Recherche

La métropole lilloise : capitale de la VAD et du MD

Déjà identifiée comme le berceau de la VPC, la métropole lilloise est en passe d'être reconnue comme la capitale européenne, voire mondiale, de la vente à distance et du marketing direct. Autour des grandes enseignes de la VAD gravite une vaste palette de prestataires : agences conseils, logisticiens, imprimeurs, spécialistes de gestion de bases de données ou des centres de contacts. Sans oublier la partie formation.

Publié par le
Lecture
23 min
  • Imprimer


C'est dans un rayon de 15 kilomètres englobant Lille, Roubaix et Tourcoing, que sont nés les pionniers tels que La Redoute, les 3 Suisses et Damart. Et c'est là également que se trouve la plus forte concentration d'entreprises du secteur. Les grands donneurs d'ordres, qui y sont présents, génèrent pas moins de 60 % du chiffre d'affaires de la VAD en France. Six d'entre eux font partie de la short-list des dix premières entreprises françaises de la filière. Le groupe Redcats, qui possède les enseignes Cyrillus, Daxon, La Redoute et VertBaudet, est le numéro trois mondial de la vente à distance. En élargissant le territoire sur tout le Nord-Pas-de-Calais, la filière réunit plus de 170 entreprises pour un chiffre d'affaires d'environ 7 milliards d'euros et un total de 26 000 emplois directs. Mais l'excellence de ce pôle d'activité ne repose pas uniquement sur la présence d'un grand nombre d'entreprises de VAD. Elle est également le fruit du dynamisme d'une pléthore de prestataires. Qu'il s'agisse d'agences conseils, de spécialistes de gestion de bases de données, de logisticiens, d'imprimeurs et de centres de contacts. D'après une étude publiée, en octobre 2003, par Move (Mail Order Valley Europe, un réseau de partenaires réunis pour promouvoir et développer la VAD dans le Nord-Pas-de-Calais), la région compte au total près de 900 prestataires associés à la vente à distance. Ceux-ci génèrent un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros et 26 600 emplois. Ce qui monte à plus de 52 000 le nombre de salariés qui travaillent de près ou de loin dans la vente à distance et le marketing direct. La concentration d'un grand nombre de centres de décision, la présence d'acteurs intervenant sur toute la chaîne des opérations de marketing direct et la reconnaissance de l'excellence de leurs compétences donnent à ce territoire une place de choix unique en son genre. La métropole lilloise mérite bien le titre de “capitale de la VAD”.

