«Nous répondons au besoin de «fruits packagés» avec une marque différente et responsable»
Marketing Magazine Quelle est votre réaction après avoir été élu Homme Marketing de l'Année 2009?
Philippe Cantet: Nous sommes hyper heureux... et à plus d'un titre. C'est un élément de fierté très fort de voir que nous sommes considérés au même niveau que McDonald's, Accor, LG ou Orangina, des marques établies, aux activités marketing assez remarquables. Tant et si bien qu'il y a eu une grande mobilisation chez nous autour des Trophées!
Comment expliquez-vous votre succès?
Nous avons cru en notre capacité à développer une nouvelle catégorie. C'est le marketing tel qu'il devrait être: un produit qui répond à un véritable besoin du consommateur. Tout le monde sait que les fruits sont bons pour la santé, mais qu'on n'en consomme pas assez. Il existe donc un besoin de «fruits packagés», un marché qui, en dépit des efforts du Programme national nutrition santé (PNNS), a été complètement sous-marketé. Notre deuxième point fort est la réponse produit. C'est un élément qui semble évident, mais qui est véritablement différenciant. Notre produit tout nu, sans sa marque et sa bouteille, est un véritable produit gagnant. Un autre élément-clé est l'attention que nous avons portée au détail. Les consommateurs se font leur opinion autant par le message principal que vous leur envoyez, que par la blague ou la petite histoire sur le pack. Le dernier élément réside dans notre souci de répondre à ce besoin avec une marque différente, responsable et éthique, comme en témoigne le sourcing des fruits, notre bilan carbone, notre partage de la richesse (10% des profits sont reversés à des projets caritatifs ou à des fondations), ou encore notre packaging, 100% en plastique recyclé. Nous sommes la première bouteille au monde à avoir atteint ce niveau-là, et beaucoup de nos usines sont passées à l'énergie verte. Notre idée est de construire un business dont on puisse être fier. Evidemment, nous sommes loin d'être parfaits, mais nous essayons d'être cohérents, dynamiques, de progresser et de partager avec les consommateurs.
Comment s'articule votre stratégie de communication?
Notre bataille est celle du premier achat. Pour cela, rien de mieux que de faire goûter le produit. Il s'agit donc de notre principal poste d'investissement. Nous travaillons pour amener les consommateurs tout en haut de la pyramide du marketing, quitte à ce qu'ils soient moins nombreux, mais fidèles. Nous sommes vraiment dans ce modèle-là: faible pénétration mais forte implication des consommateurs. En termes de déploiement, en revanche, cela prend du temps. C'est pourquoi notre première campagne média d'affichage n'a eu lieu en région parisienne qu'au mois d'octobre dernier, pour développer la notoriété de la marque.
Quels sont vos projets?
Tout d'abord, faire tomber la première barrière au développement du marché: le fait que les consommateurs n'ont pas encore vraiment compris ce qu'était un smoothie. Il faut donc continuer notre travail de pédagogie. Le temps est également venu d'utiliser des moyens de communication plus forts. Le 26 mai, nous avons lancé notre première campagne TV, qui prend le parti d'expliquer ce qu'est un Innocent. Et nous nous sommes retroussé les manches en réalisant la campagne nous-mêmes.
Allez-vous lancer d'autres références produits?
Ce marché prenant de l'ampleur, il va falloir le segmenter. Nous allons commencer par élargir la gamme destinée aux enfants, la population qui manque le plus de fruits, en amenant plus de variétés. Puis, nous allons travailler la segmentation par la fonctionnalité, selon les vertus des fruits.
Enfin, nous allons réaliser des recettes sans banane. Ces lancements sont prévus entre le 1er septembre 2009 et le 1er janvier 2010.
Pourquoi avoir choisi Coca-Cola comme investisseur?
Nous avions trop d'opportunités de croissance (en Grande-Bretagne, en France, et dans le reste de l'Europe) par rapport à notre capacité à nous autofinancer. Aujourd'hui encore, nous avons des idées plein la tête, notamment celle d'aller au-delà des smoothies, dans les produits laitiers et les légumes. Nous préférions donc procéder à une augmentation de capital pour pouvoir faire face à tous ces développements. Finalement, Coca-Cola a été retenue parce que la société s'est alignée sur les deux critères sine qua non: la valorisation et un management indépendant (Coca-Cola détient 10 à 20% et n'a donc pas de minorité de blocage). De plus, on peut imaginer, qu'à moyen ou long terme, nous puissions mettre en oeuvre un certain nombre de chantiers ensemble. Enfin, chez Innocent, l'utopie de la marque meilleure qui, progressivement, va arriver vers le 0 g de CO
@ Photos Trophées : Charly Pouplin / Presswall
Philippe Cantet (Innocent France)
Parcours
Après sa scolarité à l'Essec (1992- 1996), Philippe Cantet part en coopération chez Veolia Australie. De retour en France, il intègre le cabinet de conseil McKinsey où il se passionne pour la grande consommation et le marketing. En 2002, il réalise un tour du monde qui lui donne envie de s'impliquer davantage dans l'élaboration des produits. Il entre alors chez Danone où il occupe plusieurs postes, avant d'atterrir chez Innocent.
Ils étaient également nominés
Catherine Brandenberger
Directrice marketing d'Energizer France
Grégoire Champetier
Directeur général marketing, communication et développement de McDonald's France
Stéphane Drilhon
Directeur marketing de Playmobil France
Dominique Hummel
Président du directoire du Futuroscope
Simon Istolainen
Cofondateur et codirigeant de MyMajorCompany
Frédérick Lecoq
Vice-président marketing pour la stratégie de la marque de LG Electronics Group
Eric Lepleux
Directeur général du marketing de l'hôtellerie et des marques d'Accor, membre du comité exécutif