Recherche

Gilles Labouyrie (HOME SHOPPING SERVICE) . M6 BOUTIQUE EST UNE ENSEIGNE DE VAD COMME LES AUTRES

Le téléachat entend acquérir ses lettres de noblesse en proposant de la “vente à la télé”. En concurrence avec TF1, M6 Boutique La Chaîne s'est jetée dans la bataille dès 1988. Son Dga revendique pleinement pour sa chaîne un statut de VADiste traditionnel. Présentation de sa stratégie et de ses ambitions.

Publié par le
Lecture
10 min
  • Imprimer

Marketing Direct Que recouvre l'entité Home Shopping Service ?

Gilles Labouyrie C'est l'activité VAD du groupe M6, filiale à 100 %. Avec deux enseignes de distribution. La première se décline sur Internet avec Mistergooddeal, rachetée fin 2005. La seconde est visible à la télévision avec M6 Boutique, avec différents relais : catalogue papier, site internet, magasins physiques y compris dans la grande distribution (via des corners chez Carrefour). Home Shopping Service a réalisé 230 M€ de chiffre d'affaires en 2006, répartis à équité entre les deux entités. Il y a environ 500 personnes employées directement, dont 300 chez Mistergooddeal. En parallèle, nous avons une activité de sous-traitance, puisque nous fabriquons des émissions de téléshopping pour d'autres chaînes en France, en Belgique et en Hollande notamment. D'autres formats existent aussi à l'étranger, baptisés “Infomerciaux” et fabriqués aux États-Unis. Ils représentent 35 % du marché mondial de la VAD à la télé (soit 5 à 6 Md$). C'est un cas d'école marketing formidable. Mais je ne pense pas que ce format ait un avenir en France.

Ces activités de vente à distance sont dans les gènes du groupe M6…

G. L. M6 a une culture forte de produits dérivés, en tout genre… et ce, dès 1988, avec “la vente à la télé” et la distribution de disques et de journaux en kiosque. Elle est la dernière chaîne à avoir investi le PAF et elle a été confrontée tout de suite à un encombrement du marché publicitaire. Elle a donc dû trouver différentes sources de revenus. Ce qu'elle a fort bien réussi à faire, puisque 50 % du chiffre d'affaires est réalisé en dehors de la télévision. M6 est le seul groupe de médias en Europe à avoir autant d'activités annexes. L'avantage, c'est que notre activité de distribution n'est pas soumise aux fluctuations du marché. Les seules variations que nous observons sont nos propres succès et échecs. Vous déployez un dispositif de vente multicanal.

Quel canal privilégiez-vous ?

G. L. Avec M6 Boutique, nous sommes au coeur de l'achat d'impulsion. Et le meilleur relais reste le téléphone, car le client a un contact humain direct dès sa prise de décision. Il permet, en effet, de satisfaire immédiatement son envie et de se faire plaisir. C'est donc, pour nous, un canal prioritaire. Les autres modes de distribution sont des canaux non impulsifs qui nous permettent d'exploiter l'outil TV – une vitrine formidable – et de favoriser un achat plaisir quand le prospect le souhaite. Ce sont des canaux complémentaires.

Le site m6boutique.com est-t-il le meilleur relais de croissance de la chaîne aujourd'hui ?

G. L. Oui, en effet, c'est un des premiers sites marchands en France : il existe depuis douze ans. En 2006, nous avons enregistré 300 000 ventes sur Internet, pour un chiffre d'affaires de 28 M€ TTC. L'une des raisons est que nous avons beaucoup investi sur les vidéos, celles que nous utilisons déjà pour la télé. Notre site est d'ailleurs le plus riche. En parallèle, notre chaîne est disponible en live sur Internet. Par ailleurs, nous venons de lancer une campagne de communication décalée, baptisée “ahbontoiaussi.com”, destinée à générer de l'audience sur un site temporaire, créé ad hoc. Son thème : tout le monde achète chez nous sans oser le dire…

… ce qui veut dire que vous avez encore un problème d'image ?