La culture des marchands de Flandres


Plusieurs raisons expliquent un tel phénomène. Le passé marchand de l'ancienne capitale flamande n'est pas étranger à la naissance de la VPC sur la métropole lilloise. Déjà au seizième siècle, Lille regorgeait de commerçants qui parcouraient toute l'Europe pour acheter et vendre leurs produits (des étoffes, pour l'essentiel). Grâce à sa situation géographique, cette ville constitue une véritable plaque tournante. Aujourd'hui, en TGV, elle se trouve à une heure de Paris, trente-huit minutes de Bruxelles et deux heures de Londres. Elle se situe en outre au cœur d'un réseau autoroutier qui se trouve à la croisée de deux grandes routes, avec l'axe Nord-Sud qui relie Stockholm à Gibraltar et l'axe Est-Ouest qui va de Milan à Londres. « L'esprit commerçant des Nordistes joue en leur faveur. Nous nous déplaçons beaucoup plus facilement que les Parisiens et n'hésitons pas à prendre la voiture, le train ou l'avion pour nous rendre chez nos clients. Etre implanté sur la métropole lilloise ne nous pénalise pas, bien au contraire », avance, convaincu, Louis-Damien Verstraete, gérant de 100 %VAD. Que la région ait connu un fort développement dans l'industrie textile a également joué un rôle de premier plan. Les pionniers de la VPC étaient en effet des industriels du textile qui ont commencé à vendre par catalogue les articles issus de leurs usines. La Redoute a édité son premier catalogue dès 1928 et les 3 Suisses se sont lancées dans la vente par correspondance en 1932. Les deux étaient des filatures de laine. Le fait que les entreprises qui ont créé ce concept soient des industriels du textile explique d'ailleurs que l'activité de la VAD reste encore aujourd'hui très orientée sur les produits d'équipement de la personne et de la maison. Ces initiateurs de ce nouveau mode de distribution ont continué par la suite à innover. Même s'ils se sont refusés à se lancer tête baissée dans l'aventure de l'Internet en privilégiant la prudence aux prises de risques inconsidérés, ils ont été parmi les premiers à expérimenter ce canal de vente. Aujourd'hui, alors que les pratiques sont éprouvées, leurs ventes sur la Toile connaissent un taux de croissance à deux chiffres. Si le groupe Redcats diffuse 22 catalogues dans 18 pays, il exploite plus de 50 sites marchands. Et ses ventes sur le Web représentent plus de 15 % de son chiffre d'affaires. « Les 3 Suisses ont, pour leur part, lancé le premier site marchand après avoir expérimenté la vente sur cassettes vidéo, disques laser puis CD-Rom. Nous avons toujours été précurseurs dans le domaine des nouvelles technologies », avance Yves Bayart, de la direction du développement de 3 Suisses International. Et de préciser que la présence sur un périmètre réduit d'une forte concentration de population a aidé au lancement de ces expérimentations. La métropole lilloise compte en effet 1,9 million d'habitants. Et elle rayonne sur une population de 100 millions de personnes à moins de 300 kilomètres de son épicentre. Encore un facteur qui crédibilise le choix de cette métropole comme capitale.

Le passé textile de la région


L'équipement de la personne et du foyer reste donc encore l'activité dominante de la vente à distance, sachant que cette dernière est plutôt orientée vers les particuliers que vers les professionnels. D'après l'étude Move, plus de 92 % des entreprises de VAD du Nord-Pas-de-Calais travaillent sur ce segment de marché. L'entreprise aujourd'hui citée par tous comme étant une des plus belles réussites de ces dernières années, dans le monde de la vente à distance, est d'ailleurs non seulement implantée dans la métropole lilloise, mais travaille également dans l'équipement de la personne. Il s'agit d'Afibel, société basée à Villeneuve-d'Ascq et spécialisée dans la vente de vêtements pour les femmes de plus de 50 ans. En vingt ans, ce vépéciste a multiplié par 20 son chiffre d'affaires qui atteint 187 millions d'euros sur son dernier exercice. En 2003, elle a engrangé un bénéfice d'exploitation de 14,3 millions d'euros, en hausse de 78,8 % sur un an. Comme on peut le lire sur son site, Afibel se caractérise par une expertise vépéciste pointue qui, alliée à une gestion très rigoureuse, lui a permis l'autofinancement d'une croissance moyenne annuelle de 36 % au cours de ces huit dernières années. Cette réussite illustre bien la particularité des entreprises de la région portée par une certaine conception du travail et des affaires. Les gens du Nord sont reconnus comme étant des travailleurs qui s'attellent avec résolution à leur tâche. « Notre succès repose sur notre culture d'entreprise bien davantage que sur les outils que nous utilisons. Cette dernière est basée sur la responsabilisation des collaborateurs, sur leur volonté de réussite et sur leur fierté d'appartenance à l'entreprise », indique Patrick Delecroix, président du directoire d'Afibel. Leur savoir-faire, en matière de vente à distance, joue également un rôle important. Les cadres d'Afibel ont tous fait leurs premières armes au sein des grands de la VPC ou de leurs filiales. Cette connaissance du métier, que possèdent les professionnels de la région, est également un des atouts qui impulse le dynamisme des entreprises qui s'y implantent. C'est une des principales raisons pour laquelle l'Allemand Conrad, spécialisé dans la vente de matériels électronique, a choisi Lille lorsqu'il a décidé de se lancer sur le marché français. « On trouve ici un personnel très pointu en marketing, logistique et informatique, souligne Jean-Pierre Keller, directeur marketing de Conrad. Nous bénéficions également d'un tissu de prestataires d'une qualité rare. » Conrad n'est pas le seul à faire ce constat et à avoir choisi de se développer sur le territoire lillois pour cette raison. En 1986, le généraliste allemand Quelle a également décidé de migrer dans ce qu'il nomme “le bassin d'élection de la vente à distance”. Alors que son siège se trouve à Orléans, il a déplacé à Tourcoing toutes ses équipes affectées à la création, aux achats et au marketing. Il bénéficie ainsi de la proximité d'un tissu de prestataires que l'on ne trouve nulle part ailleurs.

