Le boom des vidéos interactives
Depuis le buzz généré par la campagne «A hunter shoots a bear» de Tipp-Ex, marketeurs et annonceurs connaissent un réel engouement pour la vidéo interactive et redoublent de créativité.
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Qui ne se souvient pas de la campagne vidéo participative «A hunter shoots a bear» de Tipp-Ex (groupe BIC)? Réalisée par l'agence Buzzman, elle a créé un buzz phénoménal qui a marqué l'année 2010. Bluffés, les marketeurs redoublent de créativité pour connaître le même succès. Les chiffres laissent rêveur: plus d'1 million de visiteurs uniques sur YouTube, plus de 25 millions de vues sur la chaîne Tippexperience de YouTube, et 7 500 tweets durant les 36 premières heures de la diffusion.
Stéphane Perrot / Agence Dufresne-Corrigan-Scarlett
« Avec la vidéo interactive, le contact avec la cible est plus long et, donc, plus utile aux marques. »
+ de 5 millions
DE VUES SUR LA CHAINE TIPPEXPERIENCE DE YOUTUBE POUR LA CAMPAGNE «TIPP-EX» DE BUZZMAN.
SUSCITER LA CURIOSITE
Que ce soit sous forme de jeux ou de séries, les vidéos publicitaires en ligne sont de plus en plus interactives. Emmanuel Manichon, de Perrier France, parle même de «révolution digitale». Les marketeurs ont compris qu'inciter les internautes à devenir acteurs de leur campagne marketing peut générer du trafic sur la Toile et créer du buzz Desperados a, par exemple, dépassé les 2 millions de visiteurs uniques dans 150 pays avec sa campagne virale sur YouTube, en avril dernier. C'est l'agence Dufresne-Corrigan-Scarlett qui a imaginé son plan de communication. L'objectif? Séduire les 18-25 ans et créer du buzz tout en construisant l'image festive et «hors-la-loi» («desperados» en espagnol) de la marque. Pour la campagne «The Desperados Experience», la consigne était de respecter le côté «premium» de cette bière, vendue 25 % plus cher que les autres. Dans la vidéo, une jeune femme invite l'internaute à participer à une soirée «chaude» où tout le monde danse de manière sexy. Pour cela, elle lui demande de casser un mur à l'aide de sa souris pour pénétrer dans ce mystérieux endroit, où... les invités boivent des bières Desperados.
Stéphane Perrot, directeur commercial chez Dufresne-Corrigan-Scarlett et responsable de cette campagne, détaille les nombreux avantages des campagnes de vidéos interactives: « Elles permettent de créer de la nouveauté auprès d'une cible très férue de nouvelles technologies Plus globalement, elles font vivre une réelle expérience autour de la marque La vidéo est aussi le seul média permettant à chaque consommateur de prendre la main sur l'histoire de la marque et de devenir véritablement prescripteur Et ce n'est pas tout, le contact avec la cible est plus long et, donc, plus utile aux marques. »
Imaginez-vous dans un club branché et décadent. Au fur et à mesure que vous cliquez, l'électro-pop fiévreuse du groupe Babe Youth envahit le club, la température grimpe, les esprits s'échauffent, les corps s'enlacent, l'ambiance est intense et le décor tout entier se met à fondre... Perrier devient alors l'ultime rafraîchissement... Voici le scénario de la campagne marketing digitale «Le Club Perrier», lancée en juin dernier par la marque d'eau pétillante. Sa particularité? Participative et évolutive, la vidéo comporte en fait plusieurs séquences que les internautes découvrent au fur et à mesure que le nombre de clics augmente. Imaginée pour la France, les Etats-Unis et le Canada par l'agence Ogilvy & Mather, la campagne se décline en six épisodes. « Ce niveau d'interactivité est une première mondiale, assure Emmanuel Manichon, directeur marketing de Perrier France (groupe Nestlé Waters). L'univers présenté devient de plus en plus «chaud» au fur et à mesure des épisodes... les spectateurs ont donc de plus en plus soif! » Une fois la 6e vidéo affichée, Perrier avait également prévu un concours. Les gagnants ont ainsi pu participer au tournage de la septième et dernière séquence, au cours d'une soirée organisée le 20 septembre dernier, à New York. A ce jour, les résultats de la campagne sont sans appel: 136 000 vues de la campagne en ligne en deux jours, déjà 1,4 million au bout de cinq jours et, début septembre, plus de 11 millions de vues!
TECHNO
QUELQUES CONSEILS POUR REUSSIR SA CAMPAGNE VIDEO
- Innover toujours plus car la cible se lasse vite;
- Innover toujours plus car la cible se lasse vite;
- Eviter le «déjà-vu»;
- Eviter le «déjà-vu»;
- Accompagner sa campagne digitale interactive avec un plan média (bannières, relais sur d'autres supports audiovisuels ou print...);
- Offrir la possibilité aux internautes de partager la campagne sur les réseaux sociaux type Facebook et Twitter.
