Vers plus de publicité comparative
Il y a un peu plus de dix ans, le législateur autorisait la publicité comparative en France. Pourtant aujourd'hui, il est encore rare de découvrir, dans les campagnes publicitaires ou de marketing direct, de telles publicités. Pourtant aussi, il est plutôt habituel de découvrir, à la lecture de cette chronique ou de celles de revues juridiques, de multiples commentaires de décisions de justice sur de telles publicités. Aussi, face à cette situation, une réforme s'imposait.
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L'entrée en vigueur de l'ordonnance du 23 août 2001 (1), modifiant la
réglementation sur la publicité comparative, était d'autant plus attendue que
le législateur communautaire - mais aussi ceux des autres pays membres de la
communauté - avait adopté des règles, d'ores et déjà, plus souples que celles
existantes en France. Cette réforme pourrait donc permettre aux créatifs de
développer plus de campagnes et de publicité comparative et devrait également
permettre aux juristes de mettre un terme à de nombreuses discussions. Elle
s'organise autour de trois axes principaux : - fin de l'obligation préalable
de communiquer la publicité à l'annonceur comparé, - loyauté et exactitude des
messages, - plus de liberté dans le choix des caractéristiques ou des produits
comparés.
Le concurrent comparé
Une des premières
innovations de la réforme est que, désormais, peuvent être autorisées tant les
publicités comparatives où le nom d'une entreprise, ou ses marques, sont cités
que celles où les concurrents ne sont qu'indirectement identifiés. En effet,
une des grandes difficultés, eu égard aux dispositions antérieures du code de
la consommation, résultait du fait que ne pouvaient être licites que les seules
publicités où les concurrents étaient désignés par leurs noms, leurs marques,
voire leurs produits ou services. Un point sur lequel les juges ont été amenés
à se prononcer et pour lesquels, ils ont eu tendance, ces dernières années, à
considérer que, même indirectement identifiable, les dispositions sur la
publicité comparative pouvaient s'appliquer. La deuxième innovation, là encore
essentielle, concerne l'abandon de la communication préalable de la publicité.
Auparavant, avant de mettre en oeuvre une campagne publicitaire, il convenait
en effet de communiquer les messages comparatifs aux annonceurs cités. Cette
obligation, à l'origine, là encore, de bon nombre de décisions de justice,
était particulièrement lourde lors de la mise en place de toute campagne de ce
type et entraînait, en règle générale, la cessation de la diffusion du
comparatif.
La loyauté des messages comparatifs
Si
cette réforme réaffirme que la publicité comparative ne saurait être autorisée
que si elle est objective et véridique, elle innove également en explicitant
plus clairement les modalités de licéité des publicités comparatives. Outre le
fait que l'annonceur doit, dans un bref délai, prouver l'exactitude matérielle
des énonciations, indications ou présentations contenues dans sa publicité,
cette comparaison ne peut également : - tirer indûment profit de la notoriété
attachée à une marque de fabrique, à un nom commercial ou à tout autre signe
d'un concurrent, quel qu'il soit, - entraîner le dénigrement dudit concurrent,
- engendrer des confusions entre l'annonceur et le concurrent ou avec les
marques de ce dernier, - présenter des biens ou des services comme une
imitation ou une reproduction d'un bien ou d'un service bénéficiant d'une
marque ou d'un nom commercial protégés... Dès lors, la loyauté, l'objectivité
mais également la véracité restent des règles essentielles qui président aux
publicités comparatives.
Plus de liberté dans le choix des produits ou des caractéristiques comparées
Si ces contraintes de véracité,
de loyauté ou d'objectivité s'appliquent à toutes campagnes publicitaires, il
n'en reste pas moins vrai que des règles spécifiques existent pour les
publicités comparatives. La comparaison doit en effet porter sur des biens ou
services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif. A l'inverse, la
notion de "produits ou services de même nature" n'a pas été reprise par le
législateur. De même, s'il est réaffirmé que la comparaison doit être objective
et porter sur une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes,
vérifiables et représentatives de ces biens ou services, il est également
précisé que la comparaison peut être effectuée que pour une seule de ces
caractéristiques. Le prix peut être un de ces critères. Enfin, l'ensemble des
contraintes liées aux comparatifs spécifiques en matière de prix n'existe plus.
Or, là encore, l'avancée est essentielle, tant pour les juristes que pour les
créatifs, puisqu'à de nombreuses reprises, les tribunaux avaient pu considérer
que le fait de n'effectuer un comparatif que sur une seule caractéristique ou
sur les seuls prix était illicite (2). Les qualités des caractéristiques sur
lesquelles la comparaison est fondée, à savoir des caractéristiques
"essentielles, pertinentes et vérifiables", restent similaires à celles
existantes. Toutefois, désormais, il conviendra que ces caractéristiques soient
représentatives du bien ou du service. Une nouvelle notion, qui devrait encore
entraîner de multiples difficultés tant pour les juristes que pour les
créatifs. Enfin, dans l'hypothèse où la publicité comparative vise une offre
promotionnelle, encore convient-il de le préciser. (1) Article "A vos Plumes",
Marketing Direct n° 57, septembre 2001. (2) Article "Publicité comparative",
Marketing Direct n° 40, octobre 1999.
En bref
Si on ose aujourd'hui inviter les créatifs à proposer plus de publicité comparative, il n'en reste pas moins vrai qu'un certain nombre de précautions restent à prendre, à savoir : - analyse du concurrent, - vigilance lors du choix des produits, - identification claire des caractéristiques comparées, - preuve nécessaire pour attester de la véracité de ces dires.