La télévision interactive survivra-t-elle au Web ?
La télévision interactive affiche un démarrage lent. Les problèmes techniques et organisationnels ne sont pas encore tous résolus, et la vague Internet draine les budgets des annonceurs. Y a-t-il une survie en dehors d'un mariage forcé avec le Web ?
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Pour comprendre l'état de santé de la télévision interactive en France,
voici quelques chiffres qui donnent le pouls de ses deux acteurs principaux.
L'opérateur TPS est né en 1996, CanalSatellite lui a emboîté le pas en 1997. En
1999, TPS affichait quelque 800 000 abonnés. En juin 2000, ils étaient 900 000.
CanalSatellite en comptait 1,3 million en 1999, et 1,37 million au printemps
2000. En trois ans d'existence, CanalSatellite a pu aligner 17 annonceurs pour
des campagnes interactives. TPS en a comptabilisé entre 15 et 20 en 1999, et
plus de 20 en juin 2000. Une progression qui n'a rien de fulgurant. La vitesse
de développement s'est manifestement réduite. Pourtant, les médias
électroniques vivent aujourd'hui l'explosion que l'on connaît. Comment alors
expliquer ce démarrage lent des télés interactives ? Sont-elles victimes du
développement d'Internet grand public ? Pour répondre à ces questions, voici
d'abord une revue des techniques utilisées et des perspectives. Dès sa
naissance, la télévision interactive a été présentée comme un formidable
support pour la publicité interactive, pour le marketing direct et pour les
ventes à distance. « Nous avons diffusé une première publicité interactive en
1998, pour la marque Audi, se souvient Remi Collard, directeur commercial de
Thématique Régie, filiale de Canal+, en charge de la publicité de
CanalSatellite. Dans ce spot, un bandeau invitait l'abonné à cliquer OK avec sa
télécommande pour recevoir les informations complémentaires. Alors le
décodeur-modem nous renvoyait un signal avec le numéro d'abonné. A partir de
cette information, nous transmettions au constructeur le nom et l'adresse du
prospect. » Le modèle de pub interactive utilisé par Audi a, depuis, fait ses
preuves sur les chaînes numériques. « Ce modèle est très puissant, avec un taux
de retour dix fois supérieur à celui d'un Numéro Vert, par exemple, commente
Tristan Reix, vice-président de D interactive. Mais on paye le retour massif
par une qualification moins bonne qu'au téléphone. C'est une démarche plus
paresseuse et moins motivante. Elle correspond à un achat d'impulsion - ce qui
peut aller pour une marque de chocolat, mais pas pour un placement, une
assurance ou une voiture. » Dans un modèle plus évolué, un clic amène l'abonné
sur un mini-site d'information qui permet de découvrir la proposition de
l'annonceur. S'il est intéressé, il confirmera son souhait de recevoir la
documentation. Ce modèle a été mis en oeuvre dans la publicité pour Kangoo. En
cliquant sur OK, l'abonné lançait une application interactive qui lui proposait
de choisir des options, de voir la voiture sous différents angles, d'étudier
les possibilités de financement. A la fin de la consultation, il pouvait
demander à être contacté par un concessionnaire pour un essai. « C'est un très
bon modèle car le site joue le rôle de filtre d'avant-vente », selon Tristan
Reix. Il existe aussi des modèles spécifiques à l'achat en ligne, sur les
chaînes dédiées à la boutique. « Les informations complémentaires que l'on peut
envoyer sur le décodeur, varient à l'infini, explique Alain Staron, directeur
des nouveaux services sur TPS. Par exemple, une page d'explications sur le
produit, un quiz-concours avec la possibilité de gagner le produit, un jeu en
rapport avec le produit, une simulation financière, un formulaire de demande de
crédit en ligne. »
UN ESPACE D'EXPRESSION DIFFÉRENT
Les scénarios et les objectifs de la publicité interactive dépendent du profil
et du secteur d'activité de l'annonceur. « Les banques et assurances ne mettent
pas l'accent sur les ventes ni sur le recrutement, elles cherchent plutôt à
offrir des services, estime Julien Vin-Ramaroni, responsable marketing et
développement télé chez Noos (Lyonnaise). C'est un peu différent pour les
sociétés de Bourse - ici, on peut envisager des synergies intéressantes avec
les chaînes spécialisées en informations financières. Les grands annonceurs
traditionnels, ceux de l'hygiène-beauté par exemple, ne s'intéressent pas à la
