précédent (+ 15 %). En France, le chiffre
d'affaires a certes augmenté plus vite : + 7 % sur un marché en hausse
d'environ 4 %, ce qui permet à l'enseigne de développer sa part de marché (3,4
% depuis l'acquisition de Bricostore). Reste qu'il en faudrait bien davantage
pour faire de Bricorama l'un des leaders du secteur. "Coincé" entre quelques
enseignes majeures et un bon nombre d'intervenants plus petits, Bricorama peut
être considéré comme un acteur moyen du bricolage. En l'état actuel, il n'est
pas envisageable de revenir sur les leaders par la seule croissance interne. «
Rattraper Castorama !, impossible, reconnaît Jean-Claude Bourrelier. Seule
solution, le racheter... » Au-delà de la boutade, il apparaît que seules les
acquisitions (et même, une acquisition majeure) permettraient à l'enseigne
d'accéder au niveau supérieur. Parmi les scénarii envisagés, l'un des plus
intéressants consisterait à passer un accord avec un groupe européen, de taille
et de culture comparables. Cela implique des modifications dans la structure du
capital (majoritairement familial). Ce à quoi Jean-Claude Bourrelier est tout à
fait prêt. « Je suis ouvert au partenariat. Et je sais que l'évolution me
conduira sûrement à abandonner une partie de l'indépendance », admet-il. Ce
qu'il exclut, en revanche, c'est une absorption pure et simple. « Nous ne
sommes pas une proie intéressante car je souhaite rester acteur de ce marché »,
martèle-t-il. Et il semble qu'il en ait les moyens. La structure financière du
groupe est considérée comme "très bonne" par les analystes, ces derniers
estimant que Bricorama "a les moyens de devenir un acteur important du
bricolage", grâce notamment à de fortes capacités d'investissements (Fortis
Bank). Le marché français du bricolage est comparable à celui de l'hypermarché
il y a une vingtaine d'années, à la veille des grandes batailles et de la
concentration. Grandes batailles qui ont déjà commencé au plan européen. Les
années à venir seront mouvementées et Bricorama pourrait bien y jouer un rôle.
LE MARCHÉ
Le marché français du bricolage se porte bien. En 1999, il s'élevait à 100 milliards de francs, en progression de 4,2 % par rapport à 1998. Pour l'an 2000, sa croissance est estimée entre 4 et 5 %, soit un marché de l'ordre de 105 MF. Largement dominatrices, les GSB ont vu leur chiffre d'affaires augmenter de 6,2 % et leur surface, de 3,8 %. A noter l'émergence de nouveaux concepts de type hard-discount (Bricoman par Leroy-Merlin) et magasins entrepôt. Ces derniers, notamment, connaissent un succès fulgurant à travers Brico-Dépôt. Pour le plus grand profit de Castorama, mais au risque, expliquent les sceptiques, de tirer l'ensemble du marché vers le bas.