Des agences aux savoir-faire techniques


L'étude de Move comptabilise ainsi 290 studios et agences conseils et de création en marketing direct et vente à distance. Un grand nombre d'entre eux ont été créés par d'anciens collaborateurs des groupes nordistes de la VPC, ou par des spécialistes du marketing direct ayant fait leurs premières armes au sein des enseignes de la grande distribution présentes dans la région. Aujourd'hui, leur activité déborde largement le seul marché régional pour s'étendre sur toute la France, voire au-delà. A part ETO, qui ne veut plus être apparentée au Nord, la plupart de ces agences considèrent leur implantation nordiste comme un avantage à plus d'un titre. Les plus grandes ont, bien sûr, un bureau en région parisienne pour recevoir leurs clients franciliens et internationaux. Mais elles tiennent à garder leur siège dans la métropole lilloise. Les agences du Nord sont en effet reconnues pour leurs compétences tournées vers la vente. Elles ont une bonne connaissance des aspects techniques ayant trait à la fabrication des messages et font preuve de rigueur et de pragmatisme dans la réalisation des fichiers de PAO. « Dans notre métier, un directeur artistique doit savoir plier une feuille de papier. C'est-à-dire qu'il doit connaître les techniques, de façonnage et de personnalisation, qui vont ensuite être appliquées pour présenter le message », précise Benoît Camelot, directeur de l'agence Tout Atout. A Paris, les agences viennent en général du monde de la publicité et sont plutôt tournées vers l'image. Dans le Nord, elles sont issues du sérail et travaillent davantage les aspects techniques. Le savoir-faire de la région dans le domaine de l'industrie graphique participe d'ailleurs de cet état de fait. C'est la deuxième région française, après l'Ile-de-France, dans le secteur de l'industrie de l'imprimerie et de l'édition. Celui-ci compte plus de 240 entreprises et emploie près de 6 000 personnes. L'imprimeur leader en France sur le segment du marketing direct est d'ailleurs un Nordiste. D'Haussy Imprimeur compte 180 salariés et réalise un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros. La société imprimait initialement les factures, les bons de commandes et les dépliants publicitaires pour le compte d'agences et d'entreprises de VAD. D'Haussy travaille aujourd'hui uniquement sur des opérations de marketing direct toujours pour la VAD, mais également pour des sociétés de crédit, des banques, des enseignes de la grande distribution et l'industrie automobile. Son directeur général est secrétaire du bureau de la Chambre de commerce et d'industrie de Lille qui fait partie des membres fondateurs de Move et des organisateurs des “Rendez-vous européens de la vente à distance et du marketing direct”. Avec plus de 200 exposants et plus de 9 000 visiteurs, cette manifestation, qui a lieu tous les ans à Lille, au mois d'octobre, accueille le plus grand salon professionnel de la filière en Europe.

