Des logiciels pour comprendre le comportement des clients
La mise en oeuvre des outils de data mining bouscule les schémas de fonctionnement interne des entreprises. Les fonctions des services statistiques sont progressivement transférées au marketing.
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L'efficacité de l'analyse des données est entièrement dépendante de la
qualité et de la puissance des outils mis en oeuvre. L'informatique est ici
incontournable. Et le marché des logiciels analytiques prédictifs, florissant.
Basés sur les techniques modernes, les outils ouvrent de nouveaux horizons aux
services marketing.
« On trouve deux
types d'offres sur le marché, indique Hervé Perdrix, directeur général de
Isoft, éditeur du logiciel Alice destiné au data mining. Celle provenant des
outils statistiques, comme SAS ou SPSS et dont le maniement requiert encore des
compétences mathématiques. Et de nouveaux outils dont les interfaces adaptées
aux besoins du marketing présentent moins de contraintes. Ils sont aussi
utilisables sans connaissances statistiques et permettent une exploration
intuitive. » Les outils du premier type sont destinés aux entreprises très
centralisées, avec des départements spécifiques pour les fonctions d'analyse,
par exemple certaines banques ou le secteur de grande consommation. Les seconds
sont destinés aux analyses dans la gestion de la relation client. L'objectif
est de savoir quel type d'opération a bien ou pas bien marché et pourquoi. Par
exemple, on va analyser le taux de retours en fonction du nombre de relances
lors d'une campagne avec un centre d'appels. Ce qui permet parfois de découvrir
que, dans tel cas de figure, et après deux relances, ce n'est plus la peine
d'insister, tandis que dans d'autres cas, on peut aller jusqu'à cinq relances
en espérant la réussite.
« Notre objectif
est de rendre la modélisation compréhensible, de laisser parler les données
stockées », affirme François Thomas, directeur du pôle analytique chez
Nextapplication. Issu des travaux d'un centre de recherches mathématiques, dans
le cadre du projet européen Keso, son produit Data Distilleries devrait
intégrer les suites de Marketic. Sa mise en oeuvre serait plus rapide que celle
des produits du type SAS. Il peut intégrer le score, mais aussi la marge et la
valeur de l'offre ainsi que les règles du métier, par exemple une segmentation
complémentaire pour des clients à forte valeur. « L'enjeu est de faire du
scoring en temps réel, estime François Thomas. Dans un centre d'appels, par
exemple, sortir les recommandations sur l'écran en choisissant le produit selon
le score d'appétence à partir des données les plus récentes. » L'outil répond
aux besoins de modélisation avec un arbre de décision et des régressions
linéaires. Plusieurs modèles peuvent être générés en une seule journée. Le
logiciel permettrait une meilleure gestion de la communication multicanal en
tenant compte de l'appétence par canal. Data Distilleries vient d'être primé
par la revue financière anglaise The Banker, dans la catégorie des logiciels
analytiques prédictifs en temps réel. Le prix a été décerné pour sa mise en
oeuvre chez Spaarbelg (plus grande institution financière de Hollande et
filiale du groupe Aegon, 5e capitalisation mondiale des sociétés d'assurance
vie), qui aurait provoqué une augmentation de 100 % des ventes de produits
financiers lors des appels entrants, un accroissement de 7,5 % des taux de
conversion des appels clients et 10 ME de ventes supplémentaires pour 2
millions d'appels entrants. L'analyse des données ne se limite pas aux
fonctions de segmentation ou de prévision marketing. L'étude de la satisfaction
des clients fait aujourd'hui partie des fonctions de data mining. A l'origine
destiné au traitement des enquêtes, le logiciel Question de Grimmersoft intègre
aujourd'hui des modules d'analyse des données permettant d'extraire diverses
informations de la base de données clients. Il est possible d'effectuer des
analyses multivariées. Le logiciel utilise la technique des "arbres de
segmentation", appelée aussi "arbres de décision". Dans cette méthode, on
recherche des variables qui ont influencé la décision des consommateurs, par
exemple d'acheter ou de répondre à un mailing, et ensuite, on construit un
arbre où, à chaque carrefour, la discrimination s'opère suivant ce qui a joué
le plus et le moins dans le choix. « Mais ce serait une erreur de croire que le
logiciel seul va reconnaître les tendances présentes dans une base de données,
avertit Jean-François Grimmer, directeur général de Grimmersoft. Au départ, il
faut toujours élaborer une hypothèse. Et, si dans cette hypothèse, vous oubliez
une variable pertinente, le logiciel ne va pas la trouver à votre place. » La
limite des BDD réside dans le nombre d'informations disponibles. Le besoin
d'homogénéiser les informations en provenance des différents services de
l'entreprise a conduit au développement des entrepôts de données. Ces derniers
permettent aujourd'hui de relier l'analyse de la satisfaction client avec les
données disponibles en interne. Le résultat permet d'expliquer non pas la
qualité elle-même, mais sa perception par la clientèle. Et ici, on peut
s'attendre à des surprises. Par exemple, EDF, qui a mené ce genre d'études pour
connaître l'impact des microcoupures de courant, a comparé les appréciations
des clients avec la fréquence connue des pannes. Pour découvrir que, pendant un
certain temps, ces pannes étaient perçues comme mineures par la clientèle,
mais, passé un certain seuil, elles devenaient intolérables. L'objectif est de
retrouver le seuil de fréquence qui va générer l'insatisfaction. Les mêmes
logiciels servent aussi à analyser la satisfaction des clients des caisses
d'assurance maladie, de certaines directions régionales de France Télécom, des
centres UCPA (voir encadré). « Les techniques multivariées nous permettent de
réaliser une segmentation plus large que les autres algorithmes de data mining
car elles offrent l'explication et aussi la compréhension des relations entre
les variables », conclut Jean-François Grimmer.
L'UCPA étudie la satisfaction des clients
« Nous avons une démarche de qualité individualisée, témoigne Laurence Chouvet, coordinatrice qualité à l'Union nationale des centres sportifs de plein air (UCPA). Un questionnaire est distribué à tous les stagiaires. Nous avons testé la réponse par voie postale, mais aujourd'hui, les préférences vont vers une réponse directe sur le site à la fin du stage. Nous avons besoin d'obtenir des informations en cours de saison, pour réaliser des actions correctives immédiates, et aussi d'une "photo" de satisfaction globale de la saison. » Le logiciel Question de Grimmersoft permet d'intégrer les deux fonctionnalités. Chacun des 130 centres dispose d'une version "bridée" pour le traitement des questionnaires. Les moniteurs saisissent les données à la main à la fin de chaque stage. En tout, 25 000 questionnaires seront traités pendant la saison. La version du logiciel installée sur leurs postes édite les tableaux de bord hebdomadaires et mensuels, sous Excel. Les données sont aussi rapatriées vers le service qualité de l'UCPA pour la consolidation par fusion des fichiers. Ici, on produit les tableaux de bord de satisfaction à l'échelle régionale et nationale. Les résultats de la saison sont envoyés vers l'ensemble des directions des centres et aux responsables du siège, en version papier ou sur CD. « Nous avons apprécié le service et les développements complémentaires réalisés par l'éditeur, qui nous ont permis de mettre en place une interface presse-bouton pour nos moniteurs sportifs et hôtesses d'accueil », conclut Laurence Chouvet.