Pascal Thamtham (Higher) Trouver le croisement entre offre pertinente et canal média
La fidélisation n'en finit pas de générer de nouveaux concepts, de faire des émules… Dernière en date : Higher, issue du regroupement des expertises de LaSer et de High Co dans le domaine de la relation client. Pascal Thamtham, président d'Higher, présente le fonctionnement de cette nouvelle entité et sa vision de la fidélisation.
Marketing Direct Quelle idée a présidé au lancement de Higher ?
Pascal Thamtham En fait, il existe des liens historiques entre
les deux partenaires, qui ont beaucoup travaillé sur la grande distribution.
Par ailleurs, K Agency (High Co) est une des agences de LaSer. L'idée est de
regrouper et de conjuguer, dans le domaine du marketing client (au sens large),
les meilleures expertises sous la forme d'une joint venture 50/50 entre High Co
et LaSer. High Co est plutôt axée vers les approches amont (stratégies de
communication, de marque). De son côté, Laser est plus orientée vers les
aspects opérationnels, de gestion de programme. L'exemple typique de son
savoir-faire est S'Miles, qui est une alliance des programmes de fidélité
Points Ciel (groupe Galeries Lafayette) et du programme Club Avantages (qui
regroupe Shell, Casino, Euromaster…). J'ai moi-même été à l'origine de ces deux
programmes. Et j'ai rejoint Laser il y a quatre ans pour créer S'Miles.
MD Comment se positionne cette nouvelle entité ?
PT
Le positionnement d'Higher est de mettre sur le marché des solutions nouvelles,
clés en main et opérationnelles concernant les programmes de fidélisation. A ma
connaissance, cela n'existe pas sous cette forme. Avec comme objectif : le
retour sur investissement. Compte-tenu de notre expérience, nous pouvons
procéder à des analyses détaillées des cycles de vie des programmes.
Aujourd'hui, les annonceurs ont beaucoup investi, il faut exploiter les bases
de données. De plus, avec Higher, nous proposons à l'annonceur d'avoir un
interlocuteur unique.
MD Comment Higher est-elle accueillie par le marché ?
PT Notre activité a démarré au début de l'été dernier.
Nous avons déjà présenté notre offre à une quarantaine de sociétés (issues de
l'univers de la distribution, de la banque-assurance, des télécommunications).
Ce premier tour de piste génère beaucoup d'espoir, la quasi-totalité de ces
sociétés expriment le besoin de nous revoir… Nous pouvons d'ores et déjà
annoncer une signature. Monoprix, qui a lancé son programme de fidélité en mai
dernier, a adopté une de nos solutions d'animation, en l'occurrence la solution
Stimulation, pour stimuler son réseau de caissières lors du lancement de la
carte (500 000 cartes ont été distribuées).
MD Justement, comment s'articule votre offre ?
PT Notre offre produit comporte des
solutions d'études et des solutions d'animation. Quatre solutions d'études ont
été architecturées. La solution Satisfaction, basée sur l'access panel TNS
Sofres, mesure l'efficacité d'un programme de fidélité et la satisfaction qu'il
génère. Transfert, qui permet de mesurer et analyser les évolutions des
comportements des clients d'un programme d'une année sur l'autre, assortie
d'une solution plus poussée Transfert 2 et Marque, étudie l'apport du
dispositif relationnel par rapport à l'image de la marque. Cette solution
packagée s'appuie sur une étude quantitative ad hoc, basée sur 450 interviews
clients. Pour toutes nos solutions, nous avons toujours une volonté de mise en
perspective (étude de la concurrence, benchmark de 25 à 30 programmes en France
et à l'international). Le deuxième volet de notre offre, ce sont des solutions
d'animation, au nombre de cinq. La solution Stimulation (incentive pour les
forces de vente). La solution Rendement, qui permet une optimisation des
campagnes de marketing direct. Pour cette solution, nous travaillons sur des
petites volumétries. La solution Prospection a pour but de recruter des
prospects à fort potentiel et ce, en créant des consumer magazines
multipartenaire, soit sur un thème spécifique (Noël, Fête des mères…) soit sur
un secteur. La solution Promotion est l'adaptation d'un concept développé par
une société américaine (coupons de réduction à charger sur Internet ou sur des
bornes en magasin). Enfin la solution Echantillon consiste en une opération
d'échantillonnage clés en main.
MD Il y a déjà beaucoup d'intervenants (agences, conseils, prestataires, SSII…) présents sur ce marché. Croyez-vous qu'il y ait de la place pour tout le monde?
PT Nous
pensons qu'il n'existe pas d'offre similaire regroupant tout ce qui est amont
et tout ce qui est technique. En fait, nous avons des concurrents sur chaque
brique. Notre parti pris est de regrouper le front-office et le back-office,
c'est-à-dire le marketing et la technique. Cette synergie n'existe pas
réellement aujourd'hui. Nous ne sommes ni une agence, ni une société d'études.
Nous sommes une société de services orientée solutions. En outre, nous pensons
que les équipes Higher ont une expertise historique dans ce domaine.
MD A ce propos, comment est structurée l'équipe d'Higher ?