vente directe mais plutôt à la diffusion des informations pour aider le client
à choisir tel ou tel produit en fonction du type de sa peau par le biais des
quiz. Ils cherchent à ouvrir à leurs clients un espace d'expression différent
de la publicité traditionnelle. La télé interactive se trouve alors à mi-chemin
vers le publi-rédactionnel. On y fait appel quand on a trop de choses à dire et
qui ne rentrent pas dans les trente secondes de publicité classique. » « La
vidéo est un bon déclencheur d'achat d'impulsion, commente Chem Assayag,
directeur général d'Open TV. Imaginez, pendant l'Euro 2000, lorsqu'une équipe
inscrit un but, un message dans un coin de l'écran propose au spectateur
d'acheter un tee-shirt avec le nom du joueur qui vient de marquer. » On notera
que ce scénario, bien que techniquement réalisable, bute sur la législation en
matière de téléachat qui limite les ventes directes pour des chaînes
généralistes. Mais d'autres scénarios moins directs sont à envisager. Par
exemple, pour la sortie d'un disque d'Alain Bashung chez Polygram, une
publicité interactive sur CanalSatellite proposait d'en écouter quelques
séquences. « Quand à la fin de la publicité, l'abonné clique sur OK pour en
savoir plus, cela lui donne l'impression d'avoir plus d'information que de
publicité, contrairement aux usages. Or, en réalité, il y a plus de publicité
que d'habitude ! », observe Alain Sarfati, directeur général de Formatel, une
SSII spécialisée dans la TV interactive. « L'interactivité enrichit la
publicité, remarque Remi Collard. Elle force l'abonné à zapper sur les pages
d'information. Le contenu de ces infos dépend de la richesse informative du
produit lui-même. Pour un yaourt aux fruits, cela peut être les informations
sur le taux de protéines. Pour un parc d'attractions, ce sont les prévisions
météo pour demain, la liste d'attractions ouvertes, etc. Inversement, les
informations obtenues par un quiz dans les pages viendront enrichir la base de
données de l'annonceur. Pour un fabricant des volets roulants, nous avons
inséré dans les pages un quiz avec deux questions - habitez-vous dans un
appartement ou dans une maison ? Et avez-vous des volets ou des stores ? Le
croisement des réponses a permis d'obtenir quatre fichiers distincts. » La
publicité interactive renverse les rapports dans la communication entre la
marque et le client. Avec la publicité classique, la marque espère que l'abonné
vienne pour demander des informations complémentaires. En mode interactif, ces
informations descendent jusqu'à son décodeur. Le public perçoit la consultation
des écrans interactifs comme une recherche d'information et non comme de la
publicité. Cela explique des taux de retour supérieurs. « Ils étaient entre 3
et 5 % pour la pub de Kangoo, par exemple », selon Chem Assayag. Les annonceurs
de la télévision interactive confirment ce point de vue. Pour preuve, les
résultats de la campagne interactive de Ford Focus (voir MD n° 47, p 10) qui
s'est déroulée du 12 au 21 mai dernier, avec une trentaine de spots. Cette
campagne, conçue par Impiric, utilisait le modèle désormais classique
d'interactivité : un clic avec la télécommande amenait l'abonné dans un espace
interactif où il pouvait construire son modèle personnalisé du véhicule,
demander une brochure ou bien prendre rendez-vous pour un essai. « Nous avons
eu plus de 1 500 demandes de brochure et plus de 500 demandes d'essai du
véhicule, témoigne Marie-Pierre Flandin, responsable de publicité chez Ford. Il
est trop tôt pour dire combien il y aura de ventes, mais les résultats obtenus
sont de bonne qualité. C'est une démarche active des abonnés qui prouve un réel
intérêt. Compte tenu du nombre d'abonnés à TPS, moins d'un million, ce résultat
me paraît bon et même très encourageant. »
UN MÉDIA DIFFICILE À VENDRE
Si les résultats sont aussi bons, pourquoi les annonceurs
ne se pressent-ils pas chez TPS ? « Nous connaissons une sorte de démarrage
lent, confesse Alain Staron. Le problème, c'est que les gens ne nous
connaissent pas. Les régies ne prévoient pas de télévision interactive dans les
plans médias. Notre média est difficile à vendre. Il faut dire aussi que nous
n'avions personne pour faire du commercial, jusqu'en septembre dernier. Enfin,
depuis l'apparition des téléphones au standard Wap, notre vie est plus simple.
