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Transparence et loterie

Le 6 septembre 2002, dans une affaire mettant en cause Maison Française de Distribution (MFD), la Cour de cassation a rendu une décision, très attendue, dans le domaine de la vente par correspondance. Une décision essentielle à connaître à ce jour, et ce, d'autant que tous les médias s'en sont fait l'écho et que tous les consommateurs s'imaginent désormais gagnants du premier lot.

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Par cette décision, la Cour a considéré que l'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée, sans mettre en évidence l'existence d'un aléa, s'oblige, par ce fait, à le lui attribuer. Une décision qui ne signifie pas pour autant que tout organisateur devra offrir ses lots à qui le lui réclamera. En effet, la même Cour a condamné, le même jour, un participant à verser à une entreprise, dans des faits similaires, une somme symbolique pour procédure abusive. Seule différence : dans cette dernière espèce, le consommateur savait pertinemment qu'il n'avait pas gagné ce lot puisqu'il avait joint, lors de sa demande de cadeaux, une lettre par laquelle il précisait que la somme qu'il avait gagnée devait lui être payée et qu'à défaut, il saisirait ses avocats. Ces deux décisions, si elles semblent contradictoires, sont d'un point de vue strictement juridique tout à fait logiques. La principale question à se poser dès lors, tant avant le lancement d'un jeu que lors de la demande de cadeaux, concerne bien évidemment le point essentiel de savoir si le consommateur peut croire en la réalité de son gain. Transparence, mais également vérification de la légalité de l'opération envisagée restent donc les deux mots-clés avant de mettre en place toute opération de ce type.

Loterie et organisation


S'il est toujours possible d'organiser des concours sous réserve qu'il n'existe pas de hasard, il est beaucoup plus difficile d'organiser une loterie, un tirage au sort, un sweepstake ou une opération soumise expressément à la réglementation. La loi du 21 mai 1836 considère, en effet, comme loterie toute "vente d'immeubles, de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort ou auxquelles auraient été réunies des loteries ou autres bénéfices dus, même partiellement, au hasard, et plus généralement, toute opération offerte au public sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait acquis par la voie du sort". Dès lors, la jurisprudence qualifie traditionnellement de "loterie prohibée", toute opération qui réunit cumulativement, les critères constitutifs du délit, à savoir l'offre au public, suscitant l'espérance d'un gain, déterminé par le hasard et en contrepartie d'un sacrifice financier du participant. Aussi, tous les jeux de hasard ou loteries, quelle qu'en soit la forme, quel qu'en soit le média (Minitel, Internet, téléphone, presse ou mailing...) sont susceptibles d'être sanctionnés. Par exemple, ont été interdits des jeux payants au cours desquels il était demandé aux participants qui gagnerait le Tour de France. De même, a été sanctionnée l'offre de participation à une loterie au cours de laquelle étaient offerts des bons d'achat à valoir sur des achats ultérieurs. Découvrir le hasard ou le sacrifice financier dans une opération commerciale sera dès lors toute la difficulté dans l'organisation d'un jeu aux fins de savoir si ce jeu peut être organisé.

Loterie et transparence


Après s'être assuré de la régularité de l'opération promotionnelle, des règles de présentation strictes devront également être respectées pour présenter tout jeu. Les articles L 121-36 et suivants du Code de la consommation, d'interprétation stricte, posent en effet un certain nombre de conditions concernant la présentation des loteries organisées par voie d'écrit. Des règles essentielles puisqu'elles ont déjà pour principal objectif de mettre fin à la pratique de certaines sociétés dont les publicités laissent croire aux participants à des jeux qu'ils pouvaient être l'un des gagnants. Des règles qui, si elles sont respectées, limitent la croyance du consommateur en l'espérance de gain. Distinguer le bulletin de participation de tout bon de commande, éviter toute confusion avec un document administratif, bancaire ou bien avec une publication dans la presse d'information, présenter un inventaire lisible des lots mis en jeu, permettent au consommateur de savoir qu'il peut ne pas avoir gagné. Autre élément essentiel pour la transparence : le règlement du jeu, dont un extrait doit figurer dans les documents commerciaux et qui devra être déposé auprès d'un officier ministériel. Une mention en ce sens devra également figurer dans les documents publicitaires. Ce règlement complet devra bien évidemment être adressé, à titre gratuit, à toute personne qui en fera la demande. Suite à la dernière décision de la Cour de cassation, gagner le lot principal va redevenir un rêve pour tous les clients vépécistes.

En bref


Créatifs et sociétés de vente à distance ne pourront aujourd'hui qu'aller vers plus de transparence, tant dans le contenu du message publicitaire que dans les modalités de participation aux loteries. Ainsi, - rédiger un règlement clair et précis, - s'assurer que la présentation générale des documents respecte les dispositions énumérées aux articles L 121-36 et suivants du Code de la consommation, - améliorer la transparence de cette opération publicitaire et les modalités d'offre de cadeaux, devront rester les règles les plus élémentaires de tous les concepteurs.

Brigitte Misse

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