Des agences régionales positionnées à l'international


La proximité géographique entre les imprimeurs et les agences influe sur la capacité de ces dernières à intégrer les aspects techniques dans leur travail. Il serait donc dommage de perdre cet atout en choisissant une localisation parisienne. « Surtout que nous arrivons à traiter de plus en plus d'affaires directement de nos bureaux lillois, grâce au TGV et à Internet. Certains de nos clients parisiens préfèrent même venir nous voir ici pour être plus tranquilles. Il leur suffit d'une heure de train. Ils ont compris que Lille était plus accessible que certaines banlieues lointaines », avance Frédéric Clipet, P-dg de Monébak et Agenc'e du groupe DP&S. Ce groupe réalise plus de 85 % de son chiffre d'affaires auprès de grandes entreprises dont le siège est basé à Paris. Et pourtant, pour rien au monde, ses dirigeants ne voudraient quitter leurs bureaux lillois. De même, s'agissant d'agences de plus petite taille comme Caribou. « Notre identité nordiste nous attire des clients du monde entier. Nous avons été contactés par un opérateur téléphonique américain basé à Londres. Il voulait absolument faire appel à des compétences de la métropole lilloise qu'il avait bien identifiée comme le pôle d'excellence du marketing direct », confie Valérie Gisberti, directrice du développement de Caribou. Et d'ajouter que son agence a également été sollicitée par un club de vin portugais désireux d'exporter en Belgique. Il y a encore quatre ans, Caribou réalisait 100 % de son chiffre d'affaires sur la région, aujourd'hui le Nord-Pas-de-Calais ne représente plus que 40 %, contre 30 % sur le reste de la France et 30 % à l'étranger. La reconnaissance du savoir-faire des agences du Nord joue en leur faveur. « Depuis environ deux ans, il y a toujours deux à trois agences du Nord présentes dans les grosses consultations nationales. Les annonceurs ont évolué dans leur connaissance du marketing direct. Ils sont plus exigeants dans leurs demandes. Depuis ils se sont rendu compte du professionnalisme des Nordistes », avance Michaël Gomber, directeur associé de Paradox. L'expertise en matière de vente à distance et de marketing direct prime pour beaucoup par rapport à la connaissance du métier de l'annonceur. Une nouvelle approche qui profite aux Nordistes. « C'est ainsi que nous avons été sollicités par Médecins du Monde alors que nous n'avons pas spécialement d'expérience dans la collecte de fonds. Ils ont fait appel à nous, car ils savent que nous avons le souci du retour sur investissement », indique Nathalie Dupas, directrice générale adjointe de Meura.

Des centres d'appels à la pelle


Un autre domaine sur lequel la région peut se prévaloir de son expertise : celui des centres d'appels qui a profité de la culture de la relation client qui s'est développée sur le terreau de la VPC. « La relation client de masse est née ici. Elle s'inscrit dorénavant dans notre culture. Et les compétences commencent à se transmettre de génération à génération. Travaillent dans mon entreprise des parents et leurs enfants », explique François Berger, directeur général de Com'Plus. Le Nord-Pas-de-Calais compte plus de 90 centres d'appels. Ce qui, avec 10 % du parc français, place cette région en seconde position derrière l'Ile-de-France. D'après l'étude de Move, “il existe sur la région 16 prestataires externes ou outsourcers de taille très respectable qui emploient en moyenne 230 personnes par rapport à une moyenne nationale de 10. Ces prestataires réalisent 70 millions d'euros de chiffre d'affaires. Les grands donneurs d'ordres sont issus de la distribution spécialisée et des GMS (Grandes et Moyennes Surfaces). Toutes les entreprises de VAD d'importance ont leurs propres ressources (18 centres) et le secteur de la banque-assurance anime 17 centres internalisés.” Cette profession a un fort besoin en main-d'œuvre. La forte concentration de la population du Nord-Pas-de-Calais et son taux de chômage élevé, qui se situe encore aujourd'hui au dessus du niveau national, ont aidé au développement de cette activité. Le Nord-Pas-de-Calais souffre d'une perte importante d'emplois dans le secteur industriel. Le métier de téléopérateur est accessible à beaucoup de gens, car il ne requiert aucune qualification pointue. L'implantation de centres d'appels permet donc une reconversion plutôt aisée du personnel. C'est pourquoi Armatis s'est dernièrement installée en lieu et place de l'un des bâtiments de l'usine Lu à Calais après sa fermeture. Elle a également ouvert, en avril dernier, une plate-forme à Boulogne après que l'usine de Comilog ait fermé ses portes. « Je dois m'implanter dans des bassins d'emploi où le taux de chômage est élevé, car il me faut très vite monter en charge lorsque je décroche un contrat. Je dois alors recruter des dizaines de personnes en moins d'un mois », note Denis Akriche, P-dg d'Armatis. Aujourd'hui, son entreprise emploie 400 personnes à Calais et devrait faire de même à Boulogne d'ici fin 2004. Et aucun de ses clients n'est de la région. Le P-dg se dit satisfait du personnel qu'il a trouvé à proximité. « Volontaires au travail, les gens d'ici ont un bon niveau initial de formation qui leur permet d'apprendre très vite le métier. J'ai trouvé ici du personnel de qualité », reconnaît-il. Reste que les activités professionnelles liées aux centres d'appels souffrent d'une image de plus en plus négative du fait de salaires proches des minima sociaux et d'un turn-over élevé. Un tableau sur lequel le Nord-Pas-de-Calais veut s'inscrire en faux. C'est pourquoi, en mars 2003, une cinquantaine d'entreprises et d'institutionnels du Nord-Pas-de-Calais, liés de près aux centres d'appels, ont constitué l'association Cliadis. « Notre objectif est de dégager une image positive de notre profession et montrer qu'elle repose sur un métier structuré. De plus en plus d'entreprises auront besoin d'utiliser des centres d'appels qu'ils soient ou non intégrés. Il nous faut assurer l'attractivité du secteur au risque de voir plus tard la délocalisation de nos centres vers l'étranger », affirme François Berger, président du Club Cliadis. Font partie de ce Club, non seulement des prestataires, mais également de grandes entreprises comme La Société Générale, La Mondiale, Norauto et des agences d'intérim telles que Adecco et Kelly. Qu'une telle initiative soit née dans le Nord-Pas-de-Calais montre bien le dynamisme de ce territoire en la matière.