Les annonceurs ont compris qu'il y avait de nouveaux médias à ne pas négliger.
Et d'un autre côté, les annonceurs qui sont passés chez nous reviennent. Ce qui
les séduit, c'est ce mélange de télévision et d'Internet offert par les
mini-sites d'informations envoyés chez chaque abonné. Nous avons d'ailleurs
établi une sorte de complémentarité horaire avec le Web. Les ventes sur
Internet sont réalisées du lundi au vendredi entre 9 heures et 19 heures. De 19
heures à 22 heures et le week-end, c'est l'heure de TPS. » Aujourd'hui, les
deux télévisions interactives françaises sont diffusées par satellite.
Pourtant, c'est le câble qui est censé offrir plus d'opportunités
d'interactivité, car son mode de diffusion permet d'établir une voie de retour
par ce même câble, à haut débit et sans passer par le réseau téléphonique.
Julien Vin-Ramaroni admet avoir pris du retard sur ses concurrents : « Pour
l'instant, Noos diffuse les chaînes nationales en analogique, donc il n'y pas
d'interactivité possible. En revanche, les classiques du câble, comme Paris
Première ou LCI, sont bien diffusées en numérique, mais leur audience n'est pas
suffisante. Dans quelques mois, nous passerons en tout numérique et là, nous
pourrons proposer une audience sensiblement différente de celle de nos
concurrents. TPS touche principalement les ruraux et rurbains, Noos proposera
aux annonceurs une audience CSP + parisienne. » « Pour un annonceur, il est
intéressant de faire une application interactive - mais il doit alors choisir
entre deux standards, celui d'Open TV utilisé par TPS et Noos, ou bien celui en
vigueur sur CanalSatellite, poursuit Julien Vin-Ramaroni. Or, le bouquet TPS
diffuse les chaînes nationales en mode numérique. Cela représente 65 à 70 % de
l'audience. Naturellement, il est en avance sur les autres acteurs. » Les
éditeurs des logiciels d'interactivité défendent la pertinence de ces concepts
propriétaires. Comme Chem Assayag - son logiciel pour le développement et
l'exploitation des services de télévision interactive Open TV pilote les
décodeurs de TPS, de Noos et de France Télécom Câble : « Notre logiciel équipe
une quinzaine de réseaux en Europe, soit sept millions de foyers. Il permet
d'imaginer une large gamme de services, des plus simples, comme la diffusion
des bulletins météo ou financiers, aux plus complexes utilisant la voie de
retour. Et aussi de faire des économies de bande passante et des connexions en
retour, comme dans ce même spot pour Kangoo. L'icône qui apparaît sur l'écran
ne lance pas, en réalité, une connexion immédiate. Toutes les informations
auxquelles l'abonné a accès ne sont pas diffusées à sa demande, mais sont déjà
stockées dans son décodeur, dans une application qui a été téléchargée pendant
le spot. L'icône sur l'écran ne correspond pas à une connexion mais au
lancement de l'application. Cela permet une utilisation plus efficace de la
bande passante. La connexion réelle de l'abonné vers le diffuseur, en voie
remontante, n'est établie que lorsque l'intéressé exprime le souhait de
recevoir des informations complémentaires. »
LA BANDE PASSANTE : UNE DENRÉE PRÉCIEUSE
Pour le commerce, c'est la même démarche : le
catalogue entier est téléchargé dans le décodeur, toujours sous la forme d'une
application interactive. Ce mode de diffusion, au lieu de connexion, permet
d'économiser cette denrée précieuse appelée "la bande passante". Une
application catalogue requiert un débit de quelques centaines de kilobits par
seconde, tandis que la diffusion d'une chaîne classique en vidéo demande
environ quatre mégabits par seconde. Pourtant, ce mode de diffusion, s'il
permet de charger l'application de façon invisible, pendant le spot
publicitaire, limite aussi le volume des informations - on peut difficilement
envisager l'utilisation de la vidéo dans l'application interactive qui se
limite à des écrans statiques. Il reste aussi quelques problèmes techniques
liés à la voie de retour et au décodeur. Explications d'Alain Sarfati : « Avec
le satellite, il est facile de recevoir les infos, mais difficile de remonter.
