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Don en ligne : Internet ne sera-t-il qu'un média d'urgence ?

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Le drame asiatique a confirmé l'efficacité d'Internet en tant qu'outil de collecte et canal relationnel. Les associations humanitaires ont constaté une explosion du don en ligne et une arrivée massive de nouveaux donateurs, particulièrement on line. Elles doivent désormais tenter de pérenniser ce phénomène.

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« On a gagné cinq ans d'un coup en termes de reconnaissance du média Internet. Le Web s'est imposé en tant que moyen d'information et outil de collecte », constate Frédéric Fournier, D-ga de l'agence spécialisée sur le secteur humanitaire Optimus. Trois mois après le tsunami, l'heure est au bilan. La vague de solidarité a étonné tous les observateurs du secteur. Les premières analyses à chaud avaient cru y voir une vraie révolution en termes de collecte de fonds. « Je relativise aujourd'hui certains aspects de l'étude que nous avions menée quinze jours après l'événement, reconnaît Eric Dutertre, président d'Excel, agence conseil en collecte de fonds, auteur de “Tsunami, un séisme dans le monde du fund raising”. En particulier, je doute plus fortement de la capacité des nouveaux donateurs du tsunami à refaire par la suite un don. » Excel avait très bien expliqué la convergence de facteurs expliquant l'afflux de dons : un événement exceptionnel, des victimes locales et occidentales, une date clé, le 26 décembre, des images choc et multiples, et une implication inhabituelle des médias, devenant militants plus qu'informateurs. « C'est le mix média TV et Internet qui explique ainsi le boom du don en ligne suite au tsunami, analyse Eric Dutertre. L'arrivée de nouveaux donateurs est un laboratoire d'études essentiel pour les associations concernées. »

E-collecte de masse


Dans les premiers jours suivant la catastrophe, certaines ONG ont eu du mal à comprendre ce qui se produisait. « Nous avons cru que notre site était attaqué et que les dons qui affluaient étaient des faux », explique Pascal Fréneaux, responsable marketing direct en France de Médecins Sans Frontières. Nous avons recueilli 3 ME en ligne pour l'année 2004, en sachant qu'à mi-décembre nos prévisions étaient de 500 000 E. La Croix Rouge, de son côté, a aussi constaté une explosion du don en ligne : 14 ME ont ainsi été récoltés sur les 85 millions recueillis, en sachant que toute la collecte on line se fait sur le site institutionnel de l'association. « Dans les premiers jours en particulier, les donateurs ont privilégié l'Internet : un quart des dons a alors été fait en ligne, contre 16 % actuellement, explique Frank Delaval, directeur communication et marketing de La Croix Rouge. De plus, nous avons constaté que le don moyen sur Internet a été plus élevé. En première analyse, on peut en conclure qu'il s'agit de dons d'impulsion. » Au vu de la réactivité de leurs donateurs, les associations ont d'ailleurs stoppé tous les envois de mailings d'urgence. L'instantanéité fait recette L'outil web a également montré sa force. « Internet est un outil ultra-intéressant pour la collecte en ligne. Non seulement, il fournit de l'information, visuelle et sonore, mais il permet aussi de donner en quelques secondes », note Claude Chaffiotte, P-dg du spécialiste des stratégies de fund raising RMG Connect. D'eux mêmes les Français ont utilisé la Toile pour assouvir leur besoin d'information immédiate. Du côté des ONG, le don on line a facilité indéniablement le travail de gestion de la collecte. « C'est parfait et moins coûteux, estime Frank Delaval. Cela nous permet de poursuivre facilement la relation avec nos donateurs, de leur faire parvenir des newsletters d'information pour suivre nos opérations sur le terrain. Il ne manque plus que de leur envoyer un reçu fiscal électronique. » Pour les associations non équipées de module de dons en ligne durant la campagne pour l'Asie - un tiers d'entre elles, selon les estimations - la prise de conscience a été immédiate. « Nous étions déjà à la traîne, avoue la responsable d'une association qui ne propose que l'impression d'un formulaire de don. Mais là, nous avons dix ans de retard ! »

Convertir les nouveaux donateurs


La catastrophe en Asie a brusquement rajeuni le profil type du donateur (un senior de plus de 65 ans, retraité, ancien employé ou ouvrier). Les adolescents et enfants ont investi le canal SMS - plus de 600 000 dons ont été effectués ainsi -, un public jeune et urbain ou de papy boomers a testé le don en ligne. Suite au tsunami, une masse de nouveaux donateurs s'est manifestée. « 60 à 70% des donateurs pour l'Asie étaient des personnes que nous ne connaissions pas, et 80 % de ceux qui ont donné en ligne. Nous sommes en train de dédoublonner notre base afin de vérifier ces dires », explique Pascal Fréneaux de MSF. Ces nouveaux donateurs resteront-ils des “urgentistes”, des bienfaiteurs exceptionnellement mobilisés, qui ont, pour certains, trouvé sur le Web le moyen de répondre à leur émotion instantanée ? Tout le challenge est là. « C'est un grand point d'interrogation, résume Frédéric Fournier d'Optimus. Il ne faudrait pas que l'outil web ne soit perçu que comme un outil exceptionnel. Les associations doivent maintenant apprendre à créer une relation on line spécifique. » Diverses possibilités s'offrent à elles : continuer d'informer leurs “donateurs Asie” des opérations menées sur le terrain ou tenter de les sensibiliser à d'autres causes.

Du profiling à bon escient


Concrètement, le monde associatif n'en est qu'à l'étape préliminaire. Les services marketing entrent leurs nouveaux contacts dans leurs bases de données. Puis elles lanceront les premières analyses pour tenter d'anticiper le comportement des nouveaux donateurs. En même temps, elles doivent faire attention à un risque réel : perdre du temps, de l'énergie, et des budgets marketing direct, à tenter de séduire des donateurs dont la philanthropie ne s'est exprimée qu'au moment où l'horreur d'un événement médiatisé est venu jurer avec un temps de fêtes et de vacances.

Le comportement des internautes après la catastrophe en Asie du Sud Est


Une enquête Ipsos Média / TBWA Corporate pour Microsoft / MSN Actions Solidaires, réalisée fin janvier 2005, analyse l'e-solidarité. 62 % des internautes se sont servis d'Internet pour rechercher des informations sur les pays touchés, consulter des sites d'associations caritatives, etc. 48,5 % des internautes ont réalisé un don ou une promesse. 21,7% des internautes ont effectué ce don via Internet. Ceux qui donnaient pour la première fois en ligne - 70% des donateurs on line - sont, par rapport aux e-donateurs aguerris : à parité homme / femme ; concentrés sur la tranche 25-49 ans, plus actifs, toujours à majorité CSP +, plus provinciaux et moins avertis en termes d'utilisation d'Internet (38 % d'entre eux utilisent la Toile depuis seulement deux ans).

Le profil des donateurs français


Le Cerphi, Centre d'étude et de recherches sur la philanthropie, et l'UPG, Union pour la générosité, évaluent chaque année la générosité des Français. Voici les résultats du rapport de novembre 2004. 2 milliards de dons sont récoltés en France chaque année. Le don moyen annuel par foyer fiscal représente 260 E et progresse régulièrement. Les plus modestes donnent plus, en proportion de leur revenu. En moyenne, les contribuables de la tranche 10 500 / 12 000 E, gagnés et déclarés, donnent 115 E. Ceux de la tranche 39 000 / 78 000 : 57 E. Les moins de 50 ans représentent plus du tiers des déclarants. A revenus comparables, le Cerphi a démontré que toutes les générations donnent sensiblement autant.

 
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Laure Deschamps

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