La solidarité des entreprises nordistes


La réussite des centres d'appels repose pour une bonne part sur la qualité des opérateurs qu'ils emploient. Or, de par leur culture et leur histoire, les gens du Nord ont un rapport à leur outil de travail que l'on trouve rarement ailleurs. D'après Hervé Milcent, P-dg d'arvato services France, c'est une des principales raisons de la réussite du redressement de la société Setradis basée à Noyelles-sous-Lens dans le Pas-de-Calais, après son rachat par le groupe Bertelsmann en 1971. C'est alors qu'a été fait le pari de la diversification de l'activité et de la conquête de nouveaux clients. Setradis, devenue Bertelsmann Services puis arvato services, était spécialisée dans le marketing direct. Aujourd'hui, les activités de cette entreprise, dont les coûts de main-d'œuvre représentent 60 % du chiffre d'affaires, s'articulent autour de quatre métiers : le marketing direct avec la réalisation de 500 millions de mailings par an, le CRM qui englobe le conseil et la réalisation de solutions informatiques sur mesure, la logistique qui va du stockage à la distribution, en passant par le suivi du transport, et les centres de contacts au service des clients de ses clients. « En nous accordant leur confiance, les grands donneurs d'ordres de la VPC nordiste nous ont également aidés à redresser la barre. C'est en grande partie grâce à eux que nous avons réussi en six ans à multiplier par deux le chiffre d'affaires de notre activité en marketing direct », souligne Hervé Milcent. Par juste retour des choses, le P-dg d'arvato services a tenu à son tour à accompagner Afibel dans sa croissance. « J'ai envie de capitaliser sur ces personnes qui nous ont aidés lorsque nous en avions besoin. Elles nous ont demandé de nous occuper du routage de leur colis. Nous nous sommes adaptés en conséquence. » Un choix qui a porté ses fruits. Arvato services est aujourd'hui identifié également comme un routeur de premier ordre dans la région. Malheureusement, faute de place rapidement disponible sur le bassin lensois, l'entreprise a dû s'expatrier dans l'Est de la France pour développer ses centres d'appels. Et aujourd'hui, elle emploie davantage de salariés sur le site qu'elle a développé à Metz qu'au sein de son unité dédié à Vendin le Viel dans le Pas-de-Calais. Reste qu'arvato services fait aujourd'hui partie des entreprises qui sont systématiquement citées, par les professionnels de la vente à distance et du marketing direct, comme faisant partie d'un des piliers régionaux du secteur. La Poste est également reconnue comme un partenaire incontournable qui a su accompagner le développement de la filière. « Sur l'activité courrier et colis, nous réalisons avec le Nord 10 % de notre chiffre d'affaires national, alors que ce département ne représente que 4 % de la population française. C'est dire l'importance que représentent ici les envois inhérents à la vente à distance et au marketing direct. A titre de comparaison, le Sud reçoit davantage de courrier et de colis qu'il n'en émet », indique Marc Zemour, directeur exécutif courrier pour le secteur nord-est de La Poste. Le partenariat entre La Poste et l'univers de la VAD repose sur une longue histoire. Elle a travaillé avec les grands vépécistes nordistes sur de nombreux chantiers. C'est suite à cette collaboration que La Poste a mis en place des procédures et des fichiers destinés à améliorer l'efficacité des envois de mailing et à optimiser le traitement informatique des adresses. Le réseau B, qui permet d'acheminer les mailings et les colis sans passer par les centres de tri postaux, est né dans le Nord et a été étendu à toute la France. A noter que La Poste a ouvert, en février dernier, une plate-forme à Carvin dans le Pas-de-Calais, l'une des plus grandes et des plus modernes plates-formes de traitement de colis de l'opérateur. Elle occupe un bâtiment de 25 000 m2 construit pour l'occasion et abrite, entre autre, une trieuse de paquets automatique dont la capacité de traitement atteint jusqu'à 180 000 colis par jour.

