Etude PressDiagnostic : l'abonnement pressedoit devenir un service
Claritas Acxiom a créé et entretient une base de données de 4 millions de
foyers, recrutés par l'intermédiaire de son enquête annuelle Spéciale
Consom-mation. Chaque année, ce sont 325 000 abonnés presse qui sont recrutés.
Parmi ceux-ci, 99 000 sont communs avec l'année N-1 et 32 000 sont communs à
toutes les années si on remonte à quatre ans. Avec ce matériau, Claritas peut
analyser des phénomènes non seulement conjoncturels, mais aussi dégager des
tendances structurelles. C'est ce qu'elle a fait en proposant aux éditeurs de
presse une étude, PressDiagnostic 2003, qui aboutit à des constats inquiétants.
Premier constat, jusqu'à sa retraite, plus un individu vieillit et plus sa
probabilité d'être abonné à un titre de presse augmente, pour se stabiliser à
60 ans. Cependant, à partir de 50 ans, on assiste à un fléchissement du nombre
de lectures différentes. Pour Stéphane Merger, directeur marketing et
communication de Claritas, « plus on monte en âge, plus on s'abonne. Mais avec
l'âge, le nombre de centres d'intérêt se réduit. » Davantage que l'âge, c'est
la stabilité sociale qui pousse à l'abonnement. En revanche, les populations
jeunes de moins de 40 ans, à haut niveau culturel, sont peu sensibles à
l'abonnement. Elles lisent, mais achètent leurs titres au numéro.
Présenior et senior
Le cœur de cible de l'abonnement
presse est constitué de préseniors et de seniors, actifs, plutôt urbains,
surconsommateurs de loisirs. Cette population est amenée mécaniquement à se
réduire, et de plus, elle est en phase de saturation. C'est une population
expérimentée, fortement sollicitée à coup de promotions et de primes, dont elle
sait d'ailleurs profiter. Elle attend les relances d'abonnement, sachant
qu'elle ne peut qu'y gagner… Ou alors, séduite par la mécanique perverse des
échanges de fichiers, elle fait son marché lorsque la concurrence lui propose
des offres. Les éditeurs de presse ont fait l'impasse sur la fidélisation.
Pire, les pratiques actuelles privilégient la récompense de l'infidélité - si
je me réabonne dans six mois, je paierai de toute façon moins cher - au
détriment de la fidélité - si je prolonge mon abonnement, je paierai “plein
pot”. Sachant que le coût d'un abonné recruté ne se rentabilise qu'au bout de
trois ou quatre ans, l'étude ne peut que constater une baisse inquiétante de la
rentabilité induite par cette politique.
Dépenses de flux
La notion d'abonnement est loin d'être réservée aux personnes
âgées. Depuis une dizaine d'années, nous sommes entrés dans une ère de dépenses
de flux. Les premiers à avoir appliqué cette formule sont les opérateurs de
télévisions payantes, puis le secteur de la téléphonie mobile. Plus récemment
la distribution cinématographique avec les cartes cinéma. Avec succès, les
prélèvements mensuels sont moins douloureux qu'une facture annuelle. Et les
populations habituées à ce type d'abonnement sont en général jeunes. De plus,
le caritatif a montré l'exemple avec le prélèvement automatique de sommes
légères chaque mois, réussissant ainsi à pénétrer des populations plus jeunes,
plus urbaines et à CSP élevé. La presse peut s'en inspirer, passant d'une
logique produit - être abonné à un titre est souvent vécu comme avoir un “fil à
la patte”- à une logique service, l'abonné par prélèvement mensuel devenant un
consommateur de lectures, modulables au gré de ses envies. Les grands groupes
de presse pourraient s'inspirer des pratiques des opérateurs de télévisions
câblées ou satellitaires, réinventant la notion de bouquet de programmes en
l'appliquant à des titres différents, mais appartenant au même groupe. Cette
piste, invitant les éditeurs à se lancer dans une logique durable d'abonnement,
implique qu'ils résistent à l'inflation promotionnelle et qu'ils privilégient
la récompense de la fidélité.
Internet, un bonus à l'abonnement
Pour promouvoir ce type d'abonnement, les éditeurs
pourraient même utiliser des canaux autres que le simple mailing, en ayant
recours à l'Internet ou encore à la téléphonie mobile. L'étude de Claritas
montre, par exemple, que le fait qu'un foyer soit connecté à Internet à
domicile donne un “bonus” à l'abonnement presse de l'ordre de 10 à 15 %. Même
constatation avec les foyers abonnés à une télévision payante : les foyers
mono-parentaux de moins de trente ans abonnés à une télévision payante sont 25
% plus nombreux à être abonnés à la presse que ceux qui ne le sont pas. Ce que
Claritas appelle le cercle de l'abonnement - les pré- seniors et seniors
actifs, les retraités vépécistes et donateurs et les “chasseurs de primes”, des
populations à revenus faibles, CSP -, très vépécistes, qui s'abonnent pour des
raisons extérieures à l'affinité à la lecture, souvent sans lendemain - peut
s'ouvrir à d'autres catégories. Avec un peu de créativité, il semble possible
de faire venir à l'abonnement des foyers fortement lecteurs, mais qui tardent à
passer à l'acte.