Loteries : le gros lot en question
La Cour de cassation estime que les sociétés organisatrices de loterie sont liées par un "quasi-contrat" avec les consommateurs. Cette notion permet de sanctionner l'ambiguïté des annonces liées aux loteries.
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La Cour de cassation a rendu, le 6 septembre dernier, un arrêt portant sur
la responsabilité civile des sociétés organisatrices de loteries publicitaires
en se penchant sur le cas de Maison Française de Distribution (MFD), placée en
liquidation en 1999. La haute juridiction a retenu la notion de quasi-contrat
(article 1371 du Code civil) pour fonder la responsabilité des entreprises qui
utilisent les jeux de loterie. "L'organisateur d'une loterie qui annonce un
gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa
s'oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer." Le recours à la
notion de quasi-contrat renforce la protection des consommateurs, en
particulier des plus faibles... ou des plus naïfs. Pour Isabelle Faujour,
adjointe du directeur juridique de l'UFC-Que Choisir : « Cela devrait inciter
les sociétés de VPC à mieux mesurer les termes de leurs communications. » Cette
décision cherche à épurer les pratiques, en sanctionnant plus lourdement les
entreprises réellement fautives. Mais avec le risque de voir le montant des
indemnisations dues aux particuliers s'envoler. Selon Etienne Drouard, avocat
au Cabinet Gide Loyrette Nouel : « Si la société a complètement menti en
s'engageant à remettre 1 million d'euros, on pourra envisager qu'elle doive 100
% de sa promesse. Si sa communication est seulement ambiguë, les tribunaux
pourront, au contraire, juger qu'il s'agit de ne rien verser ou seulement 10 %
du gain promis. » Dans le cas présent, MFD avait organisé une loterie
(sweepstake) dont le prétirage ne sélectionnait que les candidats... Mais
laissait croire aux consommateurs qu'ils étaient, bel et bien, les "heureux
gagnants" d'un chèque d'un montant de 15 240 E (105 750 F). L'attrape-nigaud
avait bien fonctionné puisque le plaignant, Laurent Bossa, avait cru qu'il lui
suffisait de renvoyer le bon d'acceptation pour toucher son gain. Bien sûr, il
n'avait jamais reçu ni chèque ni réponse. D'où sa décision de porter plainte
pour "publicité trompeuse" avec le soutien de l'UFC-Que Choisir. C'est cette
plainte qui, de rejet en pourvoi, est l'objet de l'arrêt de la Cour de
cassation. Du côté de la Fevad (Fédération des entreprises de vente à
distance), on s'inquiète de l'amalgame, qui pourrait être fait entre loteries
et vente à distance. La fédération rappelle, que depuis cinq ans, le nombre de
plaintes concernant les loteries a diminué de manière significative. Mais qu'il
ne faut pas pour autant baisser la garde en termes de moralisation des
pratiques.