Un manque de faire savoir


Mais alors pourquoi, avec de telles réussites et atouts, la métropole lilloise n'a-t-elle pas encore réussi à imposer son image de marque aux yeux de tous ? Le Nord avait du mal à se départir de l'image des corons. Le fait qu'elle n'ait pas disposé assez tôt de structures en réseau haut débit a sans doute également joué en sa défaveur. Les grands de la VAD ont dû, en effet, lancer leur expérimentation ailleurs. Heureusement, Lille Métropole, à travers la structure Digiport, a pris le taureau par les cornes pour combler son retard. La Communauté urbaine de Lille a même décidé de déployer des réseaux Wi-fi sur une cinquantaine de sites publics et privés répartis sur le territoire métropolitain. Ce qui fait de ce programme le plus ambitieux jamais soutenu en France par les pouvoirs publics. Mais ce qui nuit à la reconnaissance de ce territoire tient surtout, là aussi, dans la mentalité des gens du Nord. Il n'y a pas si longtemps était encore écrit sur le fronton des usines ce slogan : “Le bien ne fait pas de bruit. Le bruit ne fait pas de bien”. Difficile de se départir d'une culture basée sur le savoir-faire au détriment du faire savoir. « Les Nordistes se rassurent dans le factuel et le concret. Ils ne prennent pas la mesure de l'imaginaire. Ils se méfient du médiatique. Heureusement, ils commencent à comprendre qu'ils doivent également tabler sur l'image pour se faire reconnaître », résume Alain Mahieu, directeur d'Intuitu Personae. L'événement “Lille2004 Capitale Européenne de la Culture” donne actuellement une vision attirante et séduisante de la métropole. Il participe à un changement d'image dont devraient profiter les professionnels régionaux de la vente à distance et du marketing direct. Reste à travailler encore davantage à la promotion au plan international. Et la légende de la “VAD Valley” commencera alors à s'imposer comme un état de fait aux yeux de tous.

Un territoire riche en formations


La métropole lilloise offre, aux jeunes voulant se former aux métiers de la vente à distance et du marketing direct, de nombreuses formations. L'IAE (Institut d'Administration des Entreprises) de l'Université des sciences et technologies de Lille propose un magistère, un DESS et un DEA en marketing direct et vente à distance au sein de l'IEMD (Institut européen du marketing direct). « L'IEMD a été créé en 1987 avec l'aide de La Poste et de professionnels de la VPC. Nous avons longtemps été les seuls à proposer un programme universitaire de ce niveau dans cette filière », souligne Francis Salerno, professeur des universités et directeur associé de l'IAE de Lille. L'IAE compte également une Equipe de Recherche en Marketing (Erem) qui fait partie du Centre Lillois d'Analyse et Recherche sur l'Evolution des Entreprises (Claree) associé au CNRS. Il existe également un Mastère Spécialisé de troisième cycle en marketing direct et commerce électronique à l'Ecole Supérieure de Commerce de Lille. Cette formation s'adresse à des étudiants de niveau bac + 5 en économie ou en scientifique, et de niveau bac + 4 en marketing. De plus, elle est accessible aux dirigeants et cadres d'entreprises dans le cadre de la formation continue. Le Move Center joue, depuis cette année, le rôle d'un centre de transfert de technologie opérationnelle pour les PME. « Nous proposons aux PME qui veulent se lancer dans la VAD de parrainer un étudiant qui applique directement dans l'entreprise les cours pratiques qui lui sont dispensés par les professionnels du secteur », explique Marc-Lionel Gatto, directeur du Move Center. La métropole propose aussi des formations dispensées par Cepreco Entreprises et qui prépare à différents métiers liés à la vente à distance. Très prisées par les agences, elles ont formé de nombreux concepteurs-rédacteurs aujourd'hui en poste dans un grand nombre d'agences de Lille. Les écoles plus apparentées aux arts graphiques participent aussi au dynamisme de la région en termes de formation des compétences. Des écoles comme Saint-Luc près de Tournai, l'Esaat et Sup de Création de Roubaix ainsi que le lycée professionnel de Sainte-Marie à Bailleul, préparent des professionnels des arts graphiques dont sont friands les agences et les studios de création.

Un secteur informatique au service de la VAD et du MD


Autre famille d'acteurs présents dans la Nord-Pas-de-Calais, les sociétés de services informatiques qui sont réparties sur plus de 700 établissements dont plus de la moitié sont situés au sein de la métropole lilloise. D'après l'enquête réalisée par Move, 32 % de leur activité vient des secteurs de la VPC et de la grande distribution. Safig, dont le siège se trouve à Paris, doit notamment son succès aux activités que ses entités de Marcq-en-Barœul et de La Madeleine ont su développer. « Nos implantations nordistes ont joué le rôle de locomotive pour le groupe. C'est là que nous avons pu expérimenter un mode de management basé sur la responsabilisation de tous grâce auquel nous avons un turn-over très réduit », se targue Yves Boulanger, directeur de la région Nord et manager fondateur de cette entreprise ayant pour activité la gestion des courriers et des chèques. Certaines SSII se sont spécialisées dans le marketing direct. C'est le cas, par exemple, d'Altria, créée en 1993 et aujourd'hui filiale de Wegener Direct Marketing France. Ce prestataire intervient dans le traitement informatique de l'adresse et des données marketing. Goto Software, pour sa part, développe des logiciels de marketing direct pour les PME et les TPE. Née en 1982, la société lilloise compte aujourd'hui plus de 150 salariés. Golden Eyes, un autre nordiste, fournit notamment au secteur de la distribution l'analyse de bases constituées par la télécollecte d'informations à partir de cartes de fidélité. Parmi les prestataires en informatique, nombreuses sont les sociétés à s'être lancées dans l'e-mailing. Emailing Solution, du groupe roubaisien Adistar, édite une solution ASP de gestion de campagnes d'e-mailing. Mais difficile de dire qu'il s'agit d'une spécificité nordiste. L'activité a aujourd'hui le vent en poupe. Les informaticiens de la métropole lilloise savent également être opportunistes lorsqu'il le faut. Reste qu'au sein des entreprises de la VAD, les activités informatiques sont très souvent internalisées.

Geneviève Hermann

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page