Quand on diffuse la télévision interactive par satellite, il faut avoir une
ligne téléphonique à côté pour le retour. Mais la transmission se fait alors à
une vitesse faible, de 1 200 bauds dans les deux sens avec le modem du décodeur
Sagem. A titre de comparaison, c'est la même vitesse que celle du Minitel.
Alors la consultation du compte bancaire ou encore des cours de bourse demande
un temps significatif pour le chargement des pages. Sur le câble, ce sera plus
facile avec un modem câble prévu dans le décodeur. Enfin, la puissance du
décodeur lui-même pose aujourd'hui des limites. Demain, avec plus de puissance
et de bande passante, on pourra proposer à l'abonné de visiter la boutique en
ligne. Et, à la fin de la publicité pour une voiture, on lui proposera de se
retrouver au volant de la berline, dans un simulateur de conduite ! » Noos
disposera bientôt de décodeurs de deuxième génération avec le retour du signal
sur le câble. L'opérateur compte proposer des moyens de reconnaissance
automatique de l'abonné à partir des informations que lui-même aura enregistré
sur son décodeur - adresse, téléphone, et aussi numéro de la carte bancaire
pour le paiement automatique. Dans d'autres projets, une interface et un
lecteur pour la carte à puce transformeront le décodeur en terminal de
paiement. « Bientôt, on pourra programmer son poste pour une sélection
automatique des émissions, comme on le fait déjà pour recevoir la météo de sa
région, ou encore le guide des programmes de son choix, imagine Alain Sarfati.
Cette option fera naturellement des mécontents car elle donnera au spectateur
la possibilité de programmer pour ne pas voir les publicités. Mais en même
temps, elle offrira des opportunités inédites de personnalisation par l'abonné
lui-même. » Par exemple, un décodeur programmé pour privilégier les émissions
sur le sport saura faire le tri dans le flux des publicités et choisir les
spots qui ciblent les mêmes centres d'intérêts. Un autre problème n'est pas
complètement résolu : celui du placement dans le "tunnel" publicitaire. Une
publicité interactive au début de la séquence privera les spots suivants des
spectateurs partis naviguer sur les écrans d'information complémentaire. « Il y
a en effet une limite structurelle, admet Remi Collard. Aujourd'hui, nous
mettons la publicité interactive en fin d'écran publicitaire. Forcément, il n'y
en a qu'une par séquence. Et je pense que la publicité interactive doit rester
un événement et pas une myriade de bandeaux à cliquer qui se baladent dans tous
les sens. » Ce placement de la publicité interactive à la fin du "tunnel"
provoque un allongement du temps que l'abonné consacre aux publicités - pas de
phagocytage, mais un temps additionnel, la publicité interactive fait bonne
voisine avec les spots classiques. Quant à la limite en nombre de spots
interactifs, pour l'instant, elle ne semble pas gêner les rares annonceurs.
Reste encore le problème des fichiers. « La base de données est peu restituée à
l'annonceur. Ni TPS ni CanalSatellite ne souhaitent partager leur capital de
fichiers », remarque Tristan Reix. Et, quand les adresses sont remontées
jusqu'à l'annonceur, elles sont facturées près de 10 francs chez TPS. Pour un
constructeur automobile, et quand il s'agit des contacts qualifiés, ce coût
n'est pas rédhibitoire. Pour d'autres, la réponse est moins évidente. A
l'opposé, on peut remarquer que la centralisation de la gestion des remontées
par l'opérateur évite à l'annonceur d'investir dans un centre de contacts
clients pour une opération ponctuelle. Les avantages de la télé interactive
seront-ils suffisants pour assurer le développement de ce jeune média ?
