« Apporter un levier marketing aux innovations technologiques »
Innover c'est bien, transformer une innovation, notamment technologique, en succès commercial, c'est mieux. C'est autour de cet objectif que l'Atelier de l'Innovation a été créé en 1998. A mi-chemin du business angel et de l'incubateur de start-up, cette structure veut être un assembleur de compétences et de ressources. Les explications de son directeur général, Gilles Malfait.
L'Atelier de l'Innovation a été créé en 1998. En quoi êtes-vous acteur de l'innovation ?
Gilles Malfait : Notre rôle est double :
détecter et sélectionner les innovations technologiques, brevetées ou pas,
ayant de fort potentiel de commercialisation, puis apporter à ces projets la
valorisation marketing dont ils auront besoin pour devenir un succès
commercial. Concrètement, nous sélectionnons les projets qui représentent un
réel potentiel et nous détectons, avec l'aide des auteurs, tous les champs
d'exploitation de leur technologie. Nous rédigeons ensuite le business plan du
projet. Nous ne finançons pas nous-mêmes ces projets, mais nous réalisons des
tours de table auprès des sociétés de capital-risque.
Pourquoi avoir créé une structure intermédiaire entre les porteurs de projets et les sociétés de capital-risque ?
GM : La raison d'être de notre
structure est d'apporter un levier marketing à des innovations technologiques
dans le but de valoriser le franc investi par les sociétés de capital-risque.
Notre objectif est d'amener le projet initial au stade de produit industriel.
Les porteurs de projets sont souvent des scientifiques, pas toujours des
entrepreneurs. Or les structures de capital-risque recherchent toujours un
projet avec un entrepreneur et son équipe. Nous sommes donc le chaînon manquant
entre les scientifiques et les financiers. Nous participons au risque, puisque
nous ne sommes pas rémunérés sur le temps que nous passons avec nos porteurs de
projets. Nous prenons des participations dans les futures entreprises que nous
développons, à parité avec le porteur du projet. Notre rémunération
n'intervient que lorsque nous réalisons, comme les business angels ou les
sociétés de capital-risque. Nous prenons donc un risque réel aux côtés du
créateur et des investisseurs.
Comment intervenez-vous aux côtés des porteurs de projet ?
GM : Notre intervention consiste à
valider l'intérêt scientifique et l'intérêt commercial du brevet, et surtout à
apporter le levier marketing pour exploiter la technologie sur des marchés
auxquels le porteur du projet n'avait pas pensé. Nous utilisons pour cela des
techniques de créativité pour identifier de nouveaux terrains d'exploitation.
Ces brainstormings impliquent nos responsables scientifiques, marketing,
financiers, relations humaines... Et, bien sûr, le porteur du projet. Notre
métier est de transformer des projets en produits en apportant de la valeur
ajoutée à la création d'entreprises. Nous sommes des assembleurs de compétences
et de ressources. Nous fournissons toutes les compétences dont l'auteur a
besoin : scientifiques pour finaliser ses recherches en apportant un oeil
extérieur contradictoire, marketing pour définir la stratégie et les actions
marketing à mettre en place, financières pour définir les objectifs à moyen et
long terme et rédiger le business plan, relations humaines pour définir les
profils et recruter les membres de l'équipe. Nous fournissons indirectement les
ressources en organisant des tours de table pour présenter le business plan
auprès de partenaires financiers privés et de sociétés capital-risque.
Comment trouvez-vous des projets intéressants et quels sont vos critères de sélection ?
GM : Pour l'Atelier de l'Innovation, le
sourcing est fondamental car nous ne retenons en moyenne que 5 % des projets
qui passent entre nos mains. Il nous faut donc étudier 6 à 700 projets par an,
puisque notre objectif est de créer 30 à 35 sociétés tous les ans. Pour nous
alimenter en projets, nous avons passé des accords avec des centres de
recherche universitaires, publiques, avec des technopoles, etc. Pour qu'un
projet soit sélectionné par l'Atelier de l'Innovation, il doit avoir un
potentiel de valorisation d'au moins 100 millions de francs à 5 ans. Dès 2003,
nous aurons participé à la création d'une centaine de sociétés et nous
commencerons à céder nos premières participations.
Quels sont vos rapports avec le monde financier ?
GM : Le métier que nous
pratiquons est nouveau en Europe. Dans un premier temps, le monde financier ne
percevait pas l'intérêt de notre démarche et la valeur ajoutée qu'elle
représente. Aujourd'hui, au vu des sociétés que nous avons créées, nos
relations avec les financiers sont devenues de vrais partenariats qui
s'inscrivent dans la durée. Nous avons établi de vraies relations de confiance
avec les financiers. Les projets que nous leur présentons bénéficient d'un a
priori positif.
Comment comptez-vous vous développer dans les années à venir ?
GM : Notre équipe comporte actuellement 35
personnes et nous serons une cinquantaine l'année prochaine. Il s'agit sans
doute de la taille critique pour une organisation comme la nôtre. Le
développement passera donc par la duplication, en France peut-être, en Europe
certainement. Ce développement devrait se faire assez naturellement car, à
notre connaissance, le métier tel que nous le pratiquons, n'existe ni en
France, ni en Europe. On ne peut bien sûr pas exclure que des sociétés
concurrentes se créent dans les mois et les années à venir. Mais cela va sans
aucun doute développer notre marché dans sa globalité.