G. L. Non, M6 a un taux de notoriété spontanée auprès des téléspectateurs de 94 %. Nous bénéficions d'une exposition dans nos deux boutiques parisiennes, mais aussi tous les ans, à la Foire de Paris. Et là, nous prenons la mesure de notre notoriété. Notre difficulté réside principalement dans la reconnaissance de notre mode de distribution, au même titre que n'importe quelle enseigne de VAD. Notre concept est donc de proposer des produits innovants, que l'on ne trouve pas ailleurs. Nous nous revendiquons “créateurs d'innovation”. Beaucoup de produits sont nés sur M6 Boutique.

Êtes-vous suffisamment crédible aujourd'hui ?

G. L. La crédibilité de l'enseigne, c'est ce qui compte avant tout. Et nous y travaillons. Même si nous avons une bonne base de départ puisque, sur notre million de clients, la moitié est renouvelée chaque année. Et depuis vingt ans, en cumul, une femme française sur deux a acheté sur M6 Boutique. Nous sommes une enseigne comme les autres avec des services classiques de VADiste (stock, livraisons rapides, mails de suivi des commandes…) . Le taux de satisfaction atteint 96 %. Notre coeur de cible est une population de 30 à 45 ans, principalement des femmes actives dans la moyenne des revenus français, avec une représentativité géographique équilibrée.

Internet représente 14 % du CA total de Home Shopping Service (soit 22 M€). Quelle est votre actualité sur ce canal ?

G. L. Nous lançons le premier site de télévision en live et à la demande sur Internet, baptisé “maformetbeaute. com”. Il permet, par exemple, de revoir les émissions que l'on a ratées.

Quelle est votre stratégie de marketing en ligne ?

G. L. Nous faisons du référencement payant, c'est-à-dire de l'achat de mots-clés, pour le site M6 Boutique La Chaîne et pour la chaîne Best of Shopping en France et en Hollande. Nous en achetons plus de 2 000 sur les moteurs de recherche Google, MSN, Yahoo !. Google arrive en tête de la génération de trafic via ses mots-clés, à hauteur de 60 %. Ceux qui fonctionnent le mieux sont les plus évidents : M6 Boutique et ses dérivés proches et les noms de produits-phares de la chaîne (Biominceur, Body Trainer, Power Tonic, etc.). Nous faisons également de l'affiliation via une plate-forme, First Coffee. Et nous sommes présents avec des encarts pub sur environ 300 sites de “bons plans” et de cash-back (Edengo, EbuyClub).

Le catalogue papier du groupe a été édité à 6 millions d'exemplaires en 2006. Ce canal, qui n'est plus vraiment une priorité, a-t-il supplanté le Net ?

G. L. Le catalogue papier est voué à persister, car il apporte un plus par rapport à Internet. C'est un mode d'exposition supplémentaire pour nos produits. Ensuite, chaque canal de diffusion a un canal de commande privilégié. Sur le Web, le client clique pour commander, même s'il peut téléphoner. A la télé comme pour le catalogue, c'est le téléphone le plus utilisé. Nous proposons donc au consommateur plusieurs possibilités pour qu'il passe ses commandes. Nos clients privilégient massivement le téléphone, même si Internet a le vent en poupe avec notre catalogue interactif.

Quelle est votre politique d'e-mailing ?

G. L. Dans un premier temps, nous envoyons chaque jour un e-mail à nos clients sur une “bonne affaire”, soit 250 000 envois, plus un e-mail par semaine sur une autre extrapolation de la base. Dans le cadre de notre stratégie de marketing direct, pas moins de 25,4 millions de messages électroniques ont été envoyés cette année. Notre base d'e-mails est constituée de 400 000 contacts.

Quel est votre dispositif de gestion de la relation client ?