L'expansion effrénée du Web commercial contribue à détourner les
investissements. Les précurseurs en la matière cherchent déjà des solutions de
symbiose, pour surfer sur le raz-de-marée Internet. « Le concept de TPS et de
CanalSatellite est intéressant mais d'un usage limité. Il y a peu de
possibilité de retour et d'interactivité réelle, par rapport à Internet », juge
Tristan Reix. Selon lui, « l'ergonomie des applications est faible, c'est lié
aux technologies propriétaires utilisées dans la diffusion. Même sur Noos, vous
pouvez brancher la télé et le PC sur le même décodeur, mais il n'y a pas de
convergence entre les deux. La vraie télévision interactive naîtra de cette
convergence, de la possibilité de faire basculer l'abonné vers le site Internet
avec toute la puissance de profiling derrière. Et on peut le faire avec la télé
analogique, à l'instar d'AOLTV. Ce sera un business modèle tout à fait nouveau,
plus proche de celui du téléphone mobile. Cela nécessite l'utilisation d'une
set-top box, un boîtier permettant de consulter Internet, comme ceux proposés
par Netgem. Financé par les annonceurs, ce boîtier sera donné à l'abonné sous
condition, par exemple, de l'ouverture d'un compte bancaire ou d'une
souscription à un abonnement au téléphone mobile. »
UN MÉLANGE DE TÉLÉ ET DE WEB
On peut remarquer que Netgem bataille depuis des
années (voir MD n° 40, p 44) pour promouvoir son concept "Internet sans PC",
sans grand succès pour l'instant. Quant à America Online, l'opérateur vient de
se lancer dans une aventure de télévision interactive... mariée à Internet.
Selon les patrons d'AOL, leurs abonnés regardent la télévision et surfent de
plus en plus souvent sur le Web en même temps. Surprenant ? Il paraît que la
préoccupation essentielle de ses 23 millions d'abonnés est de commenter
l'émission télé en cours dans des "chats" de discussion sur Internet. L'écran
d'AOLTV est donc un mélange de télé et de Web, piloté par un clavier sans fil
et une télécommande sophistiquée. L'ensemble est connecté à un boîtier d'accès
Internet fabriqué par Philips, avec le logiciel d'interactivité de Liberate
destiné aux décodeurs câble et satellite. Celui-ci propose à la fois les
fonctionnalités habituelles d'Internet, un support interactif pour les
programmes télévisuels et un accès au contenu Internet optimisé pour la
télévision. Une image en incrustation permet de surfer sur le Web ou de
consulter son courrier électronique dans un coin de l'écran. L'AOLTV sera dotée
de onze chaînes particulières avec du contenu propre à l'opérateur et adapté au
nouveau mode de diffusion. La télévision interactive est-elle complémentaire
d'Internet ? « La différence entre ces deux médias, c'est qu'Internet est un
univers ouvert où le message d'un annonceur a moins de chance de rencontrer le
client, estime Julien Vin-Ramaroni. La télévision est un univers fermé, ce qui
donne plus de puissance aux contacts. Noos est en train de travailler avec
Casino sur une déclinaison du site C-Mes courses pour la télé interactive. Et
nous rencontrons les mêmes problèmes que les gens qui travaillent sur les sites
Internet pour les téléphones Wap - il faut arriver à utiliser les mêmes bases
de données sur différents terminaux, et avec des moyens d'accès différents. »
Chez Noos, Internet est pressenti pour devenir accélérateur dans le
développement du marketing direct. « Nous prévoyons d'enrichir le flux
remontant avec le profil de l'abonné et les informations sur ses chaînes
préférées. La prochaine génération de nos décodeurs aura le modem câble déjà
intégré, avec une connexion Internet permanente par le câble. Cela ouvrira un
nouveau canal pour la personnalisation, la comparaison et l'étude de
consommation télévisuelle, conclut Julien Vin-Ramarony. Plus de 40 % de nos
abonnés sont aussi connectés à Internet. La convergence entre la télévision
interactive et Internet me paraît évidente. »
