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Téléphone et droit : du nouveau

Le téléphone est devenu aujourd'hui un des principaux outils utilisés en marketing direct. Outil de vente ou de prospection, il n'en reste pas moins particulièrement encadré. Au cours de l'année dernière, les juges, ont rendu deux décisions particulièrement intéressantes concernant le recours à ce média. La première a consacré l'application aux ventes effectuées par téléphone de certaines dispositions issues du démarchage à domicile. La seconde, quant à elle, a reconnu qu'il n'existait pas d'envoi forcé, même si le consommateur, suite à un appel téléphonique, n'avait pas retourné sa lettre de confirmation signée. Deux décisions qui viennent se juxtaposer aux précédentes contraintes juridiques, d'ores et déjà édictées pour le téléphone. Contraintes qu'il importe de connaître pour toute campagne de phoning et ce, qu'il s'agisse de promotion ou de vente par téléphone.

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TÉLÉPHONE ET PROSPECTION


Dès 1996, les juges de la Cour de cassation ont posé comme principe que la vente conclue dans un magasin, avec un consommateur invité par téléphone à s'y rendre sous prétexte de retirer un cadeau, était soumise à la réglementation du démarchage à domicile par l'application de l'article L 121-21 du Code de la consommation. Dès lors, en fonction du média choisi pour effectuer une publicité et en fonction de la technique de vente utilisée, il apparaît que des ventes, conclues dans les magasins eux-mêmes, se retrouvent soumises à un corpus juridique particulièrement draconien, à savoir celui de la vente à domicile. En effet, les règles encadrant la vente à domicile exigent un formalisme précis (s'agissant de la présentation du contrat), l'interdiction de recevoir des fonds, et prévoient un délai de réflexion spécifique. Se posait dès lors la question de savoir si des ventes effectuées par des opérations de phoning, au domicile d'une personne, pouvaient également être soumises aux règles sur le démarchage à domicile. Les juges de la Cour de cassation ont pu confirmer que tel est le cas, puisque la vente de caisses de vin, effectuée dans le cadre d'une opération de phoning, serait assimilée à une vente à domicile.

VENTE ET TÉLÉPHONE


Le Code de la consommation lui-même et plus particulièrement l'article L 121-27 vise expressément le démarchage par téléphone ou par tout moyen technique assimilable. A cet effet, il prévoit que le consommateur ne peut être engagé que par sa signature. De plus, ce consommateur bénéficie d'une faculté de rétractation lui permettant de retourner, comme toute vente à distance, la marchandise dans un délai de sept jours à compter de sa réception. Face à ce texte, se posait la question de savoir s'il était nécessaire, avant d'expédier les produits demandés par téléphone, d'attendre le retour signé de la lettre de confirmation du consommateur. L'an passé, les juges du Tribunal de police de Vanves ont eu à examiner ce point et plus particulièrement eu égard aux dispositions afférentes aux envois forcés. Une entreprise de vente par correspondance, suite à une campagne de marketing téléphonique, avait en effet expédié à un consommateur, l'ayant demandé par téléphone, un produit. Or, ce consommateur contestait l'avoir acheté. Dès lors, la DGCCRF considérait qu'il existait un envoi forcé puisque l'on ne pouvait rapporter la preuve du contrat et ce, d'autant que la loi prévoit que le professionnel doit adresser aux consommateurs une confirmation de l'offre qu'il lui a faite. Du fait de l'envoi de la lettre de confirmation et de l'acceptation du produit, les juges du Tribunal de police de Vanves ont, dès lors, considéré que ne pouvait exister d'envoi forcé.

TÉLÉPHONE ET VIE PRIVÉE


Enfin, ne peuvent être ignorées les difficultés liées à l'utilisation du téléphone eu égard à la vie privée. S'il n'existe pas, à l'heure actuelle, de dispositions spécifiques visant à encadrer son utilisation, il n'en reste pas moins vrai, à ce titre que des codes de déontologie ont été édictés pour réguler ces appels. C'est ainsi que le Syndicat du Marketing Téléphonique a pu prévoir qu'aucune sollicitation commerciale ne sera effectuée au domicile d'un particulier, sinon lorsqu'un lien préalable avec la société aura été établi avec ce particulier et à son initiative ou si celui-ci est déjà client de l'entreprise. De même, des dispositions particulières ont été édictées par le Bureau de Vérification de la Publicité. Ce dispositif, encadrant les appels téléphoniques, est également renforcé, s'agissant de l'utilisation ou du recours à certains outils aujourd'hui fréquemment utilisés sur les plates-formes téléphoniques. Ainsi, l'utilisation des automates d'appels est strictement encadrée. En effet, les dispositions afférentes à la loi Informatique, fichiers et libertés ont vocation à s'appliquer. Ce qui entraîne une obligation de déclaration auprès de la Cnil, mais également des difficultés, lors de son utilisation, en cas notamment de composition automatique des numéros téléphoniques. Si une plus grande prudence s'impose lors de recours à des automates d'appels - le non-respect des dispositions susvisées s'entendant de sanctions pénales -, il en est de même des autocommutateurs permettant de procéder à des enregistrements téléphoniques. La mise en oeuvre de ces outils, de plus en plus fréquente, doit, là encore s'effectuer tant dans le respect de la loi Informatique, fichiers et libertés que dans le respect des dispositions afférentes à la vie privée. Il s'ensuit un ensemble de démarches nécessaires préalables à sa mise en oeuvre telles que déclaration des écoutes téléphoniques, déclaration auprès de la Cnil, information des salariés, information du comité d'entreprise, information des client... En l'absence d'une seule de ces démarches, des sanctions pénales sont susceptibles de s'appliquer.

En bref


Si le téléphone est devenu un outil indispensable à toute campagne de marketing direct, encore convient-il d'examiner très précisément les modalités liées à son utilisation, ainsi que les conséquences en résultant. Dès lors, pour toute campagne de phoning, il convient de veiller à : - effectuer les déclarations préalables, - présenter des offres claires dans les scripts téléphoniques, mais également les méthodes permettant de rapporter la preuve des échanges téléphoniques, - examiner la campagne de phoning afin d'identifier précisément la réglementation applicable à la campagne effectuée et les conséquences en résultant, - assurer le respect des droits tant de ses salariés que des personnes contactées par téléphone.

Brigitte Misse

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