ALIMENTER LE BOUCHE A OREILLE
Le but des vidéos interactives est non seulement de distraire les internautes le plus longtemps possible, mais aussi de susciter le bouche à oreille en optimisant les effets des réseaux sociaux. Plus l'histoire est ingénieuse ou le jeu original, plus la campagne aura de chances de devenir virale et donc d'être visionnée par le plus grand nombre. Là se trouve le point fort d'Internet: l'étendue du partage des informations à l'échelle mondiale! D'autant que le partage de vidéo est la tendance du moment, comme le prouve le succès de YouTube. Avec plus de 2 millions de vues par jour et 35 heures de vidéo mises en ligne chaque minute! Charal a souhaité profiter de cet engouement pour YouTube et a eu raison. La marque de viande bovine a, en effet, enregistré plus de 10 millions de vues pour sa campagne «Le Burger Charal», sortie en mai dernier. Réalisée par l'agence Leo Burnett, elle se présente sous forme de jeu. Le scénario? Déguisé en hamburger avec un accent belge, un homme essaie de trouver un stratagème pour rentrer dans la maison d'un jeune adolescent. L'internaute doit choisir son moyen de locomotion (une rampe, un trampoline ou un Chinois) et son arme (un caillou, une fusée ou une trottinette) pour pénétrer dans la maison. Malgré tout cet attirail, l'homme-hamburger n'y parvient pas. Le jeune garçon lance alors à la cantonade: «Te casses pas, pour un bon burger à la maison, c'est le burger Charal, et j'ai raison». Pour créer le buzz sur le Net, Charal a exploité la puissance virale des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter. Sa campagne rappelle l'esprit de «Bip Bip et Coyote» (diffusé à une époque dans?«Ca Cartoon», sur Canal+). Humour et ton décalé: une bonne recette pour capter l'attention des internautes...
JEROME TOUCHAEBOEUF / AACC
Broadcast yourself?
Pierre Magique Tchernia est toujours vivant, mais le type de télévision qu'il a créé est déjà en train de disparaître. La télévision moderne n'aura vécu qu'une quarantaine d'années. Même si l'actualité exceptionnelle et les dérives sensationnelles maintiennent encore le système. Entendons-nous, c'est bien le mode de diffusion passif qui perd de son attrait et non les contenus en tant que tels. Ils n'ont jamais remporté autant de succès. L'internet et le haut débit ont totalement fait exploser la consommation et la création de contenus vidéo. C'est aujourd'hui 57 % de la population française qui consomme de la vidéo en ligne!
Au-delà des volumes, c'est la façon dont nous consommons ces contenus vidéo qui a irrémédiablement changé. Trois phénomènes majeurs ont généré l'évolution du comportement des «vidéonautes»:
Les attentes du consommateur ont changé. Il souhaite consommer les contenus vidéo à la demande. Comme pour l'ensemble de ses achats, il veut être l'acteur de sa consommation et la personnaliser.
Les box d'accès à Internet mettent au même niveau de choix le contenu passif de la télévision et les autres contenus interactifs du Web, les jeux vidéo, la vidéo à la demande, voire nos propres productions vidéo.
Les outils de production vidéo sont devenus simples, accessibles et bon marché. Ainsi, tout le monde peut aujourd'hui produire des contenus. Certes, la qualité n'est pas forcement au rendez-vous, mais seule la quantité compte car il faut alimenter la demande.
En 1987, TF1 nous disait «Pour mieux vous informer et vous distraire, il n'y en a qu'une, c'est la Une!», puis, en 2009, «On se retrouve sur TF1». On est passé de l'unicité de distraction à «N'oubliez pas notre rendez-vous». Pendant ce temps-là, You Tube nous propose «Broadcast yourself. A tout moment, le consommateur est l'acteur principal de la production et de la diffusion. On est loin d'Andy Warhol et de ses prédictions quant au quart d'heure de célébrité mondiale offert à chacun par la télévision.
Se passer d'intermédiaire pour diffuser ses propres vidéos
Naturellement, ce type de diffusion de contenus s'est installé dans notre quotidien. En effet, quoi de plus simple que de rechercher une actualité qu'on n'a pas eu le temps de voir? Quoi de plus facile pour assembler un nouvel appareil; que d'en visionner la vidéo de montage? Sans oublier les aspects divertissants et pédagogiques de la vidéo sur Internet, aujourd'hui devenue la solution de simplification d'accès aux contenus.
Paradoxalement, les marques ne sont pas encore vraiment installées dans ce nouveau quotidien des consommateurs. Les habitudes ont la vie dure! Pourtant, il existe de beaux succès de marques dont les contenus vidéo capitalisent des millions de vues sur leur chaîne Youtube ou sur d'autres canaux existants sur le Net.
Après la fragmentation des audiences médias, l'enjeu, pour les marques, consistera à pouvoir se passer d'intermédiaire pour diffuser leurs propres contenus vidéo. Etre en relation directe avec le client en utilisant la richesse des contenus vidéo, encore un champ de possible sous exploité! Mais pour ça, les annonceurs et les agences doivent voir le contenu vidéo d'une autre façon et changer leurs habitudes du tout TV!
JEROME TOUCHEBOEUF
Depuis juillet 2010, Jérôme Toucheboeuf est le président de la délégation Customer Marketing de l'AACC, dont l'action, portée par ses agences, vise à valoriser l'expertise marketing client. Jérôme Toucheboeuf est aussi l'un des fondateurs, en 1997, de l'agence FullSIX. Depuis 2009, il est en charge de la coordination et du support opérationnel des agences du réseau international FullSIX (Grand Union, FullSIX, 6:AM).