La Caisse d'Epargne sur TPS
A la Caisse d'Epargne, la télévision interactive est entrée de plain pied dans la gamme des services accessibles sur Internet, par Minitel, au téléphone - et désormais sur TPS. Baptisé TV Ecureuil, ce service offre un accès aux comptes grâce à l'utilisation du modem du décodeur. Avec sa télécommande, l'abonné se déplace entre les écrans qui reprennent l'ergonomie de ceux d'Internet. Il peut consulter ses comptes, effectuer des virements ou faire une simulation et une demande de crédit. Dans un coin de l'écran, des messages de service en provenance de son agence l'informent de l'arrivée de son nouveau chéquier. Le service est gratuit mais l'abonné réglera les frais de connexion téléphonique, à raison de 0,37 franc la minute. L'échange des informations dans les deux sens se fait par la ligne téléphonique grâce au modem du décodeur. Les informations s'inscrivent en télétexte sur le fond de l'écran diffusé quant à lui par satellite. La carte d'abonné TPS sert de moyen de contrôle d'accès. « TV Ecureuil fait partie de la modernisation de l'image de la Caisse d'Epargne, fait-on savoir à la banque. Son objectif est de déplacer encore une partie des opérations simples des agences vers de nouveaux médias. » Aujourd'hui, 1,5 million de clients de la Caisse d'Epargne utilisent le Minitel avec 17 millions de connexions. Le service par téléphone draine plus de 28 millions d'appels. Le service sur TPS doit venir en complément du Minitel déclinant. La Caisse d'Epargne cherche désormais à développer un socle d'applications plurimédia commun à tous les services existants et aux médias électroniques futurs. Le service TV Ecureuil est désormais ouvert sur trois régions : Auvergne, Rhône-Alpes et Bourgogne, avec déjà 12 000 clients abonnés de TPS. Fin 2000, il sera proposé sur tout le territoire national.
Somfy : « Exigez des garanties sur la partie technique ! »
« Nous avons fait une campagne interactive sur CanalSatellite en 1998. Nous étions à la recherche d'un média permettant d'aller plus loin dans l'explication de notre offre - les moteurs et les automatismes pour stores et volets roulants sont un sujet très technique pour le grand public, témoigne Luc Brossard, responsable de publicité chez Somfy France. Nous voulions aller plus loin, mieux expliquer notre offre, offrir au public l'occasion de recevoir des guides après une demande en ligne et aussi promouvoir notre réseau d'installateurs affiliés. » Pendant le spot, un message invitait les abonnés à cliquer pour en savoir plus sur les produits. Une opération parallèle en association avec la chaîne météo, utilisant le choix par l'abonné de la météo locale, permettait de lui envoyer la liste des revendeurs de la marque dans sa région. En même temps, Somfy parrainait tous les écrans de la météo. « Nous communiquions sur les stores que l'on manipule avec une télécommande. Un produit sophistiqué, et il y avait ici une coïncidence intéressante avec les habitudes de l'abonné à la télévision numérique qui justement manipule se sert d'une télécommande sophistiquée. » Bien démarrée, la campagne a dû être écourtée pour des raisons techniques - un problème de compatibilité de l'application interactive avec une partie des décodeurs en service faisait bloquer leur fonctionnement pendant la consultation des pages. « On a été obligé de tout arrêter au bout d'une quinzaine de spots, au lieu de la centaine prévue. C'est très frustrant, regrette Luc Brossard. Nous n'avons eu que 150 contacts, ce qui n'est pas significatif. Mais je reste persuadé que le concept est bon. Et si nous avons eu des problèmes techniques au-delà de ce qu'on aurait pu imaginer, il faut dire que nous avons accepté ce risque. Je n'ai aucun regret, c'était une belle expérience. » Et si c'était à recommencer ? « Je demanderais beaucoup plus de garanties en amont sur la bonne gestion technique de la partie interactive ! »