Les challengers des Pages Jaunes veulent une part du gâteau
Plus d'un milliard d'euros : voici la réalité sonnante et trébuchante du
marché des annuaires de professionnels. Quasi-monopole auparavant de France
Télécom avec Les Pages Jaunes, défié par quelques rares intervenants malgré
l'ouverture à la concurrence, ce marché a pris un coup de jeune avec Internet.
Finie la lourde gestion de l'impression papier et de sa diffusion locale et
nationale, diminués les frais de remises à jour régulières, facilitée la
gestion des bases de données... Autant d'avantages ajoutés au fait que l'outil
web, contrairement au Minitel, facilite la présentation des résultats de la
recherche. Localisation, services interactifs, alertes mails ou SMS, mise en
relation avec les sociétés recherchées : autant de services que les challengers
développent et mettent en avant pour prouver leur originalité. « La concurrence
sur le produit papier était bien plus délicate à mettre en place : la création
d'un annuaire papier et sa distribution demandaient des investissements
énormes, remarque Fabienne Rousselet, responsable Marketing Distribution des
Annuaires en ligne au sein des Pages Jaunes. Sur le Net, et avec l'accès aux
bases France Télécom, la concurrence s'est rapidement développée, les projets
étant nettement plus abordables. » Pour se tailler une part de gâteau, les
compétiteurs vont devoir affronter le Goliath déjà en place, Les Pages Jaunes,
en ligne depuis 1997. Les différents panels de mesure d'audience le placent
sans conteste en tête de liste, avec plus de 1,2 million de visiteurs uniques
en octobre 2001, selon le panel d'internautes à domicile de NetValue, et près
de 1,7 million pour le panel couplé domicile et bureau de Nielsen//Netratings.
La rentabilité de l'annuaire en ligne dépend toujours en partie de la vente
d'espace, comme pour les éditions papier.
L'annuaire vautson pesant d'or
Sur le Web, l'annonceur a une double assurance : être mis en
valeur dans la liste, mais aussi être placé en tête de celle-ci... La vente
d'espace s'est doublée d'une vente de référencement, pratiquée par quasi tous
les intervenants. Par exemple, lors d'une recherche effectuée sur Les Pages
Jaunes dans la catégorie "Fleuristes" sont listés tout d'abord par ordre
alphabétique les annonceurs qui ont acheté le module publicitaire le plus
complet, avec un lien vers leur propre site. Suivent, selon un second ordre
alphabétique, les annonceurs ayant souscrit à une offre moins complète. Et ce
n'est qu'une fois la totalité des listes d'annonceurs déroulées par type
d'offres achetées, que l'ensemble des autres professionnels, non payants, est
indiqué. Scoot ou L'Annuaire Soleil placent également en tête de liste les
annonceurs ; 1bis.com les présente à part sur une première page. En migrant sur
le Web, les éditeurs ont ajouté une autre corde à leur arc commercial : ils
sont également devenus de petites web agencies. Le développement de mini-sites
est visé par tous les acteurs du secteur. Quand on sait que Les Pages Jaunes
ont ainsi généré la création de 26 000 petits sites, développés par l'ODA, cela
donne à réfléchir ! Car le vrai marché des éditeurs on line ne se situe pas sur
le Web. Référenceur des centaines de milliers d'entreprises françaises, ils
visent avant tout les professionnels qui n'ont pas encore de vitrine on line.
Les artisans, les petits commerçants, les services divers aux particuliers,
sont autant de professions coeur de cible. Pour gagner le challenge de
l'annuaire en ligne, ce sont eux qu'il va falloir convaincre. « La réussite de
la vente d'un produit web dépend à 80 % de la confiance que le client a en
vous. C'est l'un des facteurs différenciants », lance David Garlot, chef de
projet Internet pour L'Annuaire Soleil. Chaque challenger a sa propre recette
pour gagner la confiance des professionnels. L'Annuaire Soleil compte sur son
capital confiance déjà acquis grâce au produit papier. Scoot a investi le
terrain avec une force de vente interne de 70 commerciaux. Faisant partie à 100
% de Vivendi, la société bénéficie également de l'appui d'une autre entreprise
du groupe, la Comareg, spécialiste des journaux gratuits, dont les 600
commerciaux relaient l'offre de l'annuaire. Planfax, de son côté, axe toute sa
stratégie sur la cartographie. Et Chabadam compte se développer en appliquant
le principe de la location d'enseigne : la société recrutera pour chaque
annuaire local un gérant, qui pourra devenir actionnaire de sa structure à
hauteur de 49 % maximum. Des atouts variables, qui devront résister à la force
de frappe des Pages Jaunes : une marque installée et une structure de vente
rodée. 1 450 commerciaux de l'unité Pages Jaunes de France Télécom gèrent en
effet la vente d'espaces sur le site, ainsi que celle des offres papier ou
encore la création de sites.