PT Cette joint venture; à 50/50 entre High Co et Laser, est une
SAS (Société par action simplifiée) au capital de 50 000 euros. Elle comprend
quatre personnes, deux proviennent de High Co (Elisabeth Cony Exertier et
Damien Simon) et deux sont d'origine Laser : Sandra Mourgue et moi-même, qui
préside la structure. J'ai à la fois une culture annonceur, une culture agence
et celle de prestations de services avec Laser.
MD De quelle façon s'établit votre diagnostic ?
PT Les questions que l'on se
posait il y a dix ans ne sont plus les mêmes aujourd'hui (les programmes
première génération tels Points Ciel, Total… ont évolué). Par ailleurs, les
questions sont différentes en fonction du niveau d'avancement, de maturité du
programme. Higher identifie les points faibles d'un programme pour les
travailler.
MD A votre avis, quels sont les annonceurs les plus avancés en matière de programme de fidélisation ?
PT Ce sont les
distributeurs. Dans la foulée viennent les banques, les opérateurs de
télécommunications. Dans la distribution, un client rentre ou adhère
volontairement au programme. En revanche, dans les télécommunications, le
consommateur est inscrit automatiquement dans le programme de fidélité. Les
opérateurs de télécommunications vont aller beaucoup plus vite. Et, d'ailleurs,
il va falloir qu'ils aillent beaucoup plus vite. Quant au secteur des banques,
il est plus proche de la distribution, car elles ont une vraie connaissance du
comportement du client.
MD Pour vous, quel est le programme le plus abouti ?
PT C'est celui du distributeur Tesco, en
Grande-Bretagne. Il semble le plus abouti en termes d'historisation des données
clients et en termes de traitement.
MD Quel futur pour ces programmes ?
PT Les grands programmes n'ont pas encore basculé
dans l'optimisation des données, ils sont encore assez généralistes, assez
génériques. Beaucoup de distributeurs ont investi sur la connaissance client,
car pour un distributeur, avoir un programme de fidélité fait partie du mix de
base. La différence va maintenant se faire sur le traitement des données
client. Plus globalement, dans les années qui viennent, on verra l'émergence du
marketing personnalisé, différencié appuyé sur l'intelligence de l'analyse des
données. Pour passer à cette phase, il fallait constituer des bases de données.
Il faut maintenant les analyser, les rendre efficaces, opérationnelles.
MD Un des reproches faits à ces programmes est qu'ils sont coûteux et pas toujours rentables?
PT Nous, nous faisons le pari qu'ils
peuvent coûter moins cher, en s'appuyant sur des solutions industrielles de
support, en jouant sur les aspects mutualisés. On peut jouer aussi sur
l'approche multicanal, qui est extrêmement intéressante. Il existe des supports
et des médias de communication qui sont moins onéreux que le support papier,
tels que le SMS, l'e-mailing… Il faut trouver le croisement entre l'offre
pertinente et le canal média (papier, e-mailing, SMS…). On peut s'apercevoir
aussi que tel segment n'est pas réceptif aux réductions mais préfère d'autres
services, tels que des avant-premières, des soldes, ce qui est contre-intuitif.
Donc, rien ne sert de continuer à lui proposer des réductions.
MD Quels sont vos objectifs pour Higher ?
PT Nous devrions signer 5
à 10 clients, d'ici à la fin de l'année. Le marché de la relation client au
sens large, call centers compris, pèse environ 150 à 250 millions d'euros. Si
on le ramène à de la fidélisation pure, on arrive à peu près à la moitié de
cette fourchette. Notre objectif est d'être à 5% de part de marché d'ici
environ trois ans. Higher, qui s'appuie sur les outils technologiques de chacun
des deux groupes, n'a pas eu d'investissement technique à faire.
L'investissement réalisé est purement humain.
L'entreprise
Higher est une joint venture détenue à 50/50 par High Co et LaSer High Co, créé en 1990, est un acteur des marketing services, construit autour de trois divisions : consulting, communication et solutions. Coté sur le nouveau marché Euronext. Actionnaire principal : le britannique WPP group plc (34% du capital) CA : 24 millions d'euros en 2003. Effectif : 822 personnes. Laser est la branche services du groupe Galeries Lafayette. A partir d'une activité cartes, elle a développé des expertises dans le domaine de la relation client. Implantée dans huit pays d'Europe, Laser emploie plus de 6 500 personnes et a réalisé, en 2003, un chiffre d'affaires de 1,125 milliard d'euros.
Parcours
Pascal Thamtham 47 ans. IEP Paris. Débute son parcours professionnel comme chef de groupe de marques au sein du groupe Pernod-Ricard où il reste dix ans (1980-1990). Puis il est nommé directeur marketing du groupe Casino, où il participe au lancement de Points Ciel (1991-1996). Il devient ensuite directeur associé de Fideliting (groupe Rapp Collins), où il met au point le Club Avantages (1996-2000). Puis il intègre Laser, où il est nommé responsable des programmes de fidélisation (Points Ciel, S'Miles…). Depuis l'été 2004, il est président de Higher.