Portrait-robot du bon segment
L'analyse de vos données vous amène à découper votre clientèle ou vos prospects en plusieurs segments. Il vous faut ensuite choisir ceux sur lesquels vous allez travailler. C'est ce que l'on appelle classiquement le ciblage. Comment faire ?
Question : En première analyse, comment évalue-t-on si une segmentation est pertinente ?
Réponse : Il faut vérifier qu'elle
présente à la fois une grande homogénéité au sein de chaque segment, et la plus
forte hétérogénéité possible entre tous les segments. En effet, segmenter
revient certes à regrouper des personnes ou des entreprises qui ont des besoins
en commun. Mais, pour que cela vaille la peine de créer une offre, qui leur
soit spécifique, encore faut-il que leurs attentes soit suffisamment
différentes de celles des autres segments. Sinon l'offre destinée à un public
risque d'intéresser celui d'un autre segment, pour lequel vous aurez alors créé
et mis en place, en pure perte et avec les coûts que cela suppose, le plan-mix
délaissé.
Question : La segmentation repose sur une ou plusieurs informations données par les clients, ou constatées lors de leurs actes d'achat et/ou de consommation. Comment en estimer a priori la fiabilité ?
Réponse : Une bonne donnée marketing est une information qui permet de
prendre une décision… marketing. Cette information est-elle disponible au sein
de fichiers que vous souhaitez louer par ailleurs ? Si vous devez la poser à
vos futurs clients, vos interviewés ne seront peut-être pas capables de
répondre de façon valable à votre question, par incompréhension, ignorance ou
oubli. Cela est particulièrement le cas lorsque vous abordez les estimations
quantitatives lourdes à évaluer : “combien utilisez-vous de timbres par an ?”
Par ailleurs, la donnée segmentante fait-elle appel à un fait ou à une opinion
? A la question “Aimez-vous lire ?”, une réponse positive ne nous permet pas
d'évaluer l'implication de la personne dans la lecture : un livre par jour, par
semaine, par mois, par an ? Après tout, bien des gens aiment lire mais ne
trouvent pas le temps de le faire. “Combien de temps lisez-vous chaque jour ?”
fait appel à un fait, qui par la suite s'avère plus facile à analyser pour
segmenter.
Question : Sur quels critères majeurs évaluer si un segment vaut la peine d'être “travaillé” ?
Réponse : Il faut
qu'il soit volumineux, mesurable et accessible. Volumineux au sens qu'il doit
comporter suffisamment de consommateurs pour que leurs achats amortissent les
frais fixes de conception et mise en place du plan-mix qui leur est dédié. Ce
critère s'estime selon trois axes complémentaires : nombre de
personnes/entreprises concernées, leur budget disponible, et la croissance
attendue sur ce marché. La réduction des coûts fixes liés aux technologies
utilisées par le MD (impression numérique des mailings, e-mailings, etc.) a
abaissé le niveau à partir duquel il est profitable de s'intéresser à un
segment. Mesurable, car tout business plan nécessite de savoir où l'on va!
Pendant plusieurs années, personne n'a su dire quelle était et quelle serait la
taille du segment des femmes internautes : d'une étude à l'autre, les chiffres
oscillaient entre 3 et 30 % ! Un facteur 10 incompatible avec toute prévision
de chiffre d'affaires.
Même remarque actuellement pour le bricolage féminin.
Cela ne signifie pas qu'il faille rejeter le segment, mais que s'y lancer est
une action - et un investissement ! - “pour voir”… et être le premier sur le
marché. Enfin, un segment doit être accessible : le “ticket d'entrée” ne doit
pas être trop coûteux pour s'y lancer. Par exemple, monter une société de
coursiers nécessite peu d'investissement : un téléphone, quelques pubs
localisées, du personnel non qualifié utilisant ses propres “mobs”, et le tour
est joué. Par contre, lancer une nouvelle marque de bière impose d'acquérir un
process et une chaîne de fabrication difficiles à maîtriser, et d'avoir une
présence publicitaire supérieure à celle de ses concurrents, qui saturent déjà
les espaces encore licites pour les produits alcoolisés. Allons plus loin :
cibler un segment peut être rendu impossible par la détention d'un brevet ou
d'une licence d'importation exclusive par un concurrent…
Question : A propos de vos concurrents… quelles questions devez-vous vous poser quant à la pertinence de s'intéresser à tel ou tel segment ?
Réponse :
D'abord, évidemment, la première question à se poser est de savoir quels
concurrents font déjà partie de l'offre de ce marché. Ensuite, par rapport à
ceux-ci, de quelles compétences distinctives vous disposez pour offrir une
réelle alternative à leurs clients. Enfin, évaluez les forces qui vous
permettront de défendre vos positions en cas d'attaque concurrentielle.