G. L. Nos 50 téléopératrices travaillent 6 jours sur 7. Elles traitent essentiellement les informations et les réclamations. Les demandes sont répertoriées sur deux niveaux. Le premier traite les commandes et les demandes simples. C'est un centre d'appels externalisé au Maroc qui s'en occupe, dont la structure fluctue en fonction des appels. Le second niveau traite des demandes plus complexes, comme les conditions liées à la garantie, les délais de paiement, les paiements fractionnés ou différés. Ce centre est internalisé et des téléopérateurs ont été spécialement formés. Dans son ensemble, le service clients d'Home Shopping Service gère 50 000 appels par mois, soit un appel pour quatre commandes traité par deux centres SAV.

Les chaînes proposentelles un club de fidélité aux téléspectateurs ?

G. L. Le club existe depuis dix ans. Il propose deux niveaux : le “Premium” et le “Cristal”. Moyennant une cotisation annuelle (27 € et 50 €), le client obtient une remise permanente de 10 %, des offres ponctuelles et des avantages sur les frais de port et les frais téléphoniques. Le panier moyen d'achat est de 100 €, mais ce sont surtout nos clients “Club” qui commandent (surtout par téléphone), deux fois plus que le reste de fidèles. Et les clients qui passent au moins une commande par mois obtiennent la carte Cristal gratuitement. Pour les récompenser, nous sommes en train d'imaginer des émissions en public avec tous nos meilleurs clients et aussi une formule de parrainage.

L'effet zapping, propre à la télé, nuit-il à la récence des achats ?

G. L. Nos concurrents terminent leurs émissions quand nous commençons la nôtre. Donc, en cours d'émission, ils ne peuvent pas zapper. Par ailleurs, TF1 touche un public plus âgé, donc nous avons peu de recoupements. Le fichier de Téléshopping est composé à 50 % de personnes de plus de 60 ans, alors que notre coeur de cible se situe autour de 35-50 ans.

Quels sont les pays les plus avancés en matière de téléshopping ? Et quels modèles tentez-vous d'appliquer en France ?

G. L. Nous testons actuellement les enchères en Hollande. Elles existent sous deux formes. La première, le “Price Drop”, consiste à fixer un prix de départ, puis le téléspectateur appelle pour le faire baisser et tout le monde paye le prix le plus bas. Le second, le “Bid up”, part d'un prix plancher fixé à un euro et le téléspectateur appelle pour faire monter le prix. Dans ce cas, le principe qui s'applique est celui de la rareté. C'est l'enchère la plus haute qui remporte le produit. Avec bien sûr, un prix plafond. Les dix clients qui arrivent à ce prix-là remportent l'enchère, les autres n'ont rien car ils n'auront pas misé assez. Cette forme de vente est très exploitée en Angleterre. Deux chaînes y sont d'ailleurs dédiées. En France, l'aspect réglementaire est complexe. Ce n'est ni le modèle de eBay, ni une vente aux enchères, ni du prix discount. C'est plutôt un système équivalent aux ventes organisées par Nouvelles Frontières (pour la formule Bid up). Mais c'est vrai que le marché anglais est plus mature.

PARCOURS


Gilles Labouyrie Après quinze années passées dans le commerce de détail (enseignes et catalogues), Gilles Labouyrie a rejoint l'industrie de la vente à la télévision, il y a six ans, en tant que directeur général adjoint en charge du poste marketing & commercial chez Home Shopping Service. Gilles Labouyrie est également à l'origine de la création de ERA Europe (regroupement de plusieurs acteurs européens de la vente à la télévision) et en a été le président de 2003 à 2006.

CHIFFRES-CLÉS


- M6 Boutique La Chaîne : taux de croissance de 52 % en 2006. - Mistergooddeal : 100 millions d'euros de CA en 2006. - M6boutique.com : 500 000 visiteurs uniques mensuels.

Propos recueillis par Marie-Juliette Levin

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page