LE DIGITAL DEPOUSSIERE LE MARKETING CARITATIF
Le raz-de-marée du Web 2. 0 touche l'univers caritatif. Même si les dons en ligne restent faibles, le marketing digital a fait son entrée dans cet univers jusque-là plutôt traditionnel.
Je m'abonneCrise ou pas, les Français ont du coeur Les dons de nos compatriotes aux associations caritatives ont continué de progresser de 5,5 % en 2009, indique France Générosités en juin 2010. Le secteur a bénéficié des mesures de défiscalisation sur l'ISF prévues par la loi Tepa d'août 2007. « Le fundraising on line, c'est-à-dire la récolte de fonds en ligne, est en pleine croissance, même si c'est encore un petit marché, par comparaison aux méthodes traditionnelles de collecte de dons comme le mailing postal », explique Aurélie Perreten, directrice adjointe de l'Association française des fundraisers (AFF). De fait, selon France Générosités, les dons en ligne représentent actuellement moins de 2 % de l'enveloppe globale.
@ Isabelle Vincenti
Frédérique Camize / Fondation pour la Recherche Médicale
«En France, la moyenne d'âge des donateurs excède 60 ans. La sensibilité du don vient avec l'âge. »
+ 5,5 %
C'EST LA PROGRESSION DES DONS EFFECTUES PAR LES FRANCAIS AUPRES DES ASSOCIATIONS CARITATIVES EN 2009, SELON FRANCE GENEROSITES.
NOUVELLES AVANCEES
Mais au-delà du paiement en ligne, les techniques digitales ont opéré une belle percée dans cet univers. En France, les «e-campagnes »sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus abouties. Hors de nos frontières, aux Etats-Unis, au Canada et en Australie, elles ont d'ores et déjà recours à la dernière innovation en date: le peer to peer fundraising. Véritable phénomène dans les pays anglo-saxons, celui-ci permet à l'internaute de récolter lui-même des fonds et de devenir par-là acteur de la collecte. A l'occasion d'événements privés (anniversaires) ou sportifs (marathons), des particuliers troquent par exemple le traditionnel «cadeau commun» contre un don collectif à une association.
Outre-Manche, le site www. justgiving.com, dédié à ce genre de collectes en peer to peer, compte près de 280 000 donateurs actifs et aurait permis de récolter plus de 100 millions de livres sterling (soit près de 118 millions d'euros) l'an dernier.
Dans l'Hexagone, cette pratique fait peu à peu son entrée. Justgiving y a d'ailleurs fait des émules: le site Aiderdonner com, lancé en août 2008, fonctionne sur le même principe. Rassemblant plus d'une centaine d'associations caritatives, il a récolté plus de 2 millions d'euros depuis sa création et compte près de 50 000 donateurs actifs.
Autre avancée dans le monde du Web 2. 0: le paiement en ligne via Facebook. Ce système très innovant a été mis en place, en mai dernier, par la société IZI-collecte.com. Elle est, du reste, la seule à fournir, pour le moment, ce type d'outil. Travaillant pour plus de 1 000 associations, fondations et autres structures habilitées à recevoir des dons, . celle-ci a récolté plus d' 1 million d'euros en 2010, soit le double de l'an passé. Un début encoura geant! « Petit à petit une culture du don en ligne est en train de naître en France », confirme Jérôme Deana, directeur du développement de l'agence Excel (groupe TBWA).
Les réseaux sociaux virtuels constituent, eux aussi, d'excellents relais pour ces campagnes de collecte. La Croix-Rouge, l'Unicef, la Fondation de France ou encore la Fondation Nicolas Hulot exploitent, par exemple, Facebook pour rassembler, informer et sensibiliser le grand public à leur cause. Reste que la maturité française n'est en rien comparable à celle des pays anglo-saxons. Une situation qui « tient à l'âge moyen des donateurs français », selon Frédérique Camize, directrice du développement et de la communication de la Fondation pour la recherche médicale (FRM). « En France, précise-t-elle, la moyenne d'âge des donateurs excède 60 ans. La sensibilité du don vient avec l'âge. » La FRM, qui finance la recherche médicale, collecte chaque année plus d' 1,6 million d'euros par le biais d'opérations off line, alors que l'e-collecte lui rapporte quelque 200 000 euros par an. Même chose pour l'Unicef, dont les dons en ligne ne pèsent que 3 % de l'enveloppe globale, soit 40 millions d'euros par an.
La Fondation de France affiche, quant à elle, de meilleurs résultats en termes d'e-fundraising, puisque près de 10 % de ses dons seraient récoltés sur la Toile.
« Les chiffres montrent qu'un nombre croissant de donateurs utilisent le Web », souligne Layla Dalifard, chargée de la collecte de fonds pour cet organisme.
Le site britannique Justgiving.com, dédié aux collectes en peer to peer, aurait récolté plus de 100 millions de livres sterling, en 2009.
STRATEGIES DIGITALES
« Beaucoup de dispositifs multicanal intègrent un volet digital, observe Aurélie Perreten (AFF). Les organismes caritatifs utilisent davantage le Web pour personnaliser la relation avec leurs donateurs, voire pour leur donner la possibilité de devenir eux-mêmes collecteurs de fonds. . » Cependant pour Claude Pouvreau, consultant nouveaux médias à l'agence Optimus, ces stratégies digitales supposent une excellente maîtrise des fondamentaux du genre: « L'approche digitale ne souffre pas la médiocrité, martèle-t-il. Le module de dons en ligne, par exemple, doit être extrêmement performant en termes de transformation. » Des compétences qui coûtent cher... et qui constituent par conséquent un frein. L'approche marketing des organisations caritatives tend donc à se digitaliser. Toutes possèdent leur site web et innovent à leur manière. Ainsi, l'Unicef lancera, mi-octobre, ses nouvelles e-cartes de voeux. Destinées, dans un premier temps, aux professionnels, elles s'adresseront par la suite au grand public. La Fondation de France a, quant à elle, inauguré, à l'occasion de la Saint-Valentin 2010, une boutique virtuelle, Cestplusquuncadeau.fr La Fondation de France a également développé un plan de marketing relationnel multicanal, associant les newsletters au courrier et au téléphone. De son côté, l'Unicef a recours au Net pour sensi biliser le public dans les situations d'urgence, comme le séisme en Haïti. Elle aurait réussi à collecter 1,8 million d'euros via le Web dans les 15 jours qui ont suivi la catastrophe. Voilà bien la grande force du Web: mobiliser en peu de temps un large public autour d'une grande cause.
TECHNO
DONNER AVEC UN SMARTPHONE
Les smartphones représentent un marché porteur pour les campagnes caritatives. Nombre d'organisations lancent actuellement leur site mobile, voir leur application, quitte à y intégrer un module de dons.
Fin 2009, le Secours Catholique a innové en sortant son application solidaire, «Une bougie pour bouger le monde», sur iPhone et iPod touch. Disponible sur l'App Store, elle coûte 1,59 euro. Elle permet d'apporter son témoignage et d'allumer virtuellement une bougie sur une carte affichant les